Brésil: Lula, les chefs du Congrès et de la Cour suprême condamnent « les actes terroristes »

Le président brésilien Lula, les chefs du Congrès et de la Cour suprême ont condamné lundi « les actes terroristes » de Brasilia la veille dans une déclaration commune « en défense de la démocratie » publiée sur le compte Twitter du chef de l’Etat de gauche.

« Les Pouvoirs de la République, garants de la démocratie et de la Constitution de 1988 rejettent les actes terroristes, de vandalisme, criminels et putschistes qui se sont produits hier à Brasilia », dit la déclaration signée par Lula et les présidents du Sénat, de la Chambre des députés et de la Cour suprême, au lendemain des assauts simultanés de bolsonaristes contre les bâtiments de ces institutions.

Quelque 1.200 partisans de l’ancien président brésilien d’extrême droite, Jair Bolsonaro, ont été interpellés. « Les putschistes qui ont promu la destruction des propriétés publiques à Brasilia sont en train d’être identifiés et seront punis. Demain nous reprenons le travail au palais de Planalto. Démocratie toujours », a tweeté le président de gauche, qui a inspecté les bâtiments saccagés à son retour à Brasilia tard dimanche soir.

Une véritable marée humaine de manifestants vêtus de jaune et vert a pris d’assaut et saccagé, dimanche, les principaux lieux de pouvoir du pays à Brasilia. Les forces de l’ordre ont été complètement débordées, a constaté l’AFP, des images impressionnantes qui rappellent l’invasion du Capitole à Washington par des partisans de l’ex-président Donald Trump, en janvier 2021.

   Sur la rampe du palais de Planalto, où Luiz Inacio Lula da Silva a reçu l’écharpe présidentielle dimanche dernier, des policiers à cheval tentaient tant bien que mal de déloger les manifestants. Au milieu de la place des Trois pouvoirs, où se côtoient le Congrès, le palais présidentiel et la Cour suprême, un agent de la police montée a été désarçonné puis frappé à terre par des assaillants armés de bâtons. Des grenades assourdissantes ont été lancées par les forces de l’ordre depuis un hélicoptère sur les manifestants qui occupaient le toit du Congrès.

   Sur les réseaux sociaux, on peut voir des vidéos montrant des bureaux de parlementaires saccagés ou des manifestants debout sur les sièges de l’hémicycle au Sénat. L’un d’eux s’est assis sur le siège du président de la Chambre haute, un mimétisme saisissant avec les manifestants pro-Trump au Congrès américain il y a deux ans.

   Les dégâts semblent considérables, dans ces bâtiments qui sont des trésors de l’architecture moderne et regorgent d’oeuvres d’art. Selon la chaîne CNN, des manifestants ont mis le feu au tapis d’un salon du Congrès, qui a dû être inondé pour éteindre l’incendie. La zone près de la Place des trois pouvoirs avait été pourtant bouclée par les autorités, mais les bolsonaristes sont parvenus à rompre les cordons de sécurité. Les policiers ont tenté, en vain, de les repousser avec du gaz lacrymogène.

   « Cette tentative absurde d’imposer une volonté par la force ne va pas prévaloir. Le gouvernement du District fédéral (de Brasilia) va envoyer des renforts et les forces dont nous disposons sont en train d’agir », a déclaré sur Twitter Flavio Dino, ministre de la Justice et de la Sécurité publique. Samedi, M. Dino avait autorisé le déploiement d’agents de la Force Nationale, une force spéciale de police parfois envoyée dans les différents Etats en cas de menace contre la loi et l’ordre.

   Le président du Sénat, Rodrigo Pacheco, a dit sur Twitter « rejeter avec véhémence cette manifestation antidémocratique, qui doit être punie par la rigueur de la loi ». Un syndicat de presse local a fait état de l’agression de cinq journalistes. Parmi eux, un photographe de l’AFP a été frappé et s’est fait voler tout son matériel.« Il faut qu’on rétablisse l’ordre, après cette élection frauduleuse », a dit à un journaliste de l’AFP présent sur place Sarah Lima, ingénieure pro-bolsonaro de 27 ans venue de Goianesia, à 300 km de Brasilia.

La police reprend le contrôle

La police a évacué le Congrès brésilien, la Cour suprême et le palais présidentiel à Brasilia, plus de quatre heures après l’assaut donné dimanche par des centaines de partisans de l’ex-président d’extrême droite Jair Bolsonaro, rappelant l’invasion du Capitole à Washington en janvier 2021.

La situation semblait maîtrisée, même si un grand nombre de ces manifestants refusant de reconnaître l’élection de Lula demeuraient dans les alentours des lieux de pouvoir de la capitale brésilienne.

