Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo. © belgaimage

Annonce attendue de la réélection du président sortant en RDC

La réélection haut la main du président sortant Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo devrait être annoncée officiellement dimanche en République démocratique du Congo (RDC), après un scrutin qualifié par l’opposition de « simulacre d’élections » dont elle demande l’annulation.

L‘issue de la présidentielle, élection à un seul tour, ne fait aucun doute, au vu des résultats partiels égrenés depuis huit jours par la commission électorale nationale indépendante (Céni), qui prévoit d’annoncer dimanche après-midi les résultats complets provisoires. Ce sera à 14h00 au centre Bosolo (vérité en lingala) à Kinshasa, selon le média en ligne Actualité.cd. Samedi soir, sur 17,8 millions de voix comptabilisées, M. Tshisekedi, 60 ans, au pouvoir depuis janvier 2019 et candidat à un second mandat de cinq ans, était crédité de 72% des suffrages.

   Suivaient Moïse Katumbi Chapwe, riche homme d’affaires et ancien gouverneur du Katanga (sud-est), avec 18,9% des voix, Martin Fayulu Madidi, candidat malheureux à la présidentielle de 2018 (5,5%) et l’ancien Premier ministre (2008-2012) Adolphe Muzito Fumutshi (1,36%). La vingtaine d’autres candidats, dont le Dr Denis Mukwege Mukengere, prix Nobel de la paix pour son action auprès des femmes victimes de viols de guerre, n’atteignaient pas 1% des voix.

   « Nous n’accepterons jamais ce simulacre d’élections et ces résultats », fruits d’une « fraude organisée », déclarait cette semaine M. Fayulu, alors que la police venait d’empêcher une première manifestation de contestation. La performance de M. Tshisekedi est « au-delà de toutes les prévisions », note Trésor Kibangula, analyste politique à l’institut de recherche Ebuteli. « Sa dynamique de campagne a fonctionné », déclare-t-il à l’AFP. Mais les scores très élevés enregistrés dans certaines régions « interrogent » sur « l’impact des irrégularités » constatées par les observateurs.

Problèmes logistiques et retard

   Près de 44 millions d’électeurs, sur un total d’environ 100 millions d’habitants de l’immense pays d’Afrique centrale, étaient appelés aux urnes pour élire leur président mais aussi leurs députés nationaux et provinciaux et, pour la première fois, leurs conseillers locaux.

   Le quadruple scrutin était prévu le 20 décembre. Mais en raison de nombreux problèmes logistiques, il a été étendu au 21 par la Céni et s’est poursuivi plusieurs jours dans certaines zones reculées, jusqu’au 27 selon une mission d’observation des Églises catholique et protestante.

   Selon son propre comptage, cette mission dit avoir constaté qu’un candidat s’est « largement démarqué des autres, avec plus de la moitié des suffrages à lui seul ». Elle ajoute cependant avoir « documenté de nombreux cas d’irrégularités susceptibles d’affecter l’intégrité des résultats de différents scrutins en certains endroits ».

Opposition et manifestations

   Depuis le début du processus, les opposants accusent le pouvoir de planifier la fraude et, dès le 20 décembre, avaient qualifié les élections de « chaos total ». Peu après, une quinzaine d’ambassades – dont celle de la Belgique – appelaient à la « retenue ». Des tensions post-électorales sont redoutées, dans un pays à l’histoire politique agitée et souvent violente, au sous-sol très riche en minerais mais à la population majoritairement pauvre.

   Les autorités affirment que toutes les dispositions ont été prises pour prévenir les débordements, notamment dans le sud-est minier, fief électoral de M. Katumbi. Et des images circulent sur les réseaux sociaux d’un important déploiement de troupes à Lubumbashi, le chef-lieu du Haut Katanga.   Elles rappellent aussi que les contentieux électoraux doivent être portés devant la Cour constitutionnelle, à qui il reviendra de proclamer les résultats définitifs de la présidentielle, en principe le 10 janvier. Mais des opposants ont fait savoir qu’ils ne saisiraient pas cette cour en laquelle ils n’ont aucune confiance, pas plus que dans la Céni qu’ils estiment inféodée au pouvoir.

   Dans ces conditions, que va faire l’opposition? « Réactiver la rue contre la victoire de M. Tshisekedi serait très compliqué, surtout à Kinshasa », estime Trésor Kibangula. « Les regards se tournent vers le sud-est… Il y a beaucoup d’incertitudes », dit-il.

   En plus du climat politique tendu, la campagne électorale a été empoisonnée par la situation sécuritaire dans l’est de la RDC, qui connaît un pic de tension depuis deux ans avec la résurgence de la rébellion du M23, soutenue par le Rwanda voisin.

   Certains candidats, M. Katumbi en particulier, ont été accusés d’être des « étrangers », une manière de les discréditer dans un pays meurtri par des années de conflits. Selon l’analyste d’Ebuteli, les discours identitaires de la campagne ont « créé des cassures dans la société congolaise ». Reste à savoir comment le président réélu va « gérer la suite ».

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