Pays-Bas: les élections pourraient remodeler le paysage politique du pays
Le paysage politique des Pays-Bas pourrait être redéfini lors des élections anticipées qui se tiendront mercredi chez nos voisins du nord. Un tout nouveau parti, le Nieuwe Sociaal Contract (NSC) de Pieter Omtzigt ainsi qu’une nouvelle alliance entre verts et sociaux-démocrates constituent les plus gros défis de l’actuel parti du Premier ministre, le VVD. L’enjeu: trouver un successeur à Mark Rutte, qui a annoncé son retrait de la vie politique nationale après treize années en tant que chef du gouvernement, un record aux Pays-Bas.
Le gouvernement Rutte IV, une coalition du parti de centre-droit VVD, des chrétiens-démocrates du CDA, des centristes libéraux du D66 et de la petite formation protestante ChristenUnie, est tombé au début du mois de juillet faute d’accord sur la volonté du VVD de durcir la politique d’asile. Quelques jours plus tard, Mark Rutte annonçait quitter la politique nationale dès qu’un nouveau gouvernement verrait le jour et ne s’est pas représenté aux élections.
Plusieurs cadres ont suivi le chef de gouvernement et ont pris la décision de faire un pas de côté. La majorité des partis se retrouvent donc avec une nouvelle tête de liste pour ces prochaines élections. Celle qui a reçu le plus d’attention est sans nul doute Pieter Omtzigt, dont les pourcentages ont nettement augmenté dans les sondages après l’annonce de son propre parti centriste, le NSC. Pieter Omtzigt s’était déjà fait un nom quand, en tant que député du parti des chrétiens-démocrates, le CDA, il avait dénoncé le scandale des allocations familiales, quand des milliers de parents ont été accusés à tort, dans certains cas après un profilage racial, d’en avoir réclamé frauduleusement.
Cette affaire avait conduit à la démission du gouvernement Rutte III au début de l’année 2021 et le scandale a valu à cet homme politique, auparavant incolore, l’image d’un député compétent et incorruptible. Avec son propre parti, il insiste principalement sur la « bestaanzekerheid », soit « une sécurité sociale » ou « moyens de subsistance », ainsi que sur une nouvelle culture de gouvernance plus transparente.
L’homme politique a néanmoins fait l’objet de nombreuses critiques durant la campagne électorale. En tant que député, il insistait sur l’importance de la transparence, mais son parti, le NSC, est un des seuls à ne pas avoir partagé son programme auprès du bureau du Plan central. On lui reproche également d’avoir été très longtemps discret sur ses éventuelles ambitions de devenir Premier ministre. Puis, sous la pression des autres partis, il a exprimé « sa plus forte préférence pour la Chambre des représentants » environ deux semaines avant les élections.
La ministre de la Justice de la coalition sortante, Dilan Yesilgoz (VVD), avait aussi dénoncé ses « idées conservatrices » sur des questions éthiques, notamment liées à l’euthanasie et l’avortement. Au sein du VVD, Mme Yesilgoz a été désignée comme candidate au poste de Première ministre après le départ de Mark Rutte. Elle deviendrait, le cas échéant, la première femme à occuper le célèbre « Torentje », la résidence du Premier ministre. Ancienne réfugiée, arrivée de Turquie à l’âge de huit ans, elle défend une position ferme sur la limitation du nombre de demandeurs d’asile. Au début de sa carrière, cette fille de syndicaliste a oscillé entre différents partis de gauche avant de rejoindre le parti de centre-droit, le VVD, en dénonçant l’attitude « condescendante » des autres formations.
Autre changement notable pour ces prochaines élections, les partis de gauche GroenLinks et PvdA, partageront une liste. Cette alliance pourrait être un signe avant-coureur d’une fusion entre écologistes et sociaux-démocrates. Avec le membre du PvdA Frans Timmermans, jusqu’à récemment commissaire européen en charge de l’Environnement et du Green Deal, le projet de fusion gagne une tête de liste notable, qui devrait séduire les électeurs socialistes et écologistes. Lors des élections européennes de 2019, le parti socialiste avait atteint un score élevé inattendu, avec Frans Timmermans en tant que « spitzenkandidat », le candidat tête de liste lors des élections européennes.
La coalition des deux partis espère un même effet, ce qui semble peu probable, M. Timmermans ayant affirmé dans différents médias que seul un poste de Premier ministre ou chef de groupe au parlement l’intéressait. Un poste de ministre ne fait pas partie de ses intérêts, selon ses dires. Le jeune parti BoerBurgerBeweging (BBB) était le grand vainqueur des élections provinciales au mois de mars, mais l’entrain semble s’être estompé. Il apparaît toutefois certain que le parti fera mieux que lors des précédentes élections à la Chambre des représentants en mars 2021, où seule la figure de proue du parti, Caroline van der Plas, avait été élue.
Mme van der Plas est à nouveau tête de liste BBB, mais le parti présente l’ancienne membre du CDA Mona Keijzer comme candidate au poste de Première ministre. Par ailleurs, le parti d’extrême-droite, le PVV de Geert Wilders, semble maintenir le statu quo. L’homme politique a adopté une position plus modérée au cours de la campagne et se montre disposé à discuter avec d’autres partis. Dans l’émission « nieuwsuur », il a même déclaré que son point de vue sur l’islam n’était « plus une priorité ». « L’islam ne disparaîtra jamais de notre ADN, mais la priorité est désormais clairement donnée à d’autres questions dans la perspective de la prochaine période de coalition. »
La tête de liste du VDD Dilan Yesilgöz avait affirmé ne pas exclure une collaboration avec le PVV, mais semble entre-temps avoir changé d’avis. Elle dit à présent n’avoir « absolument rien » en commun avec le programme de Geert Wilders. Une douzaine d’autres partis revendiquent un siège à la Chambre basse, mais aucun d’entre eux ne dépasse les dix sièges dans les sondages. Il s’agit notamment des partis au pouvoir CDA (chrétien-démocrate) et D66 (gauche-libéral), deux partis pour lesquels une lourde défaite électorale se présage.
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