Apartheid: des pionniers de la lutte, 30 ans après la fin de la ségrégation raciale
Trente ans après l’abolition officielle, à la fin du mois de juin 1991, des lois de ségrégation raciale systématisée par l’apartheid, des pionniers de la lutte pour la libération sont toujours debout en Afrique du Sud.
Michael Kitso Dingake, 93 ans
Fervent militant du parti historique, le Congrès national africain (ANC), il était d’abord venu en Afrique du Sud du Botswana, au début des années 1940, pour étudier.
« Il y avait de la ségrégation partout. J’ai décidé que cela devait prendre fin, que je devais jouer mon rôle », raconte-t-il.
Emprisonné pendant 15 ans au pénitencier de Robben Island pour sabotage, il a été libéré en 1981. L’ANC, qui avait adopté des méthodes non violentes, a opté pour la lutte armée après être entré en clandestinité.
Auteur de plusieurs ouvrages sur son combat, il estime aujourd’hui que « les attitudes raciales n’ont pas tout à fait changé, il y a encore des blancs qui considèrent les noirs comme inférieurs ».
Mac Maharaj, 86 ans
Il a été ministre de Nelson Mandela et plus tard, porte-parole de l’ex-président Jacob Zuma.
Arrêté en juin 1964, il est poursuivi avec cinq autres personnes pour 177 accusations de sabotage et emprisonné pendant 12 ans à Robben Island.
À sa libération, il fait sortir clandestinement l’autobiographie de Mandela, « Un long chemin vers la liberté ». Dans l’avant-propos, l’icône de la libération le décrit comme « un ami et un confident ».
« Le projet de +déracialisation+ de notre société reste incomplet », estime aujourd’hui Mac Maharaj, mais le mouvement Black Lives Matter aux Etats-Unis marque « une nouvelle phase ».
Desmond Tutu, 89 ans
L’ancien archevêque, prix Nobel de la paix, a contribué à attirer l’attention de la communauté internationale sur les inégalités raciales de l’apartheid.
Célèbre pour son franc-parler, il continue dans sa retraite à s’attaquer aux lacunes, aux injustices et à la corruption de l’Afrique du Sud post-apartheid.
Croyant fermement à la réconciliation des Sud-Africains noirs et blancs, il est le père de l’expression « Nation arc-en-ciel ».
Sophia Williams de-Bruyn, 83 ans
Elle est la seule militante encore vivante à avoir participé à la marche des femmes du 9 août 1956, vers le siège du gouvernement blanc à Pretoria, pour protester contre les lois sur les laissez-passer.
Jusqu’en 1986, les Noirs devaient se déplacer avec un « passeport intérieur » précisant où ils pouvaient se rendre.
A 18 ans, risquant d’être emprisonnée, Sophia Williams de-Bruyn a marché avec d’autres militantes pour déposer une pétition portant des milliers de signatures.
Elle milite aujourd’hui pour l’égalité des sexes et reste active au sein de la Ligue des femmes de l’ANC.
Albie Sachs, 86 ans
Il a souvent défendu des personnes poursuivies pendant le régime d’apartheid, ce qui lui a valu d’être à son tour arrêté et torturé.
Après un exil en Angleterre à partir de 1966, il s’installe au Mozambique et contribue, onze ans plus tard, à mettre en place un nouveau système juridique dans ce pays africain qui vient de gagner son indépendance.
Une voiture piégée lui font perdre un bras et un oeil en 1988.
Il retourne en Afrique du Sud à la libération de Mandela en 1990. Nommé à la Cour constitutionnelle, il y reste jusqu’en 2009 et contribue notamment à la rédaction du texte autorisant le mariage de personnes du même sexe.
Ebrahim Ismail Ebrahim, 83 ans
Membre de la branche armée de l’ANC, il est arrêté en 1963 et en 1989. Il passe plus de 15 ans en prison où il est torturé.
Sa principale préoccupation aujourd’hui est l’économie du pays en récession. Il dit compter sur l’actuel président Cyril Ramaphosa, qui « continue à prendre des mesures pour éradiquer la mauvaise gestion et la corruption ».
Proche de l’ex président Jacob Zuma, il raconte avoir partagé sa cellule avec lui à Robben Island. Il dit regretter le « triste » retour derrière les barreaux de celui-ci, poursuivi pour corruption et récemment condamné à 15 mois de prison.
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