Les ministres de l'Environnement des 27 États membres de l'Union Européenne © Belga

Loi européenne de restauration de la nature: les ministres de l’Environnement de l’UE ont dégagé un accord

Les ministres de l’Environnement des 27 États membres de l’UE ont trouvé mardi à Luxembourg une approche commune sur la proposition de règlement européen de restauration de la nature, a annoncé la présidence suédoise du Conseil de l’UE en milieu de journée.

Cette « orientation générale » servira au Conseil de mandat de négociation avec le Parlement européen, qui doit pour sa part encore s’accorder sur une position commune. Elle n’a pas été acquise à l’unanimité, mais la présidence suédoise a conclu des échanges qu’il existait une majorité qualifiée pour avancer, c’est-à-dire plus de 55% des États membres, représentant plus de 65% de la population de l’UE. Aucun vote n’était nécessaire à ce stade, mais la Pologne, la Finlande et la Suède elle-même se sont prononcées contre la proposition de compromis. Les Pays-Bas et l’Autriche se seraient quant à eux abstenus s’il avait fallu voter. 

Quant à la Belgique, où les différents niveaux de pouvoir n’ont pas trouvé de position commune, elle n’a pas eu à afficher sa couleur. Le pays était représenté par la ministre flamande de l’Environnement, Zuhal Demir (N-VA). « La position du gouvernement flamand était que nous devions demander davantage de clarifications : par exemple, pour que nous puissions élaborer nous-mêmes nos plans de restauration de la nature, que nous décidions nous-mêmes des objectifs et que nous décidions nous-mêmes des conséquences, et c’est ce que j’ai mis sur la table aujourd’hui. Nous n’avons pas dû voter ».

La ministre reconnaît que le compromis proposé par la présidence suédoise va dans la bonne direction, en comparaison avec la proposition initiale de la Commission européenne, qui à ses yeux allait trop loin. « Nous sommes pour la restauration de la nature, nous le faisons d’ailleurs en Flandre à plein régime, mais il faut aussi tenir compte de la densité de population et de notre faible étendue. Nous devons pouvoir encore réaliser des projets et leur délivrer des permis ».

Sujet de controverse ces derniers mois, la proposition de règlement vise à restaurer les écosystèmes, les habitats et les espèces dans l’ensemble des zones terrestres et marines de l’UE.

Le texte initial de la Commission demande notamment aux États membres de mettre en place des mesures de restauration couvrant, d’ici à 2030, au moins 20 % des zones terrestres et marines de l’UE et, à terme, d’ici à 2050, l’ensemble des écosystèmes ayant besoin d’être restaurés. Dans la ligne des objectifs fixé à la COP15 Biodiversité de Montréal, chaque État devrait prendre des mesures de restauration d’ici 2030 sur au moins 30% des écosystèmes terrestres et marins abîmés, puis 60% d’ici 2040 et 90 % d’ici 2050, selon un communiqué du Conseil.

Des modalités d’application plus flexibles

Mais par rapport à la proposition initiale de la Commission, l’accord des Vingt-Sept offre davantage de flexibilité sur les modalités d’application. Alors que les exigences de non-détérioration (maintien en bon état) sur de vastes zones naturelles, y compris hors des aires protégées Natura 2000, soulevaient de vives résistances, le compromis prévoit l’obligation de prendre des mesures, mais sans contrainte de résultat. Surtout, de nombreux assouplissements ont été ménagés sur les obligations spécifiques à chaque type d’écosystème (espaces verts en ville, réhumidification des tourbières, forêts, éléments à haute biodiversité sur les terres agricoles…), et les États ont ajouté une dérogation pour l’installation de projets d’énergies renouvelables ou d’infrastructures de Défense.

Le vice-président de la Commission, Frans Timmermans, en charge du Pacte vert, a également garanti au cours du débat qu’il continuerait à prendre en compte les préoccupations qui persistent et qu’il souhaitait offrir « un maximum de flexibilité ». « Pour moi, il est également très important de reconnaître le rôle des co-décideurs publics dans un contexte constitutionnel », a-t-il déclaré en s’adressant à Zuhal Demir. 

Les ministres belges satisfaits

Pour la vice-Première ministre Groen Petra De Sutter, la capacité du Conseil à avancer sur ce dossier constitue une excellente nouvelle. Le texte comporte encore à ses yeux suffisamment d’ambition. La ministre fédérale du Climat, Zakia Khattabi (Ecolo), s’est réjouie du dénouement et a remercié les collègues, dont Mme Demir, « qui ont tenté jusqu’au bout de faire bouger les lignes de l’Open Vld et du CD&V, en vain malheureusement ».

Au niveau belge, le dossier avait été marqué par un appel du Premier ministre Alexander De Croo à faire une « pause » dans la réglementation environnementale européenne. Les regards se tournent à présent à nouveau vers le Parlement européen, très divisé sur ce dossier. La droite et l’extrême droite s’opposent farouchement à un texte qu’ils jugent susceptible de menacer la production agricole. Si les eurodéputés conservateurs du PPE (droite), première force du Parlement, ont échoué la semaine dernière à le rejeter, il fera l’objet d’un vote serré en séance plénière en juillet, au risque de compromettre les futurs pourparlers entre États et eurodéputés pour le finaliser.

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