L’homme derrière le créateur de «Je suis Charlie» se dévoile
Joachim Roncin raconte la folle histoire du slogan, devenu signe de ralliement, qu’il a créé sous l’émotion de l’attentat du 7 janvier 2015.
C’est l’histoire d’un mec, sonné par l’attentat à la rédaction de Charlie Hebdo le 7 janvier 2015, qui tweete un message personnel, simplement pour exprimer une douleur qu’il n’arrive pas à nommer. Retweetés, surinterprétés, dévoyés, les trois mots vont connaître une notoriété planétaire qui dépassera largement l’intention de leur auteur. C’est l’impact et la transformation du fameux «Je suis Charlie» – «Et puis vite, il y a eu “Je ne suis pas” ou “Je suis mais”» – que raconte avec une grande sincérité son créateur Joachim Roncin dans Une histoire folle (1).
Et puis vite, il y a eu “Je ne suis pas” ou “Je suis mais”.
L’homme est à l’époque directeur artistique de Stylist, un hebdo parisien gratuit. Alors qu’il entend rester un quidam qui a voulu honorer «pas le magazine en tant que tel, mais tout ce qu’il représente, un état d’esprit», Joachim Roncin sera élevé au rang non seulement de créateur génial mais aussi, tantôt d’ «étendard des résistances face à l’obscurantisme», pour une journaliste de CNN, tantôt de «directeur artistique des attentats», selon un site conspirationniste.
La machine médiatique s’emballe, s’emballe. Joachim Roncin veut y résister mais accepte tout de même de répondre à des interviews qui, à son grand dam, laissent «peu de place à l’indécision, au doute, à la nuance». Résultat: une «notoriété soudaine, non sollicitée, et injustifiée» aux yeux de l’auteur, très embarrassé des «bravo» dont on le gratifie, et la naissance chez lui d’un syndrome de l’imposteur, soit «la crainte de se faire démasquer à tout instant par la moindre personne qui en saurait plus que soi». Ce sentiment a cependant pour vertu d’«empêcher toute prise de volume d’un melon naissant». Il est vrai qu’entendre George Clooney prononcer «Je souis Charley» à la cérémonie des Golden Globes ou voir son slogan brandi dans un épisode des Simpson a de quoi flatter l’ego.
Ce n’en sera pas la raison, mais Joachim Roncin tombera en dépression face à cet emballement et trouvera dans le combat pour la liberté de la presse, au service de Reporters sans frontières, un sens à son nouveau statut. Son histoire, elle, nous offre un récit à la fois grave et savoureusement léger. Dans ce registre, la rencontre entre ce fils d’une Ukrainienne et le président Petro Porochenko, venu à Paris pour la manifestation de soutien à la liberté d’expression et en quête de compétences pour redorer l’image de l’Ukraine, par son caractère désopilant, vaut à elle seule la lecture de ce voyage en absurdie.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici