Liège, locomotive du redressement économique wallon ?
Certains y croient. D’autres estiment qu’elle n’est pas sortie de la spirale du déclin. Enquête sur les raisons qui empêchent le moteur liégeois de tourner à plein régime.
L’une des réussites les plus spectaculaires du bassin liégeois concerne Techspace Aero. Active dans l’aéronautique, la firme est établie à Herstal. Son développement s’est brusquement accéléré depuis 2010. Elle emploie aujourd’hui 1 350 travailleurs et s’apprête à engager une centaine de personnes supplémentaires, grâce à un contrat lié à la fabrication du nouveau Boeing 777X. Autre référence, la société EVS conçoit des serveurs vidéo qui permettent la diffusion d’images au ralenti. Leader mondial dans son secteur, elle occupe 350 personnes à Liège. Un fleuron. Tout comme l’entreprise pharmaceutique Mithra, une spin-off née en 1999 dans la sphère de l’Université de Liège (ULg) et spécialisée, entre autres, dans la contraception féminine.
Dans des secteurs plus traditionnels, Liège reste également à la pointe. Dernière entreprise à porter le nom illustre d’un industriel anglais qui transfigura la vallée de la Meuse au début du XIXe siècle, CMI (Cockerill Maintenance & Ingénierie) emploie plus de 4 000 personnes à travers le monde, dont 1 300 en Belgique. Le groupe se diversifie de plus en plus, sans abandonner son métier d’origine, la production d’engins mécaniques, et sans remettre en cause son ancrage à Seraing.Tout cela semble indiquer que la ville emprunte la voie du renouveau, après trois décennies de déclin économique. A en croire les pronostiqueurs les plus audacieux, celle que l’on appelait jadis « l’Athènes du nord » pourrait même devenir la locomotive du redéploiement wallon. Angélisme déplacé ou optimisme de bon aloi ? Professeur d’économie à HEC, la business school de l’ULg, Lionel Artige tente d’objectiver le débat. « Avant la crise de 2008, le sentiment prévalait que la province de Liège était en train de redémarrer assez fort, explique-t-il. C’était vrai, mais vrai pour toute la Belgique : le dynamisme de Liège, comparé à d’autres provinces, n’a rien d’extraordinaire. Cela dit, une certaine euphorie est compréhensible, vu les difficultés du passé. »
Lionel Artige se montre plus réservé quant au rôle moteur que la plus grande métropole de Wallonie pourrait jouer dans le développement régional. « La croissance, en Belgique, c’est une force qui va vers Bruxelles et les deux Brabant. Cette concentration de l’économie nationale vers la capitale ne s’arrête pas. Au contraire, elle s’accentue. » En 2011, l’arrondissement de Liège représentait 19,3 % du Produit intérieur brut wallon, un chiffre stable depuis le début des années 2000. En comparaison, l’arrondissement de Charleroi a reculé de 13,3 à 12,4 %, tandis que le Brabant wallon a progressé, de 13,4 à 14,7 %.
La plupart des observateurs se rejoignent pour identifier cinq verrous, au moins, qui empêchent le potentiel liégeois d’être pleinement exploité.
- Un désamour entre Liège et la Région wallonne.
- Les stigmates de la désindustrialisation.
- Hardware enviable, software défaillant.
- La lenteur.
- Un morcèlement géopolitique.
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