Theresa May © AFP

« Il n’y a pas la moindre chance que May aille au bout de son mandat »

Jelle Dehaen Journaliste Knack, historien et philosophe

« Le Brexit risque de causer un conflit dans le Parti conservateur », déclare Rosalind Scott, vice-présidente des libéraux démocrates au Royaume-Uni. Entretien avec notre confrère de Knack.

La décision de May d’organiser de nouvelles élections a-t-elle été la plus grande bévue politique de l’histoire britannique récente ?

Rosalind Scott: Certainement. Même si tout le monde semble oublier que les membres de son parti ont également oeuvré en faveur de nouvelles élections parce qu’elle avait une grande avance dans les sondages. Deux choses ont mal tourné. Les conservateurs ont mené une campagne présidentielle. Tout tournait autour de May, mais les campagnes ne sont pas son fort. En outre, les Britanniques ont appris à mieux connaître son opposant Jeremy Corbyn du Labour. En le voyant tous les jours à la télévision, ils se sont rendu compte qu’il n’était pas le diable pour qui on le prenait.

Le Labour a diffusé un message d’espoir et a promis de mettre fin à la politique d’austérité. Beaucoup de gens sont insatisfaits du cap du pays. Les jeunes ont l’idée que la génération précédente allait gratuitement à l’université et trouvait à se loger à prix modeste. Aujourd’hui, les jeunes doivent débourser de grosses sommes pour l’enseignement supérieur et il y a peu d’emplois stables. Et suite au Brexit, ils ne pourront plus voyager librement à travers l’Europe.

Votre parti, les LibDems, est opposé au Brexit. Quel est l’impact de la défaite de May sur les négociations du Brexit ?

Les conservateurs pensaient qu’une majorité plus large renforcerait sa position, mais c’est le contraire qui est arrivé. May souffre du même problème que tout leader des conservateurs : elle doit garder ensemble l’aile eurosceptique et plus modérée de son parti. Au cours des 18 derniers mois, il n’y a presque pas eu de progrès lors des négociations. Au cours des semaines et des mois à venir, il faudra prendre une série de décisions primordiales, ce qui risque de causer un conflit entre les deux ailes de son parti.

48% des Britanniques ont voté contre le Brexit, 52% étaient pour. Cela a-t-il changé ?

Il n’y a pas eu de grand basculement dans l’opinion publique. À mon avis, cela va bientôt changer, quand ils se rendront compte de l’impact sur leur vie quotidienne.

Les prochaines élections parlementaires auront lieu en 2022. May sera-t-elle encore Première ministre à ce moment-là ?

Il n’y a pas la moindre chance qu’elle aille au bout de son mandat. Comme les conservateurs n’avaient plus la majorité absolue, ils ont dû former une coalition avec le DUP nord-irlandais protestant DUP. L’idéologie de ce parti est très différente de celle de la plupart des Britanniques, ce qui rend le gouvernement très instable. En outre, beaucoup de membres modérés du Labour ont soutenu son gouvernement lors de votes importants sur le Brexit. Cela ne durera pas et May sera encore plus vulnérable.

Votre parti a perdu des voix aux élections, mais il a gagné quatre sièges.

Comme l’élection a tourné au duel entre Corbyn et May, nous avons également été écrasés. Nous étions contents d’avoir gagné des sièges, mais au fond, nous étions déçus.

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