Le bloc macroniste est menacé par la montée du Rassemblement national (RN, extrême-droite) et de la gauche du Nouveau Front populaire (NFP). © AFP

Législatives françaises: de premiers résultats tombent, que faut-il en retenir?

Des résultats provisoires sur les législatives commencent à paraître dans la presse. S’ils donnent quelques indications sur l’issue du scrutin, leur interprétation doit encore se faire avec précaution.

Pour ces élections législatives, comme pour n’importe quel scrutin français, les médias d’outre-Quiévrain ne dévoileront les résultats du scrutin qu’à 20 heures. Une obligation légale qui ne s’impose toutefois pas à l’étranger. Les médias belges auront donc à nouveau le privilège de publier avant tout le monde un avant-goût du choix des électeurs. Pour l’instant toutefois, seuls les résultats d’Outre-Mer sont disponibles, ainsi que les chiffres de la participation en métropole.

L’indépendantisme au cœur du scrutin dans le Pacifique

Ce sont d’abord les résultats en Outre-mer qui ont été dévoilés. Leur signification est particulière, parce que le contexte est très différent de celui de la métropole, avec des enjeux locaux très marqués. En atteste le cas de la Nouvelle-Calédonie, où l’opposition entre indépendantistes et loyalistes se ressent fortement dans les urnes. Dans la première circonscription (celle de Nouméa), le député loyaliste Nicolas Metzdorf arrive en tête avec 39,81%, contre 36,34% pour la candidate indépendantiste Omayra Naisseline. Le premier a des chances de l’emporter au second tour si les votes du non-indépendantiste modéré Philippe Dunoyer (10,33%, éliminé) se reportent sur lui. Dans la seconde circonscription (celle des îles Loyauté), l’indépendantiste Emmanuel Tjibaou arrive en tête avec 44,06%, devant le non-indépendantiste Alcide Ponga (36,18%). Si M. Tjibaou l’emporte dimanche prochain, il deviendra le deuxième député indépendantiste de l’histoire de la Nouvelle-Calédonie (après Rock Pidjot, élu en 1978).

En Polynésie française aussi, l’idée de s’éloigner de Paris constitue un enjeu essentiel. C’est ainsi que le premier député de cette nouvelle législature a été élu dans la première circonscription ces îles du Pacifique (celle de Papeete): Moerani Frebault, un autonomiste de centre-droit qui a obtenu 54% des voix. Il s’agit du tout premier natif des îles Marquises à entrer à l’Assemblée nationale. Les indépendantistes sont toutefois à la traîne, comme le montre le résultat de la deuxième circonscription, où l’autonomiste Nicole Sanquer frôle l’élection dès le premier tour avec 49% contre 42,1% pour l’indépendantiste Steve Chailloux. Il se trouve en position favorable pour être élu dimanche prochain. Dans la troisième circonscription, l’indépendantiste Mereana Reid Arbelot arrive légèrement en tête, avec 42,7% contre 41% pour son opposante Pascale Haiti-Flosse. Le report des voix de l’autonomiste Naumi Mihuraa (11%) déterminera l’issue du scrutin.

En Amérique, le NFP souvent favori

Ailleurs en Outre-Mer, l’indépendantisme n’est pas à l’ordre du jour. Les enjeux sont donc plus proches de ceux de la métropole, mais les préoccupations locales sont ne sont pas absentes pour autant. En Guadeloupe, le second tour verra ainsi des duels avec des régionalistes dans deux des quatre circonscriptions. Se sont également qualifiés plusieurs candidats du Nouveau Front populaire (NFP, gauche), une candidate de la majorité présidentielle, et, petite nouveauté, deux candidats du Rassemblement national (RN). Cette percée de l’extrême-droite est donc significative mais reste contenue, puisqu’ils sont largement devancés par leurs concurrents.

Le cas de la Martinique est assez semblable. Un candidat RN arrive ainsi à se qualifier pour dimanche prochain dans une des quatre circonscriptions mais son score, de seulement 9,88%, laisse présager qu’il ne sera pas élu. L’extrême-droite confirme donc une petite percée, mais peut-être pas aussi forte qu’elle aurait pu l’espérer. Par contre, le NFP est ici présent partout pour le second tour, souvent en position de gagner, sauf dans la troisième circonscription (Fort-de-France) où le député sortant autonomiste Johnny Hajjar arrive en tête.

En Guyane, terre de gauche, les députés sortants du NFP arrivent encore plus largement en tête avec 62,78% et 60,21%. Ils ne sont toutefois pas élus directement puisqu’ils ne représentent pas plus de 25% des inscrits. Leur victoire au second tour est toutefois probable face à des candidats sans étiquette.

En métropole, un bond de la participation mais des conclusions incertaines

Pour la métropole, les médias belges vont pouvoir donner de premières indications avant 20 heures. Mais pour le moment, seuls les chiffres de la participation sont disponibles. À 17h, celle-ci était en forte augmentation, à 59,39%. En 2022, elle était 20 points en-dessous à la même heure. C’est un record depuis des décennies.

À quel camp politique cela pourrait-il profiter? Difficile à le dire, ont conclu des médias comme Les Echos et France Bleu. Les électeurs de chaque bloc pourraient s’être davantage mobilisés pour diverses raisons. Ceux du RN pourraient croire à leur première victoire à l’Assemblée nationale. La gauche, unie pour la première fois derrière le NFP, voudrait faire barrage à l’extrême-droite. Quant à ceux fidèles au président, il s’agirait d’éviter la polarisation du pays entre deux camps très opposés.

La hausse de la participation pourrait aussi refléter le fait que pour la première fois depuis 1997, les législatives n’ont pas lieu juste après la présidentielle. Les électeurs ne seraient donc pas découragés par une élection qui prend d’habitude des allures de confirmation du scrutin présidentiel. Au contraire, il s’agit plutôt ici d’une élection de mi-mandat, semblable à celle qui a lieu aux Etats-Unis.

Précision importante toutefois: la hausse de la participation est particulièrement marquée dans des départements du sud de la France, comme l’Aveyron, et en Bretagne, où se trouvent des «swing-circos». En d’autres mots, il s’agit de circonscriptions qui peuvent facilement basculer dans un camp politique ou dans l’autre. Les résultats seront donc particulièrement intéressantes à scruter dans ces régions, qui sont souvent historiquement plutôt à gauche ou au centre-gauche.

Quoi qu’il arrive, la hausse de la participation devrait augmenter le nombre de candidats qualifiés pour le second tour. Il faut en effet recueillir 12,5% des voix des inscrits (et non seulement des votants) pour éviter d’être éliminé. Avec une forte participation, cette limite est plus facile à atteindre. Il pourrait donc y avoir jusqu’à 300 triangulaires (duels à trois candidats) selon Ipsos, voire quelques quadrangulaires (avec quatre candidats). L’enjeu sera alors de voir si des désistements ont lieu entre NFP et bloc macroniste pour que l’un ou l’autre camp l’emporte face au RN.

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