Homme de consensus, «technocrate fade», politicien chevronné: qui est Michel Barnier, nouveau Premier ministre français? (portrait)

Après des jours de tergiversation, Emmanuel Macron a enfin désigné un Premier ministre pour succéder à Gabriel Attal. Son choix s’est porté sur Michel Barnier, homme de droite expérimenté, deux fois commissaire européen et ex-négociateur du Brexit.

Près de deux mois après le second tour des élections législatives, la France était toujours en attente d’un gouvernement de plein exercice. Après avoir longuement temporisé et mené de nombreux entretiens, le président français Emmanuel Macron a finalement décidé de nommer Michel Barnier comme Premier ministre. Il a été préféré, entre autres, à Bernard Cazeneuve et Xavier Bertrand, approchés en début de semaine.

Négociateur

Sa mission ne sera pas une mince affaire. L’Assemblée nationale issue des législatives est fragmentée en trois blocs: la gauche, le centre droit et l’extrême droite. Et les menaces de censure de part et d’autre à l’encontre de (quasi) n’importe quel profil envisagé fusent à tout va. C’est donc sur des bases fragiles que Michel Barnier tentera de former un gouvernement rassembleur.

Il est réputé bon médiateur, notamment depuis son rôle de négociateur en chef de l’Union européenne pour le Brexit. Une tâche réalisée avec succès qui lui vaut une réputation d’homme de consensus, qui écoute, argumente et cherche à convaincre. Des qualités qui lui seront sans doute utiles dans son nouveau défi.

Un homme politique aguerri

Vieux loup de la politique française, il y est entré en 1973. Il a siégé à plusieurs reprises en tant que ministre, notamment sous les présidences de Jacques Chirac et de Nicolas Sarkozy. Avec des portefeuilles variés: Affaires européennes, Environnement, Agriculture ou encore Affaires étrangères.

Fidèle de toujours à son parti, il a également été commissaire européen à deux reprises, chargé des Politiques régionales et du cadre financier (1999-2004), puis responsable du Marché intérieur et des Services (2009-2014). Sa carrière européenne n’a cependant pas toujours été couronnée de succès, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker l’ayant battu dans la course à la présidence de la Commission européenne.

Gaulliste

Ses qualités sont souvent plus reconnues à Bruxelles qu’en France, y compris au sein de sa famille politique. D’après un parlementaire LR, interrogé par l’AFP, il représente «tout ce que les Français ne veulent pas. Il est stratosphérique, déconnecté et il continuera ou finira de tuer la droite». Certains détracteurs voient en lui un «technocrate fade» et ennuyeux. Mais ses proches louent sa loyauté et sa rigueur.

Avec un écueil au premier tour des primaires pour désigner le candidat de la droite à la présidentielle de 2022. Il s’est longtemps positionné sur une ligne centriste du gaullisme, avec une image de «gaulliste social», précise Libération. Mais il avait surpris en amorçant un virage à droite inattendu, plaidant pour un «moratoire» de trois à cinq ans sur l’immigration, sans pour autant parvenir à convaincre les militants.

Proche d’Emmanuel Macron sur le fond, sur l’économie et l’Europe notamment, Michel Barnier a souvent critiqué la forme, note Le Monde. Sa relation avec le président n’a d’ailleurs pas toujours été au beau fixe, même si ce dernier l’avait déjà approché, en 2020, pour remplacer Edouard Philippe.

Montagnard

Fier Savoyard, il s’est aussi forgé une réputation d’homme pragmatique. Marié et père de trois enfants, il aime rappeler qu’il est un montagnard, pour marquer sa différence avec une certaine élite.

Avec cette nomination, le chef de l’Etat fait le choix de l’expérience. Michel Barnier devient ainsi, à 73 ans, le plus vieux Premier ministre de la V^e République, lui qui, dans sa carrière politique, a souvent été le benjamin. Il succède à Gabriel Attal, 35 ans, qui était le plus jeune locataire de Matignon.