Selon plusieurs médias brésiliens, au moins 150 bolsonaristes, vêtus en jaune et vert, ont été arrêtés. Des images télévisées les montraient descendant en file indienne, les mains derrière le dos, la rampe du palais présidentiel de Planalto, encadrés de policiers. Sur d’autres images, on peut voir un bus rempli de manifestants interpellés partir en direction d’un poste de police. Le centre du pouvoir à Brasilia a été plongé dans le chaos. La zone avait été pourtant bouclée par les autorités mais les bolsonaristes sont parvenus à rompre les cordons de sécurité.

Lula constate les dégâts

Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva est rentré dimanche soir à Brasilia pour constater les énormes dégâts dans le Palais présidentiel saccagé par des partisans de son prédécesseur Jair Bolsonaro, qui a condamné sans fermeté cette invasion rappelant beaucoup celle du Capitole à Washington il y a deux ans.

Lula, qui avait passé l’après-midi à Araquara, dans l’Etat de Sao Paulo (sud-est), sinistré par des inondations, s’est rendu au Palais présidentiel, puis à la Cour suprême, elle aussi envahie et saccagée par des bolsonaristes, tout comme le Congrès. Des images de TV Globo le montrent en discussion tard dans la soirée avec des juges de la Cour suprême, devant le bâtiment aux vitres brisées par ceux qui refusent toujours d’accepter son retour au pouvoir.

Jair Bolsonaro, lui, se trouve aux Etats-Unis, où il est parti deux jours avant l’investiture de Lula, se refusant à remettre l’écharpe présidentielle à celui qui l’a défait d’une courte tête et qu’il n’a jamais félicité. « Les manifestations pacifiques, conformes à la loi, font partie de la démocratie. Cependant, les déprédations et invasions de bâtiments publics (…) sont contraires à la règle« , a tweeté l’ex-président d’extrême droite. Dans un autre message, il a cependant « rejeté les accusations, sans preuve » de son successeur. Lula a déclaré que le « discours » de son prédécesseur d’extrême droite avait « encouragé » les « vandales fascistes » ayant envahi le palais présidentiel, la Cour suprême et le Congrès à Brasilia.

En fonction depuis seulement une semaine et déjà confronté à une crise majeure, le président de gauche a déploré des événements « sans précédent dans l’histoire du Brésil ». Le chef de l’Etat a placé les forces de l’ordre locales sous le commandement des forces fédérales pour reprendre en main la sécurité à Brasilia où les policiers ont été totalement débordés par les assauts des bolsonaristes.

Son ministre de la Justice et de la Sécurité publique, Flavio Dino, a assuré tard dimanche en conférence de presse que les lieux de pouvoir avaient été totalement évacués et que plus de 200 personnes arrêtées. « Ils ne parviendront pas à détruire la démocratie », a-t-il lancé, qualifiant les invasions de « terrorisme putchiste ».

Hadja Lahib: La démocratie ne doit jamais être considérée comme acquise

   « Consternée par la violence à Brasilia, rappelant l’assaut du Capitole il y a deux ans », a réagi la ministre belge des Affaires étrangères, Hadja Lahbib, sur Twitter. « Nous appelons au respect du résultat des élections démocratiques, ainsi que des institutions qui les symbolisent et de l’État de droit. La démocratie ne doit jamais être considérée comme acquise. »

   Le président américain Joe Biden a jugé « scandaleuses » les violences des manifestants bolsonaristes, dans une réaction directe lors d’un déplacement au Texas, avant une visite au Mexique. Auparavant la Maison Blanche avait déclaré que les États-Unis condamnaient « toute tentative d’ébranler la démocratie au Brésil ». Le président Biden « suit la situation de près et notre soutien aux institutions démocratiques du Brésil est inébranlable », a ajouté dans un tweet Jake Sullivan, conseiller de la Maison Blanche.

   Le président du Conseil européen Charles Michel a exprimé sur Twitter sa « condamnation absolue » de cet assaut et son « soutien total au président Lula da Silva, démocratiquement élu par des millions de Brésiliens à l’issue d’élections équitables et libres ». Même soutien exprimé par le chef de la diplomatie de l’UE, Josep Borrell, qui s’est dit « consterné » par les actes d' »extrémistes violents ». « La démocratie brésilienne l’emportera sur la violence et l’extrémisme », a-t-il tweeté. La présidente du Parlement européen Roberta Metsola s’est dite « profondément préoccupée« . « La démocratie doit toujours être respectée », a-t-elle tweeté en portugais, ajoutant que le Parlement européen était « aux côtés » de Lula « et de toutes les institutions légitimes et démocratiquement élues ».

   « La volonté du peuple brésilien et les institutions démocratiques doivent être respectées! Le président Lula peut compter sur le soutien indéfectible de la France« , a tweeté le président français Emmanuel Macron, en français et en portugais.

Contenu partenaire