André Flahaut
Face aux nationalismes : bâtissons une Europe sociale et solidaire
Depuis les élections européennes de 2014, et celles de ces dernières semaines en Italie puis en Hongrie, la montée en puissance des partis nationalistes et xénophobes est incontestable.
Les populismes, notamment de droite, ne cessent de remporter des victoires partout en Europe. Qu’on pense, par exemple, au PiS en Pologne, au Fidesz et au Jobbik en Hongrie, à l’AfD en Allemagne, à Aube dorée en Grèce, au FPÖ en Autriche, ou encore au M5S en Italie.
Un an avant le prochain scrutin européen, il importe de tirer la sonnette d’alarme pour éviter un raz-de-marée dont les conséquences pour la démocratie seraient redoutables.
Des valeurs foulées aux pieds
N’hésitons pas à le dire : les valeurs de l’Europe unie ont été largement foulées aux pieds par pur opportunisme politique et par dogmatisme économique – y compris par ceux censés les porter et les défendre. Ces valeurs fondatrices que sont la Paix, la solidarité, le multiculturalisme, la diversité et une prospérité ouverte au monde. Dès lors, rappelons combien la prospérité de l’Europe s’est bâtie sur l’apport de flux migratoires constants. Des flux qui, aujourd’hui, sont source de peur, de rejet et de haine.
Force est de constater que les partis d’extrême droite ont très largement tiré profit du climat ou du sentiment d’insécurité qui domine l’Europe depuis quelques années : terrorisme, défis migratoires, conflits au Proche et au Moyen-Orient, etc. Ils ont alimenté les haines en promouvant des clichés et des stéréotypes (migrants = terroristes) propres à accentuer les oppositions entre les peuples et à conforter l’angoisse de beaucoup d’Européens.
Ces partis promettent une résolution rapide de tous les problèmes économiques et sociaux par la mise en oeuvre de mesures sécuritaires et liberticides. Ainsi en viennent-ils, sur la base de mesures souvent simplistes, à séduire un électorat de plus en plus large à la fois surinformé et de moins en moins formé à la citoyenneté autant qu’à l’analyse des médias.
Rejet, égocentrisme et replis sur soi
Les promesses des populistes, qui donnent carrière à l’égocentrisme et au repli sur soi, s’emploient sans arrêt à opposer les personnes et les situations précaires entre elles : les pauvres d’ici aux pauvres d’ailleurs ; les malheurs d’ici aux malheurs des autres. Bart De Wever, par exemple, ne faisait pas autre chose lorsque, tout récemment, il associait l’accueil des migrants aux risques de délitement de notre Sécurité sociale.
Je parlais d’opportunisme politique, justement, il est ici. En effet, la désignation permanente de boucs émissaires (le migrant, l’étranger, l’autre, souvent musulman, mais aussi juif comme c’est le cas dans la Hongrie de Viktor Orban…) permet de détourner les citoyens d’Europe des problèmes socio-économiques et des enjeux politiques, mais aussi du vrai travail à mener sur nous-mêmes pour construire une société dynamique et ambitieuse ; une société fondée sur le vivre ensemble.
Une occasion d’enrichissement
Le rejet de l’autre, de celui qui diffère par ses origines, sa culture, sa langue ou sa couleur de peau, se nourrit de la peur et de l’incompréhension. Pourtant, l’intégration de la différence est, chaque fois, l’occasion d’un enrichissement réciproque né d’une ouverture à la pluralité des expériences. La diversité est une chance qu’il faut savoir saisir !
Les nationalistes, les xénophobes, les populistes reprochent à l’Europe et à ses dirigeants d’avoir accepté trop de migrants, trop d’étrangers. Soyons sérieux : notre effort est minime ! En effet, si l’on prend le cas du Liban, qui compte plus d’un million de réfugiés, la proportion est d’un habitant sur trois ou quatre. Pour sa part, la Belgique ne prend en charge et ne réinstalle que quelques milliers de demandeurs d’asile chaque année.
La voix de la démocratie
Je sais qu’il est difficile de faire entendre la voix des progressistes et des démocrates. On la qualifie souvent d' »inaudible ». Mais cette voix n’en reste pas moins vive. Les récentes protestations contre les visites domiciliaires en portent un témoignage marquant. Oui ! Nombreux sont les Belges qui, chaque jour, s’engagent contre l’extrémisme et le racisme dans un esprit d’accueil et de solidarité. Les plateformes citoyennes mises en place dans notre pays prouvent la défiance d’une partie de la population face aux politiques aveugles et sans espoir de l’actuel Gouvernement fédéral.
Au reste, devant la résurgence d’un climat de guerre froide et les comportements erratiques de certains dirigeants de pays alliés, le développement d’une Europe cohérente et solidaire s’impose plus que jamais. La mise en oeuvre de dispositifs visant à contrer les effets négatifs du capitalisme et ceux d’une mondialisation sans éthique s’avère indispensable. L’horizon d’une Union européenne forte, digne et responsable ne peut passer, du reste, que par la mobilisation de tous les démocrates face aux « tribuns de l’extrême ».
Les forces du progrès doivent s’unir pour dénoncer, contrer, défaire la montée des extrémismes de tous les horizons qui, jour après jour, menacent l’avenir de l’Europe et de la démocratie. Ensemble, reconstruisons l’Europe en partant de la base plutôt que du sommet et visons une émancipation par-delà les frontières nationales.
Européens de tous les pays, unissons-nous !
Bâtissons une Europe plus humaine et plus sociale !
Je tiens à remercier Yéléna Matuziak, qui a réalisé un stage dans mon Cabinet, pour certaines idées ou réflexions formulées dans ce texte.
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