Nancy et Brian Allen à Nowra (Nouvelle-Galle-du-Sud). © Reuters

Pourquoi les incendies en Australie sont-ils si graves ?

Marie Gathon Journaliste Levif.be

Les feux de brousse font partie du calendrier australien. Ils sont souvent déclenchés par des causes naturelles. Mais les experts affirment néanmoins que le changement climatique est essentiel pour comprendre la férocité des incendies de cette année.

Depuis septembre, les incendies en Australie ont détruit une superficie équivalente à l’île d’Irlande, soit huit millionsd’hectares, alors qu’une nouvelle canicule menace. Vingt-quatre personnes ont péri, et plus de 1.500 maisons sont parties en fumée. Deux personnes sont, en outre, portées disparues en Nouvelle-Galles-du-Sud.

Des milliers de résidents et de vacanciers du sud-est de l’Australie ont été obligés d’évacuer vers les côtes alors que des feux de brousse encerclaient les communautés et rasaient des dizaines de bâtiments. Des navires et des avions militaires ont été déployés pour livrer de l’eau, de la nourriture et du carburant aux villes isolées par les incendies.

Les conditions climatiques chaudes et sèches de ces derniers mois ont alimenté les incendies, mais elles ne sont pas rares en Australie.

Quelle est la cause des incendies ?

Des températures record, une sécheresse prolongée et des vents forts ont convergé pour créer des conditions d’incendie désastreuses, rappelle le New York Times.

Une grave vague de chaleur s’est abattue sur la majeure partie du pays à la mi-décembre. L’Australie a connu sa journée la plus chaude jamais enregistrée, avec des températures moyennes maximales de 41,9 degrés Celsius.

La chaleur extrême a suivi le printemps le plus sec jamais enregistré. La plupart des régions de la Nouvelle-Galles-du-Sud et du Queensland connaissent un déficit pluviométrique depuis le début de 2017. La sécheresse a frappé les zones agricoles les plus productives du pays, dont certaines sont maintenant en feu.

Les habitants de Jindabyne tentent de se rafraichir.
Les habitants de Jindabyne tentent de se rafraichir.© Belga

Les feux de brousse font partie du calendrier australien. Ils sont souvent déclenchés par des causes naturelles telles que la foudre et ne peuvent être imputés aux seuls changements climatiques ou à l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre. Mais les experts affirment néanmoins que le changement climatique est essentiel pour comprendre la férocité des incendies de cette année : des conditions plus chaudes et plus sèches rendent la saison des feux plus longue et beaucoup plus dangereuse.

Le climat de l’Australie est en train de changer, c’est certain, affirme The Telegraph. Selon le Bureau de la météorologie du pays, les températures ont déjà augmenté de plus d’un degré Celsius depuis 1920 – la plus grande partie de cette augmentation ayant eu lieu depuis 1950.

Les feux de forêt ont émis plus de 6.000 mégatonnes de CO2 en 2019

Entre le 1er janvier et le 30 novembre 2019, environ 6.735 millions de tonnes de CO2 ont été relâchées dans l’atmosphère à la suite des incendies de forêt, selon le service de surveillance de l’atmosphère (CAMS) du programme européen Copernicus. D’après les scientifiques, 2019 a présenté une activité exceptionnelle, tant en termes d’intensité des feux que d’émissions.

Au total, ce sont 6.735 mégatonnes de CO2 qui ont été émises lors de ces incendies. Les feux de forêt ont donc provoqué plus d’émissions que les États-Unis (5.100 mégatonnes) et sont en hausse par rapport à 2018 pour laquelle les estimations sont restées sous la barre des 6.000 mégatonnes. Néanmoins, la tendance reste à la baisse depuis 2003, époque à laquelle les feux relâchaient plus de 8.000 millions de tonnes de CO2 dans l’air.

Les données du CAMS montrent aussi que les feux en Australie, qui ont démarré en septembre et se sont intensifiés en novembre « n’avaient rien de comparable avec les 16 précédentes années. »

Le changement climatique est-il à blâmer ?

Le début dévastateur de la saison des feux a confirmé ce que les scientifiques avaient prédit : les feux de brousse en Australie deviendront plus fréquents et plus intenses à mesure que les changements climatiques s’aggraveront. Peu de pays développés, voire aucun, ne sont aussi vulnérables aux changements climatiques que l’Australie, selon les rapports scientifiques.

L’île est normalement chaude et sèche en été, mais les changements climatiques, qui entraînent des périodes de chaleur extrême plus longues et plus fréquentes, aggravent ces conditions et rendent la végétation plus sèche et plus susceptible de brûler.

