Pourquoi l’Islande ne veut plus faire partie de l’Union européenne
L’Islande, candidate à l’adhésion depuis 2009, a fait savoir jeudi qu’elle ne souhaitait plus être membre de l’UE. Voici les raisons qui expliquent ce choix.
« Le gouvernement considère que l’Islande n’est plus un pays candidat et demande à l’UE d’agir en conformité avec cette position « . C’est ainsi que l’Islande a annoncé jeudi 12 mars le retrait de sa candidature à l’adhésion à l’Union européenne. Dans un courrier adressé à la Lettonie (qui préside actuellement le Conseil européen) et à la Commission européenne, elle indique qu’elle ne fera donc pas partie de l’Union européenne et n’utilisera pas non plus l’euro, rapporte le Courrier International.
Ce dimanche, plus de 7000 Islandais ont manifesté à Reykjavik pour protester contre le retrait de leur pays. Il s’agit d’une mobilisation très élevée, le plus grand rassemblement depuis 2008-2009 lorsque la population avait réclamé la démission du gouvernement, précise Belga. La majorité des citoyens restent cependant opposés à l’adhésion européenne.
Du côté de la Commission européenne, on estime que c’est la « prérogative de l’Islande de prendre une décision libre et souveraine sur la manière de poursuivre sa relation avec l’UE« , peut-on lire sur le site de la RTBF. La porte-parole de la Commission Maja Kocijancic a ajouté que « l’Islande reste un partenaire important pour l’UE », puisqu’elle fait partie de l’Espace économique européen et de l’Espace de libre circulation Schengen et que « la porte de l’UE reste naturellement ouverte à l’Islande « .
Des négociations gelées par les eurosceptiques depuis 2013
Le retrait de la candidature de l’Islande n’est cependant pas une surprise, assure Le Monde. En effet, depuis 2013, l’Islande s’est dotée d’un nouveau gouvernement de centre droit, mené par le Parti du Progrès, très anti-européen. Le retrait de la procédure d’adhésion faisait partie de leur programme électoral. Ils ont donc promis, dès leur arrivée au pouvoir, de mettre fin à la procédure d’adhésion que l’ancienne coalition de gauche avait lancée en 2009, provoquant le gel des négociations entre l’Islande et l’UE.
C’est un Non à l’UE sans consultation du peuple, observe Francetvinfo. « Le gouvernement n’a pas l’intention d’organiser un référendum« , a précisé le ministère des Affaires étrangères. Il évoque également un possible retour en arrière : « Si le processus doit être repris à l’avenir, le gouvernement actuel considère important de ne pas progresser sans en référer préalablement à la nation. «
Les démarches d’adhésion avaient pourtant bien commencé en 2009. En effet, celles-ci avaient été beaucoup plus rapides à démarrer que celles d’autres candidats, comme la Bosnie, la Turquie ou la Serbie. Les véritables négociations ont commencé en 2010 et l’Islande était en passe de devenir le 29e membre de l’UE. Son dossier apparaissait effectivement comme plus simple et plus rapide à traiter que ceux des autres candidats, car l’Islande avait déjà intégré environ 70 % de la législation européenne.
L’Islande n’a plus besoin de l’Europe
À l’époque de la candidature, les dirigeants islandais et l’opinion publique étaient plutôt favorables à l’entrée dans l’UE, car, crise financière et bancaire oblige, elle représentait une bouée de sauvetage pour le pays. Notamment grâce à une entrée dans la zone euro, qui aurait permis de remplacer la couronne islandaise, qui avait perdu près de 50 % de sa valeur au plus fort de la crise.
En 2010, lors d’un référendum sur un projet d’accord financier avec le Royaume-Uni et les Pays-Bas pour le règlement de la dette d’Icesave, banque qui a fait faillite en 2008 et a notamment touché bon nombre de Britanniques et de Néerlandais, les Islandais envoyaient déjà un signal en disant « non ». C’est là que la procédure d’adhésion a commencé à être remise en cause.
De plus, les difficultés financières de certains pays européens, notamment la Grèce, n’ont pas fait pencher la balance dans le bon sens. La perspective d’un référendum au Royaume-Uni sur une sortie de l’UE a fait réfléchir les Islandais et renforcé les eurosceptiques du pays.
L’Islande est désormais revenue dans une situation économique plutôt favorable. L’institut statistique national a annoncé que l’activité économique de l’Islande avait dépassé en 2014 son niveau d’avant la crise financière de 2008, rapporte L’Express. Tourisme en plein essor, à peine 3 % de chômage, des dettes sur les biens immobiliers des particuliers en partie effacées : l’Islande se porte mieux et estime ne pas avoir besoin de l’Europe. C’est en tout cas l’avis du gouvernement dont le ministre des Affaires étrangères assure sur son site internet que « les intérêts de l’Islande sont mieux servis en dehors de l’Union européenne« .
Rififi autour des quotas de pêche
Un autre désaccord UE-Islande influence l’opinion publique : les quotas de pêche. En effet, la « guerre du maquereau » fait rage. L’Islande fait partie de l’Association européenne de libre-échange et de l’Espace économique européen, ce qui lui permet d’exporter sa pêche sans barrière tarifaire. Mais en 2010, l’Islande a décidé de relever ses quotas de pêche contre l’avis de la Commission européenne. L’Union a alors fait pression sur le pays, précipitant le retrait de sa candidature.
Il était hors de question pour l’Islande de soumettre sa pêche, le pilier de son économie, aux quotas de Bruxelles. Alors qu’elle pêchait environ 2 000 tonnes de maquereau par an, l’Islande a relevé son quota à 130 000 tonnes en 2010, relate Le Monde. L’Europe s’oppose à l’Islande sur l’imposition de quotas. Cette opposition n’a jamais été résolue au fil des nombreuses réunions entre les deux instances. Ce conflit, important dans l’opinion publique islandaise qui tient à sa pêche, a fortement influencé la montée des partis eurosceptiques aux dernières élections de 2013.
(O.L.)
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