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Vaccins : Pfizer accumule les retards en Europe et en Amérique

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

Déjà critiquée pour sa lenteur, la campagne de vaccination contre le Covid-19 en Europe a subi un contretemps avec l’annonce de retards de livraison du vaccin Pfizer BioNTech pour les semaines à venir. Sur le continent américain, le Canada et le Panama sont également touchés par les retards.

Il n’y a pas qu’en Belgique que la campagne de vaccination est retardée. La semaine dernière, le groupe américain Pfizer, associé au laboratoire allemand BioNTech, a averti de façon inopinée qu’il n’allait pas être en mesure de fournir aux pays de l’UE les quantités hebdomadaires auxquelles il s’était engagé.

Déception et colère

En Flandre, les hôpitaux ont dû cesser de vacciner leurs soignants, à la grande déception de ces derniers. « Pour ceux qui travaillent dans les services d’urgence ou les soins intensifs, le vaccin n’arrive pas un jour trop tôt. Avoir à entendre cela si tard est très, très démotivant. Nous sommes déçus, en colère et frustrés », a ainsi déclaré Lieve Ketelslegers, la porte-parole de l’hôpital Jessa à Hasselt au quotidien De Morgen à propos des retards annoncés par Pfizer.

En cause, des modifications à effectuer dans la chaîne de production de l’usine belge de Puurs, lesquelles « nécessitent des approbations réglementaires supplémentaires », a expliqué Pfizer. Le volume total des baisses de livraison n’a pas été communiqué mais plusieurs pays s’attendent à un rationnement significatif. Les adaptations sur le site de Puurs, qui produit les vaccins à destination de toute l’Europe, vont entraîner « des fluctuations dans les calendriers de commandes et de livraisons », a ajouté Pfizer. Il assure que les changements apportés à l’usine ont pour but, « dans un avenir proche », de « permettre d’augmenter rapidement les volumes » fabriqués.

Ces aménagements ne sont pas la seule raison du retard accumulé par Pfizer. En Belgique, le géant pharmaceutique a décidé de revoir sa livraison à la baisse suite à l’annonce des autorités qu’il y avait moyen d’extraire six doses, et non cinq comme initialement prévu, des fioles. Le contrat entre la Belgique et Pfizer mentionne en effet le nombre de doses, et non le nombre de flacons. Les autorités belges, qui avaient ainsi espéré augmenter de 20% le nombre de vaccinations, en sont pour leurs frais.

La Suède table sur « une baisse de 25% environ » des livraisons, selon l’autorité de santé publique. La France évoque une « forte baisse » qui va la contraindre à « ajuster » son rythme de vaccination. La Norvège anticipe 18% de doses en moins par rapport à ses prévisions. Le Danemark, qui est le pays de l’UE à avoir vacciné le plus pour l’instant, « s’attend à vacciner moins qu’initialement prévu ».

Irritation

Même si les laboratoires promettent que le retard sera rattrapé avant la fin du trimestre, l’annonce a provoqué l’irritation de plusieurs gouvernements européens. Le gouvernement allemand a déploré « une communication inattendue et de très court terme ». Les ministres de la Santé de six autres pays de l’Union européenne ont exprimé leur « sérieuse préoccupation ».

Dans une lettre commune, les ministres du Danemark, d’Estonie, de Finlande, de Lituanie, de Lettonie et de Suède dénoncent une situation « inacceptable » portant préjudice à la « crédibilité du processus de vaccination ». La présidente de la Commission Ursula von der Leyen a affirmé que, passé le retard des prochaines semaines, les quantités promises pour l’ensemble du premier trimestre seront livrées d’ici l’échéance de celui-ci.

Actions légales

L’Italie compte prendre « dans les prochains jours » des actions légales contre le laboratoire Pfizer, a annoncé mardi le patron de la cellule de crise italienne pour la pandémie, Domenico Arcuri. « La protection de la santé des citoyens italiens n’est pas négociable », a-t-il prévenu. « La campagne de vaccination ne peut pas être ralentie, encore moins pour l’administration des deuxièmes doses à de nombreux Italiens qui ont déjà reçu la première », a-t-il ajouté.

Pfizer a informé l’Italie que « non seulement les doses qui n’ont pas été livrées cette semaine, unilatéralement et sans préavis, ne le seront pas la semaine prochaine, mais en plus il y aura une nouvelle légère réduction des livraisons », a assuré Arcuri. Vendredi, le commissaire du gouvernement italien pour le coronavirus avait indiqué avoir « envoyé une réponse officielle à Pfizer Italie, dans laquelle il exprime sa déception » et « demande le rétablissement immédiat des quantités à distribuer ».

Le contrat doit être respecté

Les retards ne sont pas du goût de la Commission européenne, a clarifié mercredi la présidente de l’exécutif Ursula von der Leyen. C’est sa Commission qui a négocié avec les producteurs du vaccin une sorte d’achat groupé de doses, avant même que le vaccin ne soit validé. Par la suite, chaque État a conclu avec BioNTech-Pfizer un accord de livraison de sa part du gâteau, dans le cadre de la précommande européenne. Le contrat doit être respecté, a insisté l’Allemande, rappelant que toutes les personnes qui ont été vaccinées parmi les premières en sont désormais au moment où elles devraient recevoir leur seconde injection du produit.

Ces retards ne concernent pas seulement l’Union européenne. Le Canada a dit également être touché par ce ralentissement de livraison. « C’est un retard temporaire, et nous pensons toujours obtenir suffisamment de vaccins pour que tous ceux qui le souhaitent puissent être vaccinés d’ici fin septembre 2021 », a déclaré la ministre des Services publics et de l’Approvisionnement Anita Anand. Ce contretemps n’affectera pas les Etats-Unis livrés en vaccins depuis une usine Pfizer du Michigan.

Mercredi, le Panama a reçu les premières doses du vaccin Pfizer/BioNTech contre le Covid-19, un lot beaucoup moins important qu’attendu qui soulagera toutefois ce pays d’Amérique centrale frappé du plus grand nombre de contaminations en Amérique centrale.

Le Panama, qui devient ainsi le deuxième d’Amérique centrale à recevoir le vaccin après le Costa Rica, avait été informé lundi d’un retard des livraisons par le laboratoire américain Pfizer, prévenant que cette première cargaison ne comprendrait que 12.840 doses et non les 40.000 prévues initialement.

Avec AFP

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