John Lee, l’homme qui avait supervisé la répression, désigné à la tête de Hong Kong
L’ex-patron de la sécurité de Hong Kong John Lee, qui avait supervisé la répression du mouvement pro-démocratie, a été désigné dimanche à la tête de la ville par un petit comité loyal au régime chinois.
Cet ancien policier de 64 ans, était le seul candidat à la succession de la dirigeante sortante Carrie Lam, qui n’a pas brigué un nouveau mandat de cinq ans. Il est le premier dirigeant de Hong Kong issu du milieu policier. Chef de la sécurité de Hong Kong au moment des gigantesques manifestations pro-démocratie de 2019, il a supervisé la répression de la contestation ainsi que la sévère reprise en main politique qui a suivi. « Je comprends qu’il me faudra du temps pour convaincre la population », a concédé John Lee dimanche devant la presse. « Mais je peux le faire par l’action ».
Il a déclaré vouloir construire un Hong Kong « plein d’espoir, d’opportunités et d’harmonie », maintenant que les autorités ont « restauré l’ordre après le chaos ». Jusqu’à présent, sa campagne n’a pas donné beaucoup de détails concrets sur sa politique, mais il a assuré qu’il révélera plus de détails après sa prise de fonctions le 1er juillet, jour du 25e anniversaire de la rétrocession de Hong Kong à la Chine par le Royaume-Uni. Hong Kong n’a jamais été une démocratie, ce qui a alimenté pendant des années la frustration de la population et des protestations parfois massives et violentes. Son dirigeant est choisi par un « comité électoral » composé actuellement de 1.461 personnes, soit environ 0,02% de la population de la ville. Après un bref scrutin secret dimanche, 99% des membres (1 416) ont voté pour John Lee et 8 ont voté contre, selon les autorités. Trente-trois membres n’ont pas voté.
« Démonstration de l’esprit démocratique »
Pékin a salué ce résultat quasi unanime, affirmant qu’il montrait que « la société hongkongaise a un niveau élevé de reconnaissance et d’approbation » pour Lee. « C’est une véritable démonstration de l’esprit démocratique », a déclaré le bureau des affaires de Hong Kong et de Macao dans un communiqué. Les manifestations ont été largement interdites à Hong Kong, les autorités ayant recours à une interdiction des rassemblements publics de plus de quatre personnes en raison du Covid, ainsi qu’à une nouvelle loi sur la sécurité nationale. Selon les médias locaux, environ 6.000 à 7.000 policiers ont été mobilisés pour éviter tout incident pendant le processus de désignation.
La Ligue des sociaux-démocrates – l’un des derniers groupes pro-démocratie – a organisé une manifestation de trois personnes avant l’ouverture des bureaux de vote, scandant « le pouvoir au peuple, le suffrage universel maintenant ». « Nous savons que cette action n’aura aucun effet, mais nous ne voulons pas que Hong Kong soit complètement silencieuse », a déclaré la manifestante Vanessa Chan, sous le regard de dizaines de policiers. Sous Xi Jinping, Pékin a imposé en 2020 à l’ancienne colonie britannique une loi draconienne sur la sécurité nationale qui a étouffé toute dissidence, ainsi qu’une réforme du système politique pour faire en sorte que Hong Kong soit dirigé exclusivement par des « patriotes » loyaux envers le régime chinois.
Selon les analystes, c’est le fervent soutien de John Lee à cette campagne de répression qui lui a valu d’obtenir la confiance du régime chinois, traditionnellement méfiant à l’égard des élites politiques de Hong Kong. Mais cela vaut aussi à M. Lee de figurer sur une liste de personnalités chinoises et honkongaises sanctionnées par les Etats-Unis. John Lee héritera d’une ville en difficulté.
« geste vide »
Le mouvement pro-démocratie a été écrasé par la loi sur la sécurité nationale, mais une grande partie de la population éprouve toujours un sourd ressentiment à l’égard de Pékin et contre les inégalités profondément ancrées dans la société hongkongaise.
Et Hong Kong, troisième place financière mondiale, continue de vivre pratiquement coupée du monde en raison de ses restrictions drastiques contre le Covid-19. Faisant la queue à l’extérieur d’un restaurant dimanche, Alex Tam, un résident de 25 ans, a déclaré que lui et ses amis ne prêtaient guère attention à la procédure. « C’est juste un geste vide », a-t-il déclaré à l’AFP. « S’il n’a pas écouté les manifestants, je ne vois pas comment il écouterait les jeunes maintenant, surtout ceux qui critiquent le gouvernement. » L’homme d’affaires à la retraite Yeung Wing-shun s’est montré plus positif, disant espérer que Lee dirigera Hong Kong d’une « main ferme ».
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