Olaf Scholz, le chancelier qui se croyait Helmut Schmidt (chronique)
Face à la guerre menée par la Russie, les chanceliers allemands Olaf Scholz et Helmut Schmidt sont parfois comparés. Pourtant, il n’y a aucun point commun entre l’attitude des deux hommes. Face à la menace, l’un a agi, l’autre pas…
Rien n’est plus comique, et tragique, que de voir les communicants du chancelier allemand Olaf Scholz le comparer avec régularité à Helmut Schmidt pendant la crise des euromissiles.
Pour mémoire, dans les années 1970, l’Union soviétique installa des missiles de portée moyenne en Europe de l’Est. Ceux-ci n’avaient pas d’équivalent en Europe occidentale. Helmut Schmidt, à l’esprit aiguisé, réalisa que ce déséquilibre plaçait l’Europe sous un chantage permanent. Il prononça en 1977, à Londres, un célèbre discours qui appelait l’Otan à installer des fusées similaires. Ce discours eut un impact phénoménal. Il amena l’Otan à prendre, en 1979, une double décision: installer des euromissiles tout en discutant, pendant leur installation, afin d’obtenir un retrait des missiles soviétiques.
Fidèle à sa schizomanie depuis 1945, une partie de l’opinion européenne commença à se dresser contre la décision demandée par ses gouvernements, surtout dans les partis de gauche et spécialement les socialistes allemands (SPD). Helmut Schmidt continua de défendre ses convictions (avec l’appui marqué du président français François Mitterrand). Il se fit tailler en pièces par son propre parti. Idem pour le SPD aux élections. Il fut renvoyé dans l’opposition pour seize ans. L’ ère d’Helmut Kohl commençait. Dix ans plus tard, le communisme s’effondrait en Europe, la décision sur les euromissiles ayant joué un rôle majeur.
Un alibi pour ne pas agir
Hormis l’intimidation actuelle de la Russie, il n’existe aucun point commun entre les deux périodes. Une intimidation bien plus violente maintenant. Elle vise, comme reconnu par Poutine, à reconstituer l’empire de l’URSS en démolissant les frontières. Il n’existe aussi aucun point commun entre l’attitude de Helmut Schmidt et celle d’Olaf Scholz. L’un a agi, l’autre pas. L’un a défendu des idées difficiles face à son électorat, l’autre pas. L’un a contribué à la compréhension de la menace, l’autre pas. L’un a renforcé la solidarité occidentale, l’autre pas, bien au contraire.
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La référence à la double décision cache une différence fondamentale. Pour Schmidt, négocier venait après avoir agi pour rétablir l’équilibre. Pour Scholz, négocier offre un alibi pour ne pas agir. Partant de la célèbre aide des 5 000 casques allemands à l’Ukraine au début de la guerre, il a tout fait en dernière minute, de mauvaise grâce, en excluant des aides ultérieures, et en rappelant sa volonté de ne pas choquer la Russie.
Scholz joue ainsi un rôle néfaste depuis un an. Alors que l’Europe affronte sa plus grave menace depuis 1945, le chancelier allemand crée la confusion dans l’opinion publique allemande, de multiples fissures au sein de l’Union européenne et des ralentissements répétés de l’Otan dans ses décisions. La figure politique qu’il évoque est bien sûr Neville Chamberlain, le Premier ministre britannique en 1940. Même volonté d’éviter la guerre à n’importe quel prix (souci honorable, mais totalement inadapté à des dirigeants psychopathes comme Hitler et Poutine). Même incompréhension de la réalité internationale. Et même incapacité à gérer la chose militaire.
En réalité, Olaf Scholz est à Helmut Schmidt ce que Boris Johnson est à Winston Churchill. L’un et l’autre se glorifient en se roulant dans le manteau de leurs brillants prédécesseurs, mais ils détruisent précisément ce qui faisait leur brillance. Bienvenue dans «l’Europe géopolitique».
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