L’UE en quête de consensus pour accroître les expulsions de migrants
Les ministres européens de l’Intérieur, réunis jeudi à Stockholm, cherchent les moyens d’augmenter les renvois de migrants en situation irrégulière vers leurs pays d’origine, notamment en restreignant davantage la délivrance de visas aux ressortissants d’Etats « non coopératifs ».
Il « est clair que dans une zone sans frontières internes, nous avons besoin d’une politique à l’échelle de l’Europe pour gérer les questions d’asile et de migration« , a rappelé la secrétaire d’Etat à l’Asile et la migration Nicole de Moor (CD&V) avant la réunion. La secrétaire d’Etat est présente à Stockholm avec la ministre de l’Intérieur Annelies Verlinden, pour une première journée de ministérielle informelle sous présidence suédoise, centrée sur les questions d’asile, migration, et Affaires intérieures.
Pour Nicole de Moor, il s’agit d’avoir des « frontières plus fortes, davantage de solidarité entre les Etats membres et une meilleure politique européenne de retour, car le sujet du retour est crucial. Nous devons parler d’une seule voix quand on s’adresse aux nationaux de pays tiers qui ne coopèrent pas suffisamment à notre politique de retour », martèle-t-elle.
« Nous voyons les arrivées irrégulières augmenter (…) Renvoyer ceux qui se voient refuser l’asile en Europe est une question très importante« , a déclaré la ministre suédoise chargée de la Migration, Maria Malmer Stenergard. Sur les quelque 340.500 décisions de « retour » prononcées en 2021 dans les pays européens, 21% ont été effectivement mises en œuvre, selon des données d’Eurostat citées par la Commission. « Nous avons un taux de retours très bas. Nous pouvons faire des progrès pour augmenter leur nombre et les rendre plus rapides », a commenté jeudi à son arrivée la commissaire européenne aux Affaires intérieures Ylva Johansson.
Au niveau européen, un mécanisme permettant d’utiliser les visas comme levier pour obtenir des Etats tiers qu’ils reprennent leurs ressortissants est entré en vigueur en 2020. La présidence suédoise du Conseil de l’UE juge « crucial d’exploiter tout le potentiel de ce mécanisme ». « Il y a certains pays tiers pour lesquels des mesures pourraient être prises rapidement pour améliorer le niveau insuffisant actuel de coopération », estime-t-elle dans un document préparatoire à la réunion.
Mais l‘Allemagne a exprimé ses « réserves » à ce sujet. La ministre de l’Intérieur Nancy Faeser a indiqué privilégier la conclusion d’accords migratoires, notamment avec les pays d’Afrique du Nord, « permettant d’une part des voies légales (de migration) et d’autre part des rapatriements efficaces ». Actuellement un seul pays, la Gambie, est sous le coup d’une sanction de l’UE pour « manque de coopération »: les conditions d’octroi d’un visa pour l’espace Schengen aux ressortissants de ce pays ont été durcies et les droits augmentés à 120 euros (contre 80 en moyenne).
La Commission avait aussi proposé en 2021 des mesures restrictives en matière de visas à l’encontre de l’Irak et du Bangladesh. Selon la commissaire Johansson, qui s’est rendue en novembre à Dacca, la menace de sanctions a poussé le Bangladesh à coopérer. Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE avaient en décembre 2021 appelé à se servir de « tous les outils européens pertinents, dont l’aide au développement, le commerce et les visas » comme « leviers » en matière migratoire.
Avant la réunion, jeudi matin, Nicole de Moor a annoncé le lancement de nouvelles campagnes de prévention pour éviter les mouvements secondaires de migrants à l’intérieur de l’Union, un phénomène qui inquiète la Belgique depuis longtemps et est responsable selon la secrétaire d’Etat d’une bonne partie de la saturation du réseau d’accueil. Les campagnes « de prévention » visent les Afghans, les Burundais et les Érythréens, « nationalités courantes dans la migration secondaire ».