Le 11 mars 1985, le jour où Gorbatchev prend les rênes de l’URSS
Constantin Tchernenko vient de décéder, et voilà que son successeur est déjà désigné. Le look de ce dernier tranche avec celui de ses prédécesseurs. Ceux-ci étaient de jeunes vieillards, tandis que Mikhaïl Gorbatchev est un jeune quinqua.
N’appartenant pas à l’ancienne génération tout en étant déjà expérimenté, il passe pour être un homme moderne et modéré. Moins idéologue que pragmatique, ouvert à l’Occident. Réformateur aussi. A l’heure où il devient le plus puissant personnage de l’Union, les observateurs sont tout à la fois surpris et plutôt séduits. Pour l’heure, personne ne se doute qu’il en sera le pacifique fossoyeur.
Certes, Gorbatchev ne tarde pas à prôner le changement. L’homme est conscient de la paralysie qui ronge l’URSS. Sur le plan économique, la crise est manifeste : la productivité décline, l’entretien de l’outil militaire coûte cher… Une modernisation s’impose ; elle portera le nom de » perestroïka » (réforme). Le dirigeant promet également des progrès au niveau institutionnel et politique. Progressivement, il instaure un pluralisme politique, autorise la publication de textes censurés, favorise la liberté d’expression. Invoquant le concept de » glasnost » (transparence), il se détache clairement de l’héritage des anciens. Enfin, c’est aussi en matière de politique étrangère que Gorbatchev fait preuve d’une ouverture nouvelle. Lorsque les vassaux de l’empire soviétique réclament du lest, il refuse d’envoyer ses troupes. Ce qui contraste avec les habitudes du passé.
Mais Gorbatchev n’est pas servi par les circonstances. Dès 1986, une catastrophe nucléaire se produit à Tchernobyl. La déplorable gestion de la crise mine le crédit des autorités. » Cette catastrophe a peut-être été la véritable raison de l’effondrement de l’Union soviétique cinq ans plus tard « , déclarera, bien plus tard, Gorbatchev. Pendant que le nuage nucléaire se propage, plus de 100 000 Soviétiques s’embourbent en Afghanistan. En 1988, les opérations de retrait débutent. Sans gloire, les soldats rentrent au pays. L’année suivante, c’est la chute du mur de Berlin. La fin d’un monde. Ces divers événements bouleversent les repères traditionnels et fragilisent l’identité de l’URSS.
Sans le vouloir, sans même le percevoir, Gorbatchev est en train d’enterrer l’empire soviétique. En août 1991, des communistes – des » durs » ! – tentent un coup d’Etat. Objectif : démettre Gorbatchev et remettre l’URSS sur le droit chemin. La manoeuvre échoue. Dans la foulée, plusieurs pays satellites revendiquent leur indépendance. En décembre, l’URSS est morte.
Restent les souvenirs. Et les rancoeurs. Si Gorbatchev est devenu une vedette en Occident, sa mémoire est plus diversement saluée en Russie. » Je déteste Gorbatchev parce qu’il m’a volé ma patrie « , lâche ce nostalgique. Agent secret à la solde des Etats-Unis, traître ou franc-maçon : toutes les accusations sont bonnes. Il y a quelques années, un sondage révélait que 20 % des Russes éprouvaient du mépris pour l’ancien dirigeant. A peine 10 % avaient pour lui du respect.
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