Boycotter la Coupe du monde au Qatar? «Une opportunité de faire aboutir des réformes»
Pour le président fraîchement élu de l’Union belge, Paul Van den Bulck, la désignation du Qatar comme pays organisateur était une erreur. Il plaide pour une participation «engagée» des fédérations de football plutôt que de tourner le dos aux travailleurs.
Quelle est la position de l’URBSFA concernant les scandales qui entachent l’organisation de la Coupe?
Elle est assez claire: la décision d’organiser l’événement au Qatar n’est pas positive. Il aurait mieux valu ne pas la prendre. Cela dit, après concertation avec les organismes compétents en matière de droits humains, tels qu’Amnesty International, les syndicats et l’Organisation internationale du travail – et en raison de la fonction que nous occupons en tant que fédération faisant partie de l’Uefa et de la Fifa – nous sommes arrivés à la conclusion qu’il était préférable d’y participer mais d’utiliser le fait que le Qatar ait été choisi pour réformer certaines choses en interne. Ce qui est, je pense, une approche plus positive que de tourner le dos et de couper tout dialogue. Nous avons d’ailleurs remarqué que, comparativement aux autres pays du Golfe, le Qatar est celui qui a fait le plus de progrès dans la région sur les questions de droits humains, de droit du travail, etc. Depuis mai 2021, nous participons, avec l’Uefa, d’autres fédérations nationales, des ONG et des représentants qataris comme le ministère du Travail, à des groupes de travail. En 2020, une première réforme a abouti. Elle concerne l’abrogation de plusieurs pans de la loi «kafala» (NDLR: système de mise sous tutelle), laquelle n’est en effet pas très respectueuse du droit des travailleurs. Résultat: depuis 2020, 240 000 d’entre eux ont pu changer de travail, contre 18 000 avant l’abrogation des dispositions.
On compte aussi 338 entreprises fermées pour non-conformité à la législation et 280 000 travailleurs qui ont perçu une augmentation salariale au-delà du salaire minimum. Lors de la dernière réunion, en juin, le groupe qui représente les travailleurs migrants au Qatar nous a remerciés de ne pas avoir boycotté le tournoi. Le faire, ça aurait été comme abandonner les travailleurs derrière les lignes. Par ailleurs, il faut aussi être réaliste: en tant que président de la fédération, mon rôle n’est pas de faire de l’activisme pur mais d’essayer de changer les choses de l’intérieur. Si on obtient 90%, 80%… voire même 50% de ce qu’on souhaite, je serai déjà très heureux car nous aurons apporté quelque chose de positif pour des êtres humains.
En tant que président de la fédération, mon rôle n’est pas de faire de l’activisme pur.
Etes-vous également satisfait des promesses émises en ce qui concerne les droits des personnes LGBTQI+?
La position du Qatar semble plus nuancée que ce qui est relayé dans la presse à propos de la culture du pays. Fin juin, nous avons obtenu de la part des autorités la garantie que tout le monde sera accueilli, indépendamment de son orientation sexuelle. Ce dont les Qataris ne veulent pas, c’est que des personnes quelles qu’elles soient adoptent des comportements provocants devant des lieux symboliques, notamment les lieux de culte.
Tant à l’échelle de la Fifa, du Qatar que de nous-mêmes en tant que fédération, des engagements ont été pris sur le long terme, au moins jusqu’en 2030. Une visite a déjà été programmée pour l’après-tournoi, car la diplomatie implique également un certain suivi pour obtenir la garantie que les choses ne s’arrêtent pas à la fin de l’événement, y compris d’ailleurs sur le plan de la durabilité des constructions. En général, les bâtiments qui ont été construits ont reçu les meilleures certifications en matière de durabilité.
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