Drieu Godefridi
Boris Johnson, plus grand bouffon de l’histoire anglaise ?
Je participais hier à un déjeuner organisé à la chambre des Lords, avec la crème de ce que l’on pourrait appeler l’intelligentsia anglaise libérale et/ou de droite. Étaient entre autres présents Lord Finkelstein et le talentueux Douglas Murray.
Je fus extrêmement frappé du diagnostic général, quasiment sur le ton de la résignation : il est désormais probable que Jeremy Corbyn, « leader » de l’opposition travailliste, soit le prochain Premier ministre de Grande-Bretagne.
Corbyn n’est pas seulement un travailliste, un homme de gauche, un socialiste : c’est un communiste tendance Trotski, dont les idées n’ont pas varié d’un iota depuis la Guerre froide, qui considère que le capitalisme est le Mal absolu, que le capitalisme n’a jamais sorti personne de la pauvreté, et qu’il faut donc s’en débarrasser dans l’intérêt de l’humanité comme de la planète (on retrouve désormais cette « touche » environnementalisme dans toute la gauche et l’extrême gauche). Corbyn salue les réalisations de l’URSS, considère que le régime de Mao fut profitable aux Chinois, que le chavisme au Venezuela est un succès et il n’a jamais eu un mot pour dénoncer les massacres, les camps, l’abolition de la liberté et l’extermination de populations par les régimes communistes du XXe siècle. Rappelons que les historiens s’accordent aujourd’hui pour considérer que le communisme a causé la mort de cent millions d’enfants, de femmes et d’hommes.
L’Europe entière passe à droite, mais le berceau de la démocratie parlementaire et du capitalisme s’apprête à élire un communiste : comment une telle chose est-elle possible ?
Bien sûr, il y a une conjonction de facteurs, structurels et conjoncturels. Ma thèse est qu’un facteur domine tous les autres, et ce facteur est un homme : Boris Johnson, l’actuel ministre britannique des Affaires étrangères. Voilà un homme doué, sympathique, il a vécu à Bruxelles, parle le français, a des origines multiples, est un écrivain de grand talent — il a publié une biographie savoureuse de Churchill, auquel il s’identifie volontiers — et mena une formidable campagne en faveur du Brexit, dont le triomphe inattendu le conduisait tout droit et de droit, de l’avis général, au 10, Downing Street.
Las ! Avant même de faire campagne, Boris se défila. Il réunit à la hâte une conférence de presse pour annoncer benoîtement qu’il ne serait pas celui qui conduirait l’Angleterre vers le Brexit, et de se prononcer pour la candidature de la fade et sans réelle conviction Theresa May.
Or, May, qui a le mérite elle de ne pas s’être défilée, n’est pas à la hauteur de la tâche. D’abord elle était défavorable au Brexit, ce qui la mettait de guingois face à sa mission. Ensuite elle n’y arrive tout simplement pas. À ce jour, près de deux ans après le vote du Brexit (!) nul partenaire européen ne connaît la position de la Grande-Bretagne sur les modalités du Brexit, et ce matin encore — nous sommes le 22 février — la presse britannique constate qu’il n’existe aucune position commune au sein même du gouvernement de Madame May !
Les Anglais ne sont pas stupides, ils ne se laissent pas abuser par le verbiage de leur gouvernement, et comprennent parfaitement que leurs ministres — dont l’ineffable Boris Johnson, toujours présent, mais aux Affaires étrangères — sont perdus, incapables de s’entendre entre eux sur ne serait-ce qu’une position commune de négociation. Déjà, May avait provoqué des élections anticipées, pour « renforcer » sa position — dont la substance sur le Brexit n’est connue de personne, sans doute pas non plus d’elle-même — des élections qu’elle n’a remportées que de justesse, face à cette résurgence des années 70 nommée Corbyn.
Comment imaginer que les Tories pourraient remporter les prochaines élections, a fortiori si leur beau gouvernement devait une nouvelle fois les provoquer de façon anticipée, comme une technique de résolution de ses propres contradictions ?
Et c’est ainsi que le pouvoir britannique s’offre désormais au communiste-trotskiste Corbyn, l’égal sur le plan des idées de Mélenchon, conseillé par une brochette d’extrémistes tels que Thomas Piketty, Monsieur « confiscation ».
On gomme souvent le rôle des grands hommes dans le cours de l’histoire. N’était Churchill, l’Angleterre aurait plus que probablement pactisé avec Hitler. Boris Johnson avait rendez-vous avec l’histoire. En se défilant comme un lâche, il a enclenché un mécanisme diabolique qui risque fort de broyer les dernières illusions du peuple anglais.
Mon pari est que Boris Johnson restera comme l’un des plus grands bouffons de l’histoire d’Angleterre.
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