Emplois fictifs: François Fillon condamné à cinq ans de prison dont deux ferme
L’ancien Premier ministre français, François Fillon, et son épouse sont jugés coupables dans une affaire d’emplois fictifs. Le couple a décidé de faire appel de sa condamnation.
L’ancien Premier ministre français François Fillon a été condamné lundi à Paris à cinq ans de prison dont deux ferme dans une retentissante affaire d’emplois fictifs qui avait fait dérailler sa campagne présidentielle en 2017.
Le tribunal correctionnel, qui n’a pas prononcé de mandat de dépôt, a assorti cette condamnation d’une amende de 375.000 euros et d’une peine d’inéligibilité de dix ans. Son épouse Penelope a été condamnée à trois ans de prison avec sursis et 375.000 euros d’amende et à deux ans d’inéligibilité.
Les époux Fillon et leur co-prévenu Marc Joulaud, l’ancien suppléant de François Fillon dans le département de la Sarthe (ouest), dont il était député, ont été en outre condamnés à rembourser plus d’un million d’euros à l’Assemblée nationale.
Le couple fait appel
Les époux Fillon ont fait savoir qu’ils faisaient appel de cette condamnation. « Cette décision, qui n’est pas juste, va être frappée d’appel, (…), il y aura un nouveau procès« , a annoncé devant la presse Antonin Lévy, l’avocat de François Fillon. Le jugement a été prononcé en dépit des demandes de la défense de rouvrir les débats, arguant de « pressions » sur l’enquête.
La semaine dernière, la défense de l’ancien champion de la droite qui dénonce depuis trois ans une enquête « à charge », menée en pleine campagne présidentielle, avait demandé la réouverture du procès après des déclarations sur des « pressions » au cours de l’enquête.
Le 10 juin dernier, l’ancienne cheffe du parquet national financier (PNF) Eliane Houlette, aujourd’hui retraitée, s’était émue devant une commission parlementaire du « contrôle très étroit » qu’aurait exercé le parquet général, son autorité de tutelle directe, dans la conduite des investigations lancées en pleine campagne présidentielle de 2017. En France, le parquet est placé sous l’autorité du pouvoir politique par le biais du ministère de la Justice, qui lui délivre des instructions de politique pénale mais a interdiction de lui en donner dans des dossiers individuels.
Ce que décrit Mme Houlette, notamment des demandes pressantes de remontées d’informations, n’a rien d’illégal mais a relancé dans le clan Fillon les accusations d’instrumentalisation de la justice.
Donné favori à la présidentielle, le chantre de la droite conservatrice avait finalement été éliminé au premier tour, après une campagne minée par cette affaire révélée par l’hebdomadaire le Canard Enchaîné. A 66 ans, François Fillon, désormais retraité de la politique, s’est reconverti dans la finance.
Le 10 mars, le PNF avait dénoncé le « profond sentiment d’impunité » de celui qui avait « fait de la probité une marque de fabrique » et requis contre lui cinq ans de prison, dont deux ferme, 375.000 euros d’amende et dix ans d’inéligibilité.
Le « Penelopegate »
Au coeur du procès figuraient les soupçons de détournement de fonds publics entourant les emplois de collaboratrice parlementaire de Penelope Fillon, poursuivie pour des « prestations fictives ou surévaluées ». Ses activités dans la Sarthe auprès de son mari député et de son suppléant, méritaient-elles d’être rémunérées dans le cadre de contrats d’assistante parlementaire? Entre 1998 et 2013, la discrète Galloise de 64 ans a perçu au total 613.000 euros nets au titre de contrats connus seulement de quelques proches.
Les Fillon, dont les avocats ont plaidé la relaxe, ont décrit des tâches certes majoritairement orales (être « les yeux et les oreilles » du député, « donneuse d’ordres » pour le courrier arrivé à leur manoir sarthois…) mais indispensables, selon eux, à la carrière de l’homme politique. François Fillon s’est évertué à expliquer que le travail de collaborateur est d’autant plus varié lorsque celui-ci est le conjoint, pratique désormais interdite. L’accusation estime au contraire que le tout relève « davantage du rôle social d’un conjoint d’élu » que d’un réel emploi d’assistant parlementaire, lequel est donc « fictif ».
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