Comment l’Ukraine peut-elle reprendre le dessus sur la Russie ? Trois éléments auxquels on ne pense pas spécialement
Comment l’Ukraine peut-elle inverser la tendance après l’échec de sa contre-offensive ? Pour le lieutenant-colonel Tom Simoens (ERM), l’approche militaire doit devenir indirecte, et être mêlée à une aide occidentale… technologique.
Tom Simoens, d’où peut venir le déblocage dans la guerre Russie-Ukraine ?
Il s’agirait que l’Ukraine ou la Russie développe ses tactiques, s’entraine et se batte avec plus d’efficacité que l’autre. A cet égard, on peut être déçu par le manque d’engagement à long terme de l’Occident. Les Ukrainiens auraient grandement besoin de formations d’Etat major, de brigades, etc. Mais cela prend des mois.
L’épuisement d’un des belligérants, le manque d’hommes ou de munitions peuvent aussi être déterminants en vue d’une rupture. C’est ce qui est arrivé à l’Allemagne à la fin de la première guerre mondiale. Ces risques pendent au nez des Ukrainiens.
L’aide occidentale doit-elle changer d’approche, voire de nature ?
Zaloujny (le commandant en chef de l’armée ukrainienne) explique que pour lui, la solution est la technologie. C’est une proposition assez claire vis-à-vis de l’Occident. Accumuler les dons de blindés n’est pas la solution au problème.
La nouvelle aide occidentale devrait plutôt être technologique.
Tom Simoens
Les chars américains Abrams, qui sont en Ukraine, n’ont pas encore été aperçus dans le combat. Donc, 30 ou 50 autres chars américains supplémentaires ne changeront pas le cours de la guerre. La nouvelle aide occidentale devrait plutôt être technologique (1). Par exemple, via des entreprises qui offrent leurs connaissances. C’est un effort qui ne coûterait pas spécialement cher.
Que va/peut faire l’Ukraine cet hiver sur le terrain ?
On ne s’attend pas à de grandes opérations terrestres ukrainiennes, mais plutôt à une nouvelle phase russe. Dans une guerre de position, l’initiative passe régulièrement d’un camp à l’autre. A Avdiivka et à Vouhledar, les Russes attaquent déjà massivement. Les Ukrainiens craignent une reprise de la guerre stratégique. Comme la destruction du réseau électrique par l’aviation russe.
Pour l’instant, c’est relativement calme au niveau des attaques de missiles et de drones, car les deux camps se créent un stock pour l’hiver. Il faudra attendre une chute des températures pour voir une reprise de cette activité.
L’Ukraine a tout intérêt à arrêter son opération offensive à grande envergure. Elle doit davantage se concentrer sur sa défense et son approche indirecte.
Tom Simoens
L’Ukraine a tout intérêt à arrêter son opération offensive à grande envergure. Elle peut toujours mener des contre-attaques locales, mais elle doit davantage se concentrer sur sa défense et son approche indirecte (2) : attaques de missiles (sur la Crimée), des drones (maritimes ou non), ou des raids des forces spéciales sur des positions précises.
Les opérations menées en mer Noire et en Crimée peuvent-elles inspirer l’Ukraine pour changer son approche face à la Russie ?
L’opération en mer Noire est une grande réussite car cela permet à l’Ukraine de continuer l’exportation de blé (un revenu majeur pour le pays). D’autre part, cela bouscule la présence militaire de la Russie en Crimée. Le tendon d’Achille des Russes, c’est la Crimée (3).
Le tendon d’Achille des Russes, c’est la Crimée.
Tom Simoens
D’ailleurs, ils se posent la question de savoir si défendre le long pont qui joint la péninsule au continent a encore une utilité. L’infrastructure est si abîmée qu’ils ne savent plus l’utiliser pour le transport ferroviaire, mais elle requiert des gros moyens pour la défendre. C’est en soi une victoire ukrainienne. Cette campagne ukrainienne était inattendue, mais au final, elle est plus satisfaisante que les objectifs de base. Cependant, ce n’est pas une raison suffisante pour dire que l’offensive ukrainienne a été un succès.
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