Le robot Perseverance arrive sur Mars: « On peut découvrir un livre ouvert sur le passé du système solaire »
Le robot Perseverance va se poser sur Mars ce jeudi soir. En quoi cette mission est-elle plus importante que les autres? Quels sont les enjeux et les risques? On fait le point avec Véronique Dehant, professeur à l’UCLouvain et spécialiste de la géophysique de la planète Mars.
Est-ce que cette mission est plus complexe que d’autres?
Toute mission vers Mars est toujours complexe. Celle-ci a l’avantage d’avoir une autre mission qui lui a précédée et qui a le même système d’atterrissage. C’était Curiosity. On a donc un précédent avec la même manière d’atterrir qui a été testée et qui a réussi. On retrouve plusieurs éléments, comme un bouclier thermique, des parachutes, des boosters et une sorte de grue volante, que les Américains appellent « skycrane ». Il s’agit d’une plateforme avec une rétro-fusée, qui va déposer tout doucement le rover à la surface. Le robot voyage à 20.000 km/h, mais va freiner sur l’atmosphère. Au niveau de la basse atmosphère, il devrait arriver à la vitesse d’un TGV. Puis les boosters freineront encore, pour déposer délicatement le rover à la surface. Les images qu’on va découvrir seront donc assez classiques.
Quels sont les enjeux principaux?
D’un point de vue « résultats », l’objectif de ce rover est d’aller rechercher des échantillons de la surface de Mars et du sous-sol martien, dans un endroit où l’on sait qu’on aurait pu avoir de la vie dans le passé. Une fois qu’on aura des bons échantillons, on va les stocker, et il y aura une autre mission plus tard, qui s’appelle le « sample return », (le retour d’échantillon, en français), qui aura pour but de venir chercher ces échantillons pour les renvoyer vers la Terre.
L’enjeu principal, c’est donc ce « sample return ». Cette mission est en quelque sorte une préparation pour ce retour d’échantillions. Mars est une planète très sympathique, car il n’y a pas de tectonique des plaques, comme sur Terre. Donc la surface est restée intacte depuis le début du système solaire. On peut découvrir un livre ouvert sur le passé du système solaire.
Mars est une planète très sympathique, car il n’y a pas de tectonique des plaques, comme sur Terre. Donc la surface est restée intacte depuis le début du système solaire.
La deuxième chose, c’est qu’il y a eu de l’eau dans le passé de Mars, de nombreuses études le prouvent. Pour avoir la vie, il faut de l’énergie, il faut de l’eau liquide, et des nutriments. C’est la ‘soupe primitive’. Au tout début du système solaire, entre 4.6 et 3.5 milliards d’années, il y avait énormément d’eau à la surface. Donc Mars a été habitable. La grosse question qu’on se pose, c’est évidemment si la vie y a existé. Retrouver des monocellulaires fossilisés dans des vieux terrains, c’est possible. Cette mission ne révèlera peut-être pas tout ça dans l’immédiat, mais elle a pour objectif de vraiment repérer les échantillons, qui, quand ils seront ramenés sur Terre, pourront ouvrir des portes sur plein de choses. Entre temps, on aura la mission ExoMars en 2022, qui a pour but de creuser dans le sous-sol, prendre des échantillons, et les analyser sur place. Ensuite, on les analysera beaucoup plus précisément sur Terre. Avec des moyens qu’on ne peut pas emmener à la surface de Mars.
Pourquoi cette mission Perseverance est si importante?
Car c’est la seule étape qu’il faut réussir pour atterrir à la surface de Mars. Et atteindre tous les objectifs fixés avec cette mission. C’est une étape qui est risquée, comme tout atterrissage. Celui-ci est assez ‘court’, donc ça n’implique pas que les gens soient rivés pendant des heures devant leur télévision. Ce sont sept minutes qui vont être découpées en plusieurs étapes d’atterrissage. On croise les doigts pour que ça marche.
Y-a-t-il des risques majeurs lors de l’atterrissage ? La Nasa parle de « sept minutes de terreur »…
Oui, mais tout atterrissage, c’est toujours « sept minutes de terreur », parce que n’importe quel élément peut casser. Les Européens n’ont pas réussi à atterrir en 2016. On voit que c’est toujours « challenging » d’atterrir. Je ne dirais pas qu’il y a une grosse incertitude, car beaucoup de choses sont testées à l’avance. Mais il y a toujours ce stress que quelque chose ne marche pas. Car ce sont quand même des gros budgets et de longs développements. Pour la mission ExoMars en 2022, ce sera sept minutes ‘d’énorme terreur’.
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