Tueurs de masse: un terrible phénomène qui ne se limite pas aux Etats-Unis (analyse)
Le massacre de l’école primaire d’Uvalde, dans le Texas, n’est malheureusement pas une première. Les tueries de masse sont légion aux Etats-Unis, mais aussi ailleurs, notamment en Chine et en Russie. Très souvent, les tueurs veulent se venger contre la société.
Lorsqu’une nouvelle tuerie en milieu scolaire défraye la chronique, aux Etats-Unis, on repense inévitablement à l’horreur du lycée Columbine (Colorado), le 20 avril 1999, où deux élèves avaient tué 20 de leurs congénères avant de se suicider. Ce n’était pourtant pas une première. Les tueries de masse frappent les écoles depuis fort longtemps aux Etats-Unis. En 1927 déjà, en faisant exploser une bombe, un homme assassinait 45 personnes dont 38 enfants âgés de six à douze ans, dans une école de Bath (Michigan), dont il était le gardien.
Il y a eu des attaques (parfois avec seulement des blessés) dans les années 1980, 1970, 1960… Mais, depuis Columbine, le phénomène s’est accru de manière manifeste. Avec des tueurs qui, par la suite, ont visiblement voulu imiter les deux lycéens-assassins de 1999 qui avaient consigné leur préparation minutieuse dans des carnets et laissé un message vidéo posthume. Notamment celui de l’université de Virginia Tech qui, en 2007, avait soigneusement préparé son coup et s’était mis en scène avec ses armes dans une vidéo avant de tuer 33 personnes sur le campus. La pire tuerie depuis celle de Bath reste celle de l’école primaire Sandy Hook (Connecticut) qui, en 2012, avait fait 28 morts, dont vingt enfants.
Même si les Etats-Unis en comptent un nombre impressionnant, les tueries de masse ne sont cependant pas leur apanage. En Chine, on recense aussi de nombreuses tueries, surtout dans des crèches. Les attaques ont, pour la plupart, lieu avec une arme blanche, l’accès aux armes à feu étant interdit aux citoyens ordinaires. L’année 2010 avait été particulièrement meurtrière, avec des tueries dans plusieurs crèches et un bilan de plusieurs dizaines de morts. En Russie également, on dénombre plusieurs tueries sanglantes, ces dernières années : dans une école maternelle de la région d’Oulianovsk le 26 avril dernier (3 morts dont deux enfants), à l’université d’Etat de Perm en septembre 2021 (six morts) ou encore dans l’école de Kazan en mai 2021 (neuf morts). Au Brésil aussi, il y a un an, un tueur de 18 ans a attaqué une crèche, armé d’un couteau, faisant 5 morts dont trois enfants.
En Belgique, le nom de Kim De Gelder est resté tristement célèbre dans l’histoire criminelle du pays. Le 23 janvier 2009, le jeune anversois a tué 4 personnes dont deux bébés et une puéricultrice d’une crèche de Termonde. Il était équipé d’un gilet pare-balles et possédait l’adresse d’autres crèches dans son sac à dos, ce qui laisse supposer qu’il préparait un massacre bien plus grand encore. Condamné à perpétuité, il a obtenu en janvier dernier, par son avocat, d’être interné, et non plus incarcéré, au centre de psychiatrie légale d’Anvers.
Les massacres en milieu scolaire ne sont pas uniquement le fait de jeunes tueurs. Certains sont commis par des adultes. Les écoles, maternelles ou les crèches sont pris pour cible car ce sont des lieux faciles d’accès et surtout, parce qu’en s’attaquant à des enfants ou des étudiants, les tueurs veulent frapper les esprits au plus fort. Ce qui touche à l’enfance a une portée émotionnelle collective plus puissante. On constate que ces tueurs de masse sont très souvent des marginaux, solitaires, voire suicidaires qui veulent en finir avec la vie ou marquer le coup en faisant un maximum de jeunes victimes. Il s’agit, en quelque sorte, d’une vengeance contre la société qui les a rejetés. Dans 75 % des cas, ils retournent leur arme contre eux ou se laissent abattre par la police. Depuis la tuerie de Columbine, les écoles américaines ont instauré de nouvelles mesures de sécurité, comme la fouille des sacs à dos, des gardes de sécurité à l’entrée, des détecteurs de métaux… Ce drame avait aussi, comme à chaque tuerie par la suite, relancé la polémique sur le contrôle des armes à feu aux Etats-Unis. En vain. Le droit de posséder une arme reste garanti par le deuxième amendement de la Constitution US. Les règles varient d’un Etat à l’autre : dans une douzaine d’entre eux, un permis n’est pas nécessaire pour se promener avec une arme à feu sous le manteau. Dans les autres, un permis est exigé mais délivré de manière plus ou moins stricte, parfois même très facilement. Ce laxisme vis-à-vis des armes à feu explique que les tueries sont bien plus meurtrières sur le sol américain qu’ailleurs.
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