Gérald Papy
Après l’horreur, trois enseignements de l’attentat de Nice
L' »économie de moyens » de l’effroyable attaque de la promenade des Anglais cache une vraie sophistication. La France est la cible prioritaire des djihadistes. Il n’y a pas de parade absolue face au djihadisme. Mais en fait-on assez pour se protéger ?
L’attentat de Nice est effroyable par son bilan (84 morts) et par son modus operandi. Perpétré le soir du 14 juillet quelques jours après la fin de l’Euro 2016 organisé en France, il appelle trois premiers enseignements.
Une machine infernale. L’enquête devra déterminer l’éventuel réseau qui se cache derrière le chauffeur du camion qui a fauché la vie de tant de personnes. Mais si la nature islamiste de l’acte est confirmée, cette attaque serait une nouvelle concrétisation de la théorie de l’idéologue de l’Etat islamique, Abou Moussab al-Souri. Il prône de s’en prendre à l’Europe, ventre mou de l’Occident, en appelant tous les musulmans radicalisés à tuer le plus grand nombre sans nécessairement dépendre d’une hiérarchie djihadiste structurée. La relative économie de moyens qui a permis l’attentat de Nice révélerait en fait une certaine forme de sophistication. L’attentat a été commis quelques jours seulement après la fin de l’Euro 2016 qui avait suscité les pires craintes en terme de sécurité et qui avait mobilisé énormément de forces de l’ordre avec succès. Il n’empêche, l’attentat a été commis dans une ville hôte de l’Euro, Nice, en province, donc loin du théâtre parisien frappé en 2015, et en un jour particulièrement symbolique pour les Français, le soir de leur fête nationale dans un lieu, la promenade des Anglais, éminemment touristique.
La haine de la France. Nice après Paris, le 13 novembre 2015, et Paris, le 7 janvier 2015 : la France est incontestablement la cible prioritaire des djihadistes. Pourquoi ? Plusieurs facteurs l’expliquent : la proximité du champ de bataille irako-syrien, la présence massive de ressortissants français issus de la forte communauté musulmane de l’Hexagone dans les rangs des alliés étrangers de l’Hexagone, l’engagement de Paris au sein de la coalition militaire qui combat Daech en Syrie et en Irak, plus généralement, la politique étrangère française et ses développements au Mali et en Libye…
Une protection de tous les instants. Dans la prévention des actes de terrorisme, les services de renseignements sont en première ligne et jouent un rôle crucial. L’individualisation des attaques des djihadistes, sans nécessairement avoir affaire à des « loups solitaires », complique considérablement les missions de surveillance. Face à de tels actes, il n’y sans doute pas de parade absolue. Mais on peut tout de même se demander à certains moments si on n’a pas assez vite oublié les leçons des attentats précédents, à Madrid, Londres, Paris ou Bruxelles. Que l’on puisse aujourd’hui pénétrer dans un grand centre commercial bruxellois sans rencontrer le moindre policier ou militaire et sans subir le moindre contrôle interroge sur une certaine inconscience des autorités. Tant que l’Etat islamique ne sera pas neutralisé dans son foyer irako-syrien et que le contrôle de ses adeptes dans le monde ne sera pas mieux maîtrisé, il faudra sans doute se résoudre à vivre un peu à l’israélienne. En sachant que la haine de l’Occident et de la démocratie peut vous rattraper au coin de la rue.
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