Cent ans après le massacre raciste de Tulsa, des rescapés témoignent
« J’ai tant attendu pour que justice soit rendue »: trois centenaires survivants d’un massacre d’Afro-Américains perpétré en 1921 à Tulsa, aux Etats-Unis, ont livré mercredi leurs extraordinaires témoignages en demandant que le Congrès reconnaisse enfin leur douloureuse histoire, aux conséquences toujours tenaces aujourd’hui.
« Je revis le massacre tous les jours. » A 107 ans, Viola Fletcher s’est rendue à Washington pour la première fois afin de partager ses souvenirs poignants devant la commission judiciaire de la Chambre des représentants.
« Je n’oublierai jamais la violence de la foule hargneuse de Blancs lorsque nous avons quitté la maison. Je vois encore des hommes noirs se faire tirer dessus et les corps noirs gisant au sol dans la rue. Je sens encore la fumée et je vois le feu. Je vois encore les commerces noirs être incendiés. J’entends encore les avions nous survoler. J’entends les cris », a-t-elle raconté d’une voix claire.
Encore beaucoup d’Américains ignorent ce qu’il s’est passé à partir du soir du 31 mai 1921 à Tulsa, dans l’Etat de l’Oklahoma, lorsqu’une foule d’hommes blancs s’est attaquée au quartier afro-américain prospère de Greenwood, alors surnommé le « Wall Street noir ».
Je n’oublierai jamais la violence de la foule hargneuse de Blancs lorsque nous avons quitté la maison.
On ne connaîtra jamais le bilan définitif mais les historiens estiment qu’entre 75 et 100 personnes ont péri dans les violences, voire jusqu’à 300 Afro-Américains.
Plus de 1.200 bâtiments avaient été détruits, les commerces des habitants noirs pillés et brûlés. Les témoins ont même parlé d’avions manoeuvrés par des pilotes blancs larguant des bombes incendiaires.
C’est un fait divers qui aurait mis le feu aux poudres, lorsqu’un jeune cireur de chaussures noir fut accusé d’avoir agressé une jeune femme blanche. Le chaos durera 24 heures, jusqu’à l’arrivée à Tulsa de la Garde nationale… dont l’une des premières mesures fut d’interner dans trois camps les quelque 6.000 rescapés noirs.
Et les survivants en paient encore les conséquences. « J’ai vécu la plupart de ma vie dans la pauvreté », a confié Lessie Benningfield Randle, 106 ans, qui témoignait par visioconférence. « J’ai tant attendu pour que justice soit rendue. »
« S’il vous plaît, ne me laissez pas quitter cette terre sans que justice soit faite », a aussi lancé d’une voix fragile aux parlementaires Hughes Van Ellis, petit frère de Viola, âgé lui de 100 ans.
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