Attaque iranienne sur Israël: à quoi pourrait ressembler la riposte américaine
Mardi, l’Iran a tiré près de 180 missiles balistiques en direction d’Israël. Si «un grand nombre» a été intercepté, le risque d’escalade entre les deux pays semble plus fort que jamais. Comment réagiront les Etats-Unis, alliés de toujours de l’Etat hébreu?
La tension est encore montée d’un cran au Moyen-Orient ce mardi 1er octobre. 180 missiles ont été lancés par l’Iran en direction du territoire israélien. Les Etats-Unis, plus proches alliés d’Israël, ont annoncé vouloir «coordonner» une réponse avec l’Etat hébreu.
Pour Didier Leroy, chercheur à l’ULB et à l’École Royale Militaire (ERM), le plus probable à ce stade reste une riposte israélienne. «Les Etats-Unis seront probablement dans une posture plus défensive que les Israéliens. Les Américains continueront à aider Israël dans l’interception des missiles, mais devront aussi protéger leurs bases en Syrie et en Irak, menacées par la Résistance islamique en Irak», explique le spécialiste du Moyen-Orient.
Selon Alain De Neve, chercheur à l’Institut Royal Supérieur de la Défense, les Etats-Unis ne se lanceront pas dans des représailles frontales. «L’alliance entre Israël et les USA est solide, mais une attaque sur le territoire israélien n’engage pas une réponse automatique des Américains, comme dans le cadre de l’OTAN. Je pense qu’il y aura une gradation dans la réponse des Etats-Unis».
Les élections, frein à l’intervention américaine
«Vu la proximité des élections américaines, il sera très compliqué pour Washington de mobiliser des forces, notamment aéronavales. Un conflit armé durant une campagne électorale, c’est toujours gênant. Surtout si la situation n’évolue pas dans le sens voulu, et qu’il y a une escalade», analyse André Dumoulin, docteur en sciences politiques et spécialiste des politiques de défense. «Les Américains vont vraisemblablement plutôt aider les Israéliens au niveau du renseignement, en leur indiquant quelles cibles frapper, au moyen des armes qu’ils leur ont délivrées», poursuit le chargé de cours honoraire à l’ULiège.
«Un conflit armé durant une campagne électorale, c’est toujours gênant»
André Dumoulin
Un constat sur l’impact du scrutin que partage Alain De Neve. «La période électorale pourrait provoquer une paralysie dans l’intervention américaine. La guerre n’est jamais très vendeuse électoralement», explique le chercheur.
Pour Didier Leroy, l’élection ne devrait en tout cas pas remettre en cause le soutien américain envers l’Etat hébreu. «Malgré la pression pro-palestinienne d’une partie des démocrates, il existe un certain consensus transpartisan en faveur d’Israël».
Le programme nucléaire iranien, plus avancé que prévu?
Alain De Neve se questionne quant à la motivation iranienne de prendre pour cible Israël, qui pourrait bien riposter de manière massive.
«À moins que l’Iran n’ait fait des avancées plus rapides que prévu dans son programme nucléaire militaire, lui permettant de se rapprocher d’un test nucléaire, qui ferait de la République islamique la dixième puissance nucléaire au monde. Sans cette hypothèse, il est difficile, voire impossible, de comprendre la rationalité d’une telle offensive contre Israël. Certes, Téhéran devait réagir face aux pertes subies par ses alliés, notamment le Hezbollah et d’autres factions libanaises. Mais elle aurait pu calibrer sa réponse afin de limiter l’ampleur des représailles israéliennes», écrit le chercheur sur le réseau LinkedIn.
Pour André Dumoulin, cette attaque iranienne est, d’une certaine façon, une aubaine pour les Israéliens. «Téhéran leur a offert un beau cadeau. En provoquant cette escalade, l’Iran permet à Israël de justifier le ciblage du programme nucléaire iranien», observe-t-il.
Que vont faire la Russie et la Chine?
Quant à la Russie et la Chine, si les deux nations suivent l’évolution de la situation avec attention, elles ne devraient pas s’impliquer davantage pour le moment. «Même si ces deux régimes sont proches de l’Iran, ils ont d’autres priorités, que sont Taïwan pour la Chine, et l’Ukraine pour la Russie», juge Didier Leroy. Pour le spécialiste, les deux états auront d’autres cartes à jouer à l’avenir. «Ils peuvent se permettre d’attendre, car l’image populaire des USA dans la région risque encore de se détériorer, peu importe les événements».
André Dumoulin ajoute que ces deux puissances n’ont pas intérêt à s’immiscer dans ce conflit. «Pour la Chine, la tension dans la région nuit au commerce. Du côté russe, on n’a pas les moyens de se battre sur plusieurs fronts».
Enfin, pour Alain De Neve, malgré un axe anti-occidental qui se dessine clairement entre la Russie, la Chine et l’Iran, ces puissances conservent chacune des intérêts nationaux qui leurs sont propres. «Cet axe ne se traduit pas pour le moment en une alliance militaire. Aucune assistance n’est à ce jour prévue», conclut l’analyste de la Défense.
Baptiste Guelton
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