Turquie: la quête d’humanité de Pinar Selek
La Cour suprême de Turquie a rendu le 21 juin un arrêt d’annulation de l’acquittement de la sociologue Pinar Selek. Inquiétée auparavant par les autorités turques pour ses travaux sur les Kurdes, elle avait été arrêtée en 1998 et condamnée pour son implication présumée dans un «attentat» sur un marché d’Istanbul qui s’est avéré être une explosion due à une fuite de gaz. Elle avait été acquittée de cette prévention en 2006, 2008, 2011 et 2014. L’arrêt de la Cour suprême rend exécutoire sa condamnation à la prison à perpétuité.
Le dernier livre de Pinar Selek, exilée depuis 2011 en France, illustre son combat pour la défense des groupes opprimés et des «marginaux». Azucena ou Les fourmis zinzines (1) raconte avec beaucoup d’humanité les parcours de vie cabossés, sous le ciel bleu de Nice, d’Alex le prince des poubelles et distributeur de poèmes, de Gouel le musicien et passeur de réfugiés, ou d’Azucena-Suzanne, accompagnatrice de toutous vers Paris pour un mystérieux mouvement de libération des chiens. Les trois compères se rejoignent dans un réseau de distribution par une coopérative agricole de graines de fruits et légumes pour faire pièce à la suprématie commerciale des grandes surfaces. Le combat collectif et la rébellion intime se conjuguent ici pour forger un récit picaresque.
Surtout, Azucena ou Les fourmis zinzines est une ode à la liberté que résume ainsi l’enseignante-chercheuse de l’université Côte d’Azur: «Au cours de cette courte vie, les gens peuvent apprendre à se tourner vers ce qui existe, à se lier d’amitié avec un oiseau libre plutôt que de croître et prospérer. Apprendre à aimer sans jugement, à s’alléger. Peut-être que la fête grandissante prendra tout le monde à son bord. Qui sait.» Le message sera-t-il entendu en Turquie?
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