Pourquoi la Suisse ne connaît pas les tueries de masse, malgré la présence record d’armes à feu
Un article du Monde nous apprend que seulement 18% des homicides en Suisse sont commis par des armes à feu, alors que près d’un citoyen sur deux en posséderait une. Le gouvernement voudrait pourtant modifier la loi pour une meilleure traçabilité des armes et un meilleur contrôle.
En Suisse, le nombre de fusils et de pistolets est estimé à 3,4 millions, soit à peu près une arme à feu pour deux habitants, plaçant le pays au troisième rang mondial, derrière les USA et le Yémen. Certains spécialistes estiment souvent que le nombre d’armes à feu en circulation dans un pays a une influence directe sur le taux d’homicide, tueries de masse incluses. Pourtant, malgré ce nombre important d’armes à feu, la Suisse échappe aux phénomènes de massacre de masse. On apprend qu’à peine 18% des homicides dans le pays l’ont été par arme à feu, selon des chiffres de l’Office fédéral de la statistique.
Pourquoi tant d’armes ?
L’explication reste simple. Les Suisses ne sont pas plus fascinés que les autres par les armes à feu, mais si près d’un Helvète sur deux en possède une, c’est parce qu’il peut être appelé à défendre son pays. La Suisse ne compte, en effet, qu’une armée de milice. Le criminologue Martin Killas, interrogé par le quotidien romand Le Temps explique que « l’écrasante majorité des personnes en Suisse qui possèdent des armes à feu sont des militaires actifs ou sont rattachées à l’armée, ou alors sont des tireurs sportifs ou des chasseurs. S’armer pour protéger sa famille est quelque chose de presque inexistant. »
La majorité des Suisses gardent leurs armes chez eux, alors que certains choisissent de les placer dans un arsenal. Interrogé par Le Monde, un employé d’un stand de tir estime que les personnes qui possèdent des armes sont des gens responsabilisés. Pour lui, « les personnes violentes sont rares ».
L’article explique que la bonne santé économique suisse exclut par conséquent les situations d’extrême pauvreté qu’on peut retrouver dans certaines régions des Etats-Unis, où la prolifération de la violence peut se faire plus facilement.
La loi suisse sur les armes à feu est une des plus libérales en la matière
Obtenir une arme à feu en Suisse n’est pas difficile. Un extrait de casier judiciaire vierge permet d’obtenir un permis d’acquisition d’arme. Il suffit ensuite de se rendre chez l’armurier pour se procurer l’arme en question, ainsi que les munitions, bien que la loi interdise à chacun de circuler avec son acquisition. Celle-ci peut tout de même être conservée au domicile et être utilisée dans un stand de tir. Les armes automatiques et des armes silencieuses peuvent également être acquises, mais avec un permis exceptionnel. Le travail de la police est compliqué, parce que les armes ne sont pas toutes enregistrées, et il n’existe pas de registre national.
Mais en Suisse, les personnes de nationalité serbe, kosovare, algérienne ou encore sri-lankaise se voient refuser catégoriquement leurs demandes d’acquisition. Ce qui serait vu chez nous comme une discrimination est pour l’employé du stand de tir « une question de bon sens qui passe avant le politiquement correct. »
Contrairement aux USA et son fameux second amendement, le droit de porter une arme ne figure pas à proprement parler dans la Constitution, bien que les passionnés de tir et les chasseurs appuient pour son entrée dans la loi. Le lobby des armes suisse, Pro Tell, « s’oppose à toutes les restrictions de la possession d’armes par des citoyennes et citoyens responsables. »
Mais le débat sur la question fait actuellement rage. Sous la pression des autorités européennes, qui renforcent leur législation sur les armes à feu, le gouvernement suisse prépare une modification de loi, bien que les changements proposés soient mineurs : se procurer des armes automatiques sera toujours permis, et le registre national ne sera toujours pas créé. Il faudra néanmoins une autorisation spéciale pour les personnes voulant acquérir une arme semi-automatique. De plus, les armuriers seront soumis à une augmentation des déclarations pour améliorer la traçabilité des armes.
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