Hong Kong: Pékin intensifie sa répression
Une cinquantaine de figures de l’opposition pro-démocratie ont été arrêtées mercredi à Hong Kong au nom de la récente loi sur la sécurité nationale, dans le plus grand coup de filet mené en vertu de ce texte drastique imposé par Pékin.
Les autorités chinoises ont engagé en 2020 une reprise en main musclée de l’ex-colonie britannique, qui avait l’année précédente été le théâtre d’une mobilisation populaire inédite depuis la rétrocession en 1997.
Et ces interpellations, dont beaucoup sont liées aux primaires organisées par l’opposition l’été dernier, en sont une nouvelle illustration.
Deux sources haut placées au sein de la police ont, sous couvert de l’anonymat, fait état d' »environ 50″ interpellations menées par l’unité chargée d’enquêter sur les infractions relevant de la loi sur la sécurité.
A en croire un décompte fait sur Facebook et Twitter par des partis et des personnalités de l’opposition, au moins 48 arrestations ont été réalisées, la plupart pour « subversion ».
Ce coup de filet matinal a été rapidement condamné par Antony Blinken, l’homme choisi par le président élu américain Joe Biden pour diriger sa diplomatie, et qui a dénoncé une « attaque contre ceux qui défendent courageusement les droits universels ».
« L’administration Biden-Harris se tiendra aux côtés du peuple de Hong Kong et contre la répression de la démocratie par Pékin », a-t-il promis.
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Eteindre la flamme de la résistance –
C’est un spectre très large de la mouvance pro-démocratie qui a été visé mercredi, qu’il s’agisse d’ex-parlementaires comme James To, Andrew Wan, Lam Cheuk Ting ou Claudia Mo, ou de militants plus jeunes.
Parmi ces derniers, figurent notamment Gwyneth Ho, une ancienne journaliste de 30 ans passée dans le militantisme, et Tiffany Yuen, une conseillère de district de 27 ans.
Des proches de Joshua Wong, l’un des visages les plus connus de la mouvance pro-démocratie, actuellement incarcéré, ont affirmé sur son compte Facebook que son domicile avait été perquisitionné.
La police a aussi réalisé une perquisition dans un cabinet d’avocats engagé dans la défense des droits de l’Homme. L’avocat américain John Clancey, qui travaille pour cette entreprise, a été arrêté, a-t-on appris de sources proches du dossier. Il est le premier Américain interpellé au nom de la nouvelle loi.
L’opération de police a aussi ciblé les médias. Trois groupes de presse -Stand News, Apple Daily et Inmediahk- ont dit avoir reçu la visite de policiers.
« C’est une vraie nuit des longs couteaux, la plus vaste attaque menée à ce jour contre la démocratie à Hong Kong », s’est insurgé l’avocat Antony Dapiran, auteur d’un livre sur les mouvements sociaux à Hong Kong.
Nathan Law, un compagnon de route de Joshua Wong qui s’est exilé en juillet, a accusé les autorités de chercher à « éteindre la flamme de la résistance ».
La police de Hong Kong n’a fait aucun commentaire officiel.
– « Grave provocation » –
Mais des personnalités pro-démocratie ont déclaré que ces arrestations étaient liées aux primaires organisées en juillet par l’opposition avant les législatives.
Prévues en septembre 2020, ces élections, au cours desquelles l’opposition entendait capitaliser sur la popularité de la mobilisation de 2019, ont été reportées d’un an par le gouvernement au prétexte de l’épidémie.
Le but des primaires, auxquelles plus de 600.000 Hongkongais ont participé, était d’éviter un éparpillement des votes de l’opposition et de désigner les 35 candidats qui brigueraient ceux des sièges du Conseil législatif (Legco, le parlement local) qui sont attribués au suffrage universel. Les autres sont attribués selon un système alambiqué qui garantit presque à coup sûr la majorité au bloc pro-Pékin.
L’opposition espérait rafler les 35 sièges en question, et être ainsi pour la première fois majoritaire dans la législature, afin de constituer un contre-pouvoir réel à l’exécutif hongkongais qui est aligné sur Pékin.
La Chine avait présenté ces primaires comme une « grave provocation » et affirmé que faire campagne pour prendre le contrôle du parlement pouvait relever de la « subversion », en vertu de la loi sur la sécurité nationale entrée en vigueur quelques semaines plus tôt.
Imposé sans débat par Pékin, ce texte fut une riposte à la crise politique de 2019, quand Hong Kong avait pendant des mois été le théâtre de manifestations contre les ingérences de la Chine.
Les critiques de cette loi la présentent comme le dernier clou sur le cercueil de la semi-autonomie hongkongaise, pourtant théoriquement garantie jusque 2047 dans le cadre du principe « Un pays, deux systèmes ».
Très flou dans sa formulation, le texte s’attaque à quatre types de crimes: la sécession, la subversion, le terrorisme et la collusion avec les forces étrangères. Il prévoit des peines de perpétuité.
Les autorités avaient initialement assuré que la loi ne viserait qu’une « extrême minorité ». Mais elle a été invoquée pour étouffer la dissidence et criminaliser certaines opinions politiques.
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