Le changement de climat a entraîné une augmentation des températures dans les océans indien et austral, ce qui a eu pour effet de rendre le temps plus sec et plus chaud cet été en Australie.

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Les journées les plus dangereuses pour les incendies se produisent lorsque de l’air chaud et sec souffle du centre désertique du continent vers les côtes peuplées. Un front météorologique – où des masses d’air de différentes densités se rencontrent – peut faire changer rapidement la direction du vent. Cela signifie que les grands incendies se propagent dans de multiples directions.

Les feux de brousse peuvent être si importants et si chauds qu’ils génèrent leurs propres systèmes météorologiques dangereux et imprévisibles.

Un microphénomène météorologique qui aggrave la situation

Les grandes catastrophes naturelles peuvent créer leurs propres systèmes météorologiques. Les feux de brousse australiens sont maintenant si intenses qu’ils commencent à produire des orages, affirme Quartz

Le 3 janvier, le bureau météorologique australien a émis un avertissement d’orage violent pour l’est du Gippsland dans le Victoria. Les conditions orageuses se produisent également en Nouvelle-Galles-du-Sud, un autre État où les incendies sont intenses.

Les météorologues ont expliqué que la formation de ces orages est générée par les feux de brousse. En résumé, lorsque l’air chaud (les fumées des feux de brousse) s’élève et rencontre l’air froid de l’atmosphère, ceux-ci se transforment en nuages de pyrocumulus, aussi appelés « nuages de feu ». Ces nuages rares et dangereux se forment et se déplacent rapidement, créant des rafales de vent et des orages.

1.0When bushfires make their own weather, they generate ‘pyrocumulonimbus’ clouds and storms. These can cause dangerous and unpredictable changes in fire behaviour, making the fire more difficult and hazardous to fight.

This is how they form:

1. A plume of hot, turbulent air and smoke rises.
2. Turbulence mixes cooler air into the plume, causing it to broaden and cool as it rises.
3. When the plume rises high enough, low atmospheric pressure causes its air to cool and cloud to form.
4. In an unstable atmosphere a thunderstorm can develop: pyrocumulonimbus cloud
5. Rain in the cloud evaporates and cools when it comes into contact with dry air, producing a downburst.
6. Lightning may be produced and can ignite new fires.

#bureauofmeteorology #pyrocumulonimbus #severeweather #vicfires #nswfires #ausfires #australianbushfires #instaweather #instascience #stormsciencebureauofmeteorologyhttps://www.instagram.com/bureauofmeteorology6281217982212361838694353225_628121798Instagramhttps://www.instagram.comrich658

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When bushfires make their own weather, they generate ‘pyrocumulonimbus’ clouds and storms. These can cause dangerous and unpredictable changes in fire behaviour, making the fire more difficult and hazardous to fight. This is how they form: 1. A plume of hot, turbulent air and smoke rises. 2. Turbulence mixes cooler air into the plume, causing it to broaden and cool as it rises. 3. When the plume rises high enough, low atmospheric pressure causes its air to cool and cloud to form. 4. In an unstable atmosphere a thunderstorm can develop: pyrocumulonimbus cloud 5. Rain in the cloud evaporates and cools when it comes into contact with dry air, producing a downburst. 6. Lightning may be produced and can ignite new fires. #bureauofmeteorology #pyrocumulonimbus #severeweather #vicfires #nswfires #ausfires #australianbushfires #instaweather #instascience #stormscience

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Ces orages peuvent entraîner deux événements atmosphériques dangereux : les rafales descendantes et la foudre.

Dans le cas d’une rafale descendante, le vent de refroidissement peut se déplacer à 270 km/h. Dans le rare cas où il y aurait des vapeurs d’eau dans l’air, cela pourrait causer une « bombe de pluie ». Et si la foudre se produit, de nouveaux feux pourraient se propager rapidement à d’autres régions.

Les nuages de pyrocumulus dans le sud-est de l’Australie sont visibles sur des vidéos capturées en temps réel par les satellites.

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Avec la hausse des températures, les nuages pyrocumulus pourraient devenir plus fréquents. Un système météorologique similaire provoqué par des incendies a eu lieu pendant la saison des feux de forêt en Californie en 2018. Le terrain vallonné de l’État a créé des conditions parfaites non seulement pour les orages, mais aussi pour les tornades de feu. Un nombre sans précédent d’incendies de forêt dans le nord de la Russie et dans le cercle polaire arctique à l’été 2019, tel que capturé par les images satellites, a contribué à une augmentation de foudroiements au pôle Nord.

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