Teodoro Obiang Nguema Mbasogo (Guinée équatoriale), 41 ans de pouvoir. Paul Biya (Cameroun), quarante ans de pouvoir. Denis Sassou-Nguesso (Congo-Brazzaville), 39 ans de pouvoir. © belgaimage /getty images

La révolution de palais au Gabon, un avertissement pour les patriarches de la région

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

La dynastie Bongo a fini par lasser les militaires. Or, les présidents de Guinée équatoriale, du Cameroun, et de la République du Congo sont au pouvoir depuis quarante ans…

Les coups d’Etat militaires se succèdent en Afrique mais ne se ressemblent pas toujours. Au renversement du président gabonais Ali Bongo, le 30 août, par un groupe d’officiers dirigé par le général Brice Oligui Nguema, chef de la garde républicaine, n’a pas été opposé de menace d’intervention militaire des pays de la région ou de la communauté internationale comme ce fut le cas au Niger après le putsch mené par le général Abdourahamane Tiani, le 26 juillet dernier.

Révolution de palais?

A Niamey, l’ancienne puissance coloniale, la France, est confrontée à la destitution d’un chef d’Etat démocratiquement «bien élu». Le président Mohamed Bazoum a remporté le deuxième tour de l’élection présidentielle, le 21 février 2021, avec 55,67% des voix. A Libreville, le déroulement du scrutin présidentiel du 26 août, qui a permis la réélection du président Ali Bongo avec 64,27% des suffrages contre 30,77% à l’opposant Albert Ondo Ossa, ne laisse guère de doute sur la réalité de fraudes. Après treize années de pouvoir succédant aux 41 de «règne» de son père Omar Bongo, Ali Bongo, diminué par une victoire déjà contestée à l’élection présidentielle d’août 2016 et par un accident vasculaire cérébral subi en 2018, est devenu une proie facile. Pour des militaires désireux de faire triompher la volonté du peuple ou pour des officiers soucieux de perpétuer la domination d’un clan sur la politique du pays? Coup d’Etat ou révolution de palais?

© National

Brice Oligui Nguema, le nouvel homme fort de Libreville installé comme président de transition le 4 septembre, est originaire de la même région que la famille Bongo, le Haut-Ogooué, dans l’est du Gabon. Sa mère est une cousine du président Omar Bongo, qu’il a servi avant de poursuivre sa carrière au service de son fils. Lors de la cérémonie de son investiture, il a promis de «remettre le pouvoir aux civils en organisant des élections libres, transparentes et crédibles». Mais il n’a pas fixé de calendrier et a soumis la tenue du scrutin à l’adoption par référendum d’une nouvelle Constitution et de nouveaux codes électoral et pénal. Un processus qui s’inscrit vraisemblablement sur une longue durée. En Afrique, on sait quand les militaires prennent le pouvoir, pas quand ils le rendent.

Longévité au pouvoir

Révolution de palais ou putsch, la prise de pouvoir à Libreville est un avertissement pour plusieurs dirigeants de la région. L’ouest de l’Afrique centrale compte trois des six chefs d’Etat du continent, non monarques, qui ont la plus longue présence au pouvoir. Les autres sont Yoweri Museveni l’Ougandais (37 ans de «règne»), Isaias Afwerki l’Erythréen (trente ans) et Paul Kagame le Rwandais (23 ans). Ils font figurent de «petits bras» par rapport aux patriarches d’Afrique centrale.

En Guinée équatoriale, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo est à la tête de ce petit pays, ancienne colonie espagnole, depuis 1979, soit 41 ans. Au Cameroun, Paul Biya est au pouvoir depuis 1982, soit quarante ans. Et au Congo-Brazzaville, Denis Sassou-Nguesso est devenu président la première fois en 1979 et il ne doit qu’à une mise à l’écart entre 1992 et 1997 de n’avoir exercé le pouvoir, jusqu’à aujourd’hui, «que» pendant 39 ans.

Les prochains scrutins présidentiels auront lieu en 2025 au Cameroun, en 2026 en République du Congo et en 2029 en Guinée équatoriale, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo a été réélu en 2022 avec… 97% des voix. A l’aune de l’après-scrutin présidentiel au Gabon, c’est une menace «existentielle» qui pèse désormais sur les trois patriarches autocrates de la politique africaine. Concéderont-ils des élections véritablement libres et démocratiques ou prendront-ils le risque de scrutins biaisés et de «rectifications» militaires ou populaires?

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