J’y étais et tout est vrai : À l’arrivée de la reine Mathilde au Laos
Une bonne douzaine d’heures de vol entrecoupées par quatre heures de transit. Certes, en première classe. Ce qui ne règle que le problème de l’espace pour les jambes. Pas le puissant désir de douche.
Pourtant, Mathilde débarque telle une fleur, sur le tarmac de l’aéroport de Vientiane. Le brushing ultimement laqué, le pli du pantalon bleu imperturbable, les talons de dix centimètres un brin hésitants dans l’escalier. Sourires, saluts, bouquet de roses et lys blancs, préalablement passé au détecteur comme les bagages à main, on n’est jamais trop prudent. La berline file vers l’hôtel. Une reine n’attend pas ses bagages dans le terminal.
Le programme serré de l’après-midi de cette mission en tant que marraine d’honneur de l’Unicef ne lui permet pas de sieste, mais bien un changement de tenue. Robe à carrés colorés, escarpins bordeaux. Pas trop hauts, mais le vice-président du Laos aurait sans doute préféré qu’elle soit à plat. La petitesse de Phankham Viphavanh ne fait qu’accentuer la grandeur de la reine, lors du serrage de mains. Le lendemain, la photo de la rencontre fait la une du quotidien Vientiane Times. Le journal, organe officiel du parti communiste au pouvoir, a élégamment préféré la version assise du cliché.
Autre ministère, même vaste salle équipée de chaises en bois sculpté. Pas une table basse sans une boîte de kleenex. Par 35 degrés, un rhume est sans doute vite attrapé. Khamphao Ernthavanh, la ministre des Affaires étrangères, n’a pas besoin de traducteur. Son anglais résonne à peine, Her Majesty enchaîne sur le même volume, puis de toute façon les flashs assourdissent les deux minutes de conversation que les médias sont autorisés à écouter.
À la troisième étape protocolaire, la presse écrite a la permission de rester pour l’entrevue avec Inlavanh Keobounphanh, puissante présidente de la puissante organisation Lao Women’s Union, sans qui l’Unicef ne pourrait rien entreprendre sur le terrain. Les photographes et les télévisions boudent un peu, surtout en apprenant que Mathilde a porté (devant elle) la tenue traditionnelle féminine laotienne. Et, qu’avec leurs smartphones, les journalistes présents ont pu l’immortaliser. Chançards ! « Ç’aurait été l’image de la journée ! », peste l’un.
La reine, professionnelle jusqu’au bout des ongles, questionne sur l’éducation, la scolarisation des enfants et en particulier des jeunes filles souvent privées d’enseignement secondaire. « Nous allons visiter votre refuge pour femmes, jeudi. Qu’y faites-vous précisément ? » Et la présidente de lui faire traduire, sans se départir de son large sourire, que la reine le verra bien elle-même jeudi. « J’ai entendu tout à l’heure que votre organisation avait un département propagande. Qu’y faites-vous exactement ? », questionne Olivier Marquet, directeur d’Unicef Belgique. Juste une erreur de traduction, s’empresse-t-on de lui répondre. Il fallait comprendre « département de la communication ». Rires gênés.
Même dans un pays communiste, les deux termes ne sont pas synonymes.
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