Assistance humanitaire, déminage, reconstruction: le lourd tribut de multiples conflits
Pour Andrea Trevisan, directeur des programmes de Handicap International en Irak entre 2019 et 2021, les besoins sont énormes entre l’assistance humanitaire, le déminage et la reconstruction.
Quels sont les principaux défis de l’assistance humanitaire, aujourd’hui en Irak?
Cinq ans après les opérations militaires visant à récupérer les territoires conquis par Daech, l’Irak tente de se relever. Le pays est confronté au défi de la reconstruction. Dans la partie occidentale de la grande ville de Mossoul, 70% des habitations ont été détruites. Ces destructions et les risques liés à la présence d’engins explosifs empêchent de nombreux habitants de rentrer chez eux. Il y aurait encore 1,3 million de déplacés en Irak. De surcroît, les services sanitaires dans les territoires qui ont été récemment libérés ne sont pas en mesure d’assurer la prise en charge complète des blessés et des malades. On est encore dans l’urgence humanitaire. Mais le défi le plus grand réside dans le déminage. La quantité d’explosifs présents est énorme. Cela s’explique par la succession de conflits qui ont touché l’Irak, la guerre avec l’Iran entre 1980 et 1988, la guerre du Golfe de 1991, et celle de 2003 et les opérations militaires plus récentes contre l’Etat islamique. Les restes d’explosifs de guerre font encore plusieurs centaines de blessés par an. Et une véritable reconstruction ne peut être menée sans dépollution sûre et efficace de tout ce matériel.
On n’a pas eu droit à une grande conférence internationale sur l’Irak et sa reconstruction. »
Andrea Trevisan, directeur des programmes de Handicap International en Irak, de juin 2019 à juin 2021.
A-t-on une estimation de l’ampleur du chantier?
On ne dispose pas de chiffres précis. Mais l’Irak est le pays qui connaît la plus large contamination d’explosifs au monde à cause de l’étendue géographique des conflits, sur plusieurs provinces, et leur durée dans le temps. C’est ainsi que l’on trouve encore, à la frontière avec l’Iran, des mines antipersonnel posées lors de la guerre des années 1980 entre les deux pays.
Un certain désintérêt n’a-t-il pas gagné la communauté internationale vu l’étendue dans le temps du besoin d’assistance?
La réponse humanitaire a été très présente lors du pic de la crise des déplacés provoquée par l’occupation d’une vaste partie de l’Irak par Daech. Mais il est vrai que l’intérêt de la communauté internationale s’amenuise en fur et à mesure que le pays prend le chemin d’une certaine normalisation. Les défis de la reconstruction, à long terme, sont sous-estimés. La crise de la Covid a sans doute rendu plus compliquée la transition entre la phase de l’urgence humanitaire et celle du début de la reconstruction. On n’a pas eu droit, par exemple, à une grande conférence sur l’Irak et sa reconstruction. Dès lors, la coordination entre grands donateurs n’est pas idéale. Le moment est venu d’assurer un engagement de long terme avec des instruments pour à la fois soutenir ceux qui sont encore très dépendants de l’aide humanitaire, les déplacés, les victimes du conflit etc., et à la fois engager les efforts nécessaires pour la reconstruction.
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