Menace d’une France à l’arrêt: mobilisation réussie contre la réforme des retraites
Pour la quatrième fois en moins d’un mois, des centaines de milliers de personnes ont manifesté samedi partout en France contre la réforme des retraites voulue par Emmanuel Macron et les syndicats menacent de mettre le pays « à l’arrêt » si le gouvernement reste inflexible.
Malgré le grand écart des estimations, la mobilisation s’est, quelle que soit la source, avérée en hausse par rapport à la précédente journée d’action mardi: 963.000 personnes dans toute la France, dont 93.000 à Paris, selon le ministère de l’Intérieur; plus de 2,5 millions, dont 500.000 à Paris, selon le syndicat CGT.
Beaucoup de manifestants, qui ne peuvent accumuler les jours de grève, étaient venus défiler en famille. « Je suis là parce que c’est samedi, la semaine ce n’est pas possible », a expliqué dans le cortège lyonnais Marie-Pierre Couvreur, 43 ans, ingénieure, venue avec ses trois enfants pour leur montrer « qu’il faut se défendre ».
« On ne mourra pas au travail »: une banderole déployée dans le défilé parisien semblait résumer l’état d’esprit des manifestants qui rejettent la mesure phare de la réforme: le recul de l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans.
Avant le départ de la manifestation parisienne, les leaders de l’intersyndicale ont confirmé leur appel à deux nouvelles journées de mobilisation, les 16 février et 7 mars, et se sont dit prêts à « durcir le mouvement » et « mettre le pays à l’arrêt » si rien ne bouge.
Dans la foulée, un appel à la grève reconductible à partir du 7 mars a été lancé par l’intersyndicale de la RATP (métro parisien).
Parmi les pancartes dans les défilés, on pouvait lire « Macron, arrête tes calculs, on sait que tu nous plumes » ou « Pour la retraite de la réforme ».
En amont, le patron du syndicat réformiste CFDT, Laurent Berger, avait estimé que « dépasser le million de manifestants, ça serait un beau succès« . Pour encadrer ces foules, 10.000 policiers et gendarmes étaient mobilisés, dont 4.500 dans la capitale, où quelques incidents se sont produits dans l’après-midi, avec notamment une voiture renversée sur la chaussée et incendiée.
Dix personnes ont été interpellées à Paris, selon la préfecture de police, et un gendarme blessé à l’oeil par un jet de projectile a été hospitalisé.
Des heurts entre manifestants et policiers ont également eu lieu en fin de cortège à Rennes (ouest), où 22 personnes ont été interpellées.
Il n’y avait pas de grève à la SNCF ni à la RATP, mais un vol sur deux a été annulé à Orly, en raison d’une grève imprévue de contrôleurs aériens.
Divorce
Les trois précédentes journées d’action avaient réuni entre 757.000 et 1,27 million de personnes selon les autorités (entre près de deux millions et plus de 2,5 millions selon l’intersyndicale), sans infléchir l’exécutif, qui tient bon sur le recul de l’âge légal de départ à 64 ans.
Des propos vendredi d’Emmanuel Macron à Bruxelles, appelant les organisateurs de la contestation à « conserver leur esprit de responsabilité », ont provoqué la colère des syndicats, qui accusent en retour le chef de l’Etat de ne pas « écouter » le pays.
Si le gouvernement ne tient pas compte des demandes des Français sur les retraites, « on aura à l’issue de cette réforme un divorce encore plus prononcé, encore plus inquiétant, entre les Français et ceux qui nous gouvernent », a averti samedi Xavier Bertrand, un responsable des Républicains (LR), le parti de droite sur lequel la majorité présidentielle compte pour faire passer son texte au Parlement.
« Monsieur Macron, s’il compte sur l’usure, se trompe de pays », a jugé pour sa part à Marseille le chef de file de l’opposition de gauche radicale, Jean-Luc Mélenchon.
Actuellement devant les députés, l’examen du texte depuis le début de la semaine n’a donné lieu pour l’instant qu’à des débats répétitifs et des invectives.
La France est l’un des pays européens où l’âge légal de départ à la retraite est le plus bas sans que les systèmes de retraite ne soient complètement comparables.
Le gouvernement a fait le choix d’allonger la durée de travail pour répondre à une dégradation financière des caisses de retraite et à un vieillissement de la population.
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