Etienne Dujardin
Les leçons à tirer de l’assassinat du prêtre Jacques Hamel
Le choc est immense, la douleur est terrible à la suite de l’annonce de l’égorgement d’un prêtre pendant sa messe. On ne pensait pas que pareille horreur – malheureusement, fréquente dans les pays du Moyen-Orient et ailleurs – puisse être possible en France en 2016.
Cet homme, décrit comme généreux, affable et accueillant, s’est vu lâchement assassiné dans l’église où il remplaçait le curé de la paroisse de temps en temps par désir de servir les siens jusqu’au bout.
En novembre 2015, après les terribles attentats de Paris, j’écrivais dans ces mêmes colonnes qu’il était temps que la France, la Belgique, l’Europe anéantissent Daech. Au vu des nombreux actes criminels que nous avons connus depuis, cette vérité n’est que plus pressante. En 18 mois, la liberté de la presse a été attaquée avec les attentats de Charlie Hebdo, la communauté juive a été frappée avec l’attaque de l’Hyper Cacher en France et du musée juif de Bruxelles, nos modes de vie ont été piétinés que ce soit au Bataclan ou sur les terrasses de Paris, la fête nationale française a été endeuillée par l’attentat de Nice, l’Allemagne a connu ses premiers actes de terrorisme et, pas plus tard qu’hier, un prêtre est parti rejoindre les cieux. « Tuer un prêtre, c’est profaner la République« , tonnait hier le Président François Hollande dans sa déclaration au 20h. Tous les attentats sont odieux, mais on sent ici qu’une dimension supplémentaire a été prise. On touche à nos racines, notre histoire, notre culture et à un des fondements même de nos démocraties, à savoir la liberté religieuse. Tuer un prêtre sans défense dans son église, c’est le summum de la barbarie. Il en serait de même pour une attaque dans un hôpital, dans une école ou un campus universitaire… autant de lieux qui constituent en eux-mêmes une gigantesque puissance symbolique. Il est impératif de tirer des leçons de toutes les attaques que nous subissons en Europe !
Le temps de l’action s’impose encore et toujours. Nous avons marché avec des dizaines de chefs d’État du monde entier à la suite des attentats de Charlie Hebdo, nous avons pleuré après le Bataclan, après Bruxelles, après Nice, etc. L’état d’urgence a été instauré, mais les attaques continuent. Aujourd’hui, que faire ? Devons-nous simplement nous résigner à la fatalité ? Certainement pas, des mesures supplémentaires doivent être prises. Il serait temps qu’une réunion extraordinaire des chefs d’État et de gouvernement se tienne pour adopter des mesures communes : assèchement des revenus de Daech, demande de compte à tous les pays du Golf qui soutiennent directement ou indirectement le terrorisme, effort massif en matière de renseignements et coordination accrue au niveau européen… S’il était possible de se réunir à intervalle régulier pour sauver la Grèce ou sortir de la crise bancaire, il doit l’être tout autant lorsque coule le sang de victimes innocentes. Il faut montrer à la population que l’Europe prend des mesures tous azimuts.
Bien sûr, le risque zéro n’existera jamais et on ne peut transformer l’État en État policier, mais, aujourd’hui, le risque n’est pas là, il est du côté des terroristes islamistes. Tout le monde est attaché aux libertés individuelles, mais personne ne comprend qu’un laxisme latent puisse continuer dans de telles circonstances. Comment peut-on expliquer qu’un individu fiché S ait été relâché au mois de mars dernier contre l’avis du parquet ? L’état de droit, c’est aussi renforcer l’outil pénal pour protéger les personnes innocentes et c’est une responsabilité politique. Comme le signal Rachida Dati : « Les Français ne veulent plus des postures, des proclamations d’unité nationale qui sont légitimement perçues comme un moyen de masquer l’impuissance politique. Des solutions existent pour éradiquer cette barbarie. »
On ne peut plus accepter les discours de haine contre l’Occident, les mosquées qui prêchent la violence ou recrutent des djihadistes
Nos services de police doivent pouvoir disposer de tout l’arsenal juridique et de tous les moyens financiers dont ils ont besoin. Dans le même temps, il faut aussi tendre la main et proposer des parcours d’intégration dignes de ce nom. Rétablir une école de la réussite pour tous, lutter contre l’absentéisme scolaire, revaloriser toutes les filières qualifiantes qui mènent vers des emplois et principalement les emplois en pénurie. Je ne suis pas de ceux qui expliquent le terrorisme par des excuses sociales, mais je pense simplement qu’une civilisation qui se respecte doit donner les mêmes chances pour tous spécialement les plus vulnérables. Cependant, les droits vont avec les devoirs.
Le progressisme, c’est dire la vérité et non pas se cacher derrière le déni de réalité. Les défis sont énormes, les solutions ne sont pas faciles, personne ne peut le nier ou prétendre détenir une baguette magique, mais le pire des reproches que pourraient nous faire les générations futures serait de n’avoir rien fait pour défendre nos valeurs et leur avenir. Des notes d’espérance sont aussi à signaler, notamment lorsque Malek Boutih, Zineb El Rhazoui et tant d’autres personnes issues ou non de l’immigration défendent nos libertés avec tellement de talents et de courage. Et lorsque je vois les services de police et de secours agir avec autant de sang-froid, ou encore hier les réactions extrêmement dignes des évêques de France ou des Français en général, je me dis que Daech est encore loin de remporter la guerre qu’il nous a déclarée.
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