De Croo

Alexander De Croo: « Des pays européens jouent aujourd’hui un peu chacun pour soi »

Le Premier ministre belge Alexander De Croo s’est montré préoccupé, à son arrivée jeudi matin à un « important sommet européen sur l’économie et l’énergie », par la concurrence que livrent certains États membres de l’UE disposant de fortes ressources, face à un réel risque de désindustrialisation de l’Europe, aggravé par les subventions américaines.

Il y a un risque de désindustrialisation de l’UE, dont l’impact pourrait être important pour notre pays aussi. Or il semble que des pays européens jouent aujourd’hui un peu chacun pour soi, à un jeu de celui qui a les poches les plus profondes », a affirmé le Belge, sans citer l’Allemagne et son plan à 200 milliards d’euros.

   Ces pays de l’UE se livrent à une « course aux subsides », selon les termes d’un diplomate, pour protéger leur industrie, alors que la récession se profile cet hiver en raison de l’inflation poussée par la flambée des prix de l’énergie, et qu’un nombre important d’entreprises grandes consommatrices d’énergie « envisagent maintenant de délocaliser leurs activités en dehors de l’UE », selon la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.

   « Certains pays peuvent penser qu’ils ont des poches profondes, mais dans quelques mois, nous arriverons tous au bout des réserves« , selon M. De Croo, qui appelle à ne pas mettre en danger le marché unique. « Pendant la période covid, on a compris qu’on était plus forts unis à 27, il est temps de le faire aussi sur l’énergie, avec une intervention sur le marché du gaz. Les ministres de l’Énergie ont déjà fait du bon boulot, on doit leur donner un dernier coup de pouce pour aboutir », a exhorté le Belge, en vue d’une nouvelle réunion de ces ministres lundi.

Ensemble face aux USA

   Alexander De Croo appelle aussi à une réponse coordonnée face à la concurrence des États-Unis qui, via leur plan de lutte contre l’inflation (IRA) à 370 milliards de dollars (aides exceptionnelles réservées aux firmes implantées outre-Atlantique dans le cadre de la lutte contre le changement climatique), risquent de saper davantage la compétitivité européenne. « Aujourd’hui, les pays européens se volent mutuellement leurs cerises et les États-Unis nous prennent tout dans le dos », a-t-il résumé.

   Ursula von der Leyen a proposé à court terme un assouplissement de l’encadrement des aides d’État aux entreprises pour les inciter à continuer d’investir en Europe et un renforcement du plan européen RePowerEU pour développer les énergies renouvelables et s’affranchir des hydrocarbures russes. Elle plaide également depuis septembre pour un « fonds de souveraineté » européen pour développer une politique industrielle commune et investir davantage dans des projets de recherche et d’innovation à l’échelle du continent: hydrogène, semi-conducteurs, informatique quantique, intelligence artificielle, etc.

   Interrogé sur ce point, Alexander De Croo ne l’a pas exclu. « C’est vrai que pendant la crise du coronavirus, et plus récemment avec RePowerEU, les moyens communs ont été très efficaces« . De son côté, le président français Emmanuel Macron a appelé l’UE à aller « beaucoup plus vite et plus fort » dans sa réponse au plan américain. Il a demandé une réponse pour le début de l’année 2023. Les financements européens à mobiliser pourraient prendre la forme de garanties, de prêts ou de subventions, a-t-il ajouté, mais « on ne doit pas laisser l’Europe se fragmenter d’un point de vue financier ».

   Le président du Conseil, Charles Michel, souhaite que le sommet permette de « donner un mandat clair à la Commission pour venir dès le début de l’an prochain avec une batterie de mesures de soutien économique ». « Il faut éviter une fragmentation du marché unique, on sait que certains États membres ont plus de marge de manœuvre budgétaire ». Il veut aussi progresser sur les questions de prix de l’énergie pour finaliser les efforts « dans les prochains jours ».

Contenu partenaire