Bertrand Candelon
Les JO, une opération marketing qui a un prix (chronique)
L’histoire a montré que les effets positifs des Jeux ne permettent pas, dans la plupart des cas, de compenser les dépenses mobilisées.
Depuis le 26 juillet, nous vivons, comme tous les quatre ans, à l’heure des Jeux olympiques d’été et des Jeux paralympiques. Nos athlètes valides ont déjà réalisé une très belle performance en obtenant dix médailles, un record depuis 1924. Au-delà de l’aspect sportif, l’intérêt de tels événements peut poser question d’un point de vue économique. En effet, les expériences passées ont montré que les Jeux olympiques pouvaient avoir des conséquences négatives, comme ceux de 2004 à Athènes qui ont significativement contribué à l’augmentation de la dette grecque et à la crise souveraine de 2009.
Les coûts associés à l’organisation des Jeux olympiques d’été sont très élevés. Le record est détenu par Rio en 2016, avec des dépenses avoisinant les 24 milliards de dollars, alors que le budget prévisionnel pour Paris 2024 n’était que de huit milliards de dollars (il est cependant fort probable que ces prévisions soient largement dépassées). Ces dépenses commencent dès le dépôt de la candidature, s’étalent sur une décennie et peuvent même durer plusieurs années après la fin des olympiades. Elles couvrent tout d’abord la construction de nouvelles infrastructures sportives, ainsi que les frais opérationnels. Cependant, cette évaluation ne prend pas en compte d’autres charges plus difficiles à mesurer comme les investissements urbains (l’amélioration de la qualité de l’eau de la Seine à Paris, par exemple) ou l’amélioration des transports. L’argument étant que ces dépenses constituent des investissements anticipés qu’il aurait été obligatoire de réaliser à plus ou moins longue échéance. Enfin, le budget n’intègre pas les coûts d’opportunité. En effet, les dépenses limitent celles qui auraient pu être faites dans d’autres secteurs importants, comme la santé ou l’éducation.
L’organisation de Jeux olympiques engendre aussi des recettes conséquentes. Tout d’abord, les droits de retransmission ainsi que la vente de produits dérivés génèrent de grosses rentrées financières. Les seuls droits télévisuels ont rapporté 3,2 milliards de dollars pour les JO de Tokyo. Ensuite, la construction de nouvelles infrastructures booste l’économie locale, entraînant des recrutements dans le secteur des travaux publics. De même, l’exposition internationale de la ville organisatrice stimule le tourisme ainsi que la croissance du pays organisateur, pendant mais aussi après les épreuves. Les économistes Robert Baumann, Bryan Engelhardt et Victor Matheson ont montré dans une étude publiée en 2010 que cet impact est significatif à très court terme mais devient nul ensuite. Enfin, les Jeux olympiques créent un climat positif dans le pays, stimulant la consommation. Cet effet sur la croissance française au troisième trimestre 2024 avoisinerait les 0,2%. Néanmoins, l’histoire a montré que tous ces effets positifs ne permettent pas, dans la plupart des cas, de compenser les dépenses mobilisées.
Il n’en reste pas moins que les Jeux olympiques constituent une formidable opération marketing. Cet été, par exemple, ils ont permis aux Français d’oublier le blocage institutionnel et les prochaines réformes, qui découleront de la procédure de déficit excessif. Ce répit a sans doute un prix.
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