Donald Trump et Kamala Harris
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Trump-Harris: remporter le débat présidentiel garantit-il la victoire? (analyse data)

Le Vif

Les deux candidats à la présidentielle américaine se sont opposés dans un débat où Kamala Harris semble avoir dominé son adversaire, Donald Trump. Mais emporter l’adhésion des électeurs américains lors d’un débat suffit-il pour s’ouvrir les portes de la Maison blanche?

Depuis 1960 et le premier débat télévisé entre John F. Kennedy et Richard Nixon, 13 séries de confrontations retransmises sur le petit écran ont opposé les candidats à la présidentielle américaine. Ces joutes verbales jouent un rôle majeur dans l’élection, en effet seuls trois candidats ont été élus (ou réélus) malgré des performances décevantes lors de ces échanges: George W. Bush en 2000, Barack Obama en 2012, et Donald Trump en 2016.

Serge Jaumain, professeur d’histoire contemporaine à l’Université libre de Bruxelles et spécialiste de l’histoire de l’Amérique du Nord, tempère l’importance de ces duels: «ce n’est pas parce qu’on perd le débat qu’on perd forcément les élections, car un tas de facteurs peuvent entrer en compte. Un exemple parmi tant d’autres, la situation économique du pays est plus importante aux yeux de l’électeur que le débat en lui-même. Par contre, il ne faut surtout pas perdre pied dans ces face-à-face. Un débat permet au téléspectateur de jauger si tel ou tel candidat a l’étoffe d’un futur président. Laisser un mauvais souvenir à l’image est donc risqué.»

Les démocrates mieux préparés au débat

Les démocrates ont majoritairement dominé les débats depuis 1960. Neuf fois les différents candidats de ce parti politique ont surclassé leur opposant. Par contre, ils ont remporté les élections sept fois. La tendance s’inverse côté républicain: quatre débats remportés, mais six élections gagnées. 

«Le succès d’un candidat est lié à sa personnalité et à leur acceptation d’être coaché et à bien se préparer, et les démocrates l’ont mieux compris, explique Serge Jaumain. Les républicains, eux, ont souvent des personnalités fortes et n’ont pas trop envie qu’on leur explique comment animer un débat».

La communication politique et le non-verbal vont de pair

Depuis 2012, deux fois les prétendus gagnants des débats n’ont finalement pas accédé à la Maison blanche: Mitt Romney en 2012 qui a échoué face à Barack Obama, pourtant bien moins préparé, et Hillary Clinton en 2016 à l’avantage de Donald Trump.

«L’avènement des réseaux sociaux comme outil de communication politique est la principale raison à ce phénomène, poursuit Serge Jaumain. Les Américains n’ont pas toujours envie de regarder l’intégralité d’un long débat, et les candidats le savent. Ils vont diffuser certains passages du débat qui les avantagent sur leur réseau social de prédilection. On peut faire croire assez facilement à ses électeurs qu’on a sur-dominé le débat, ce qui n’est pas toujours le cas.»

Dans ces débats, le non-verbal joue aussi un rôle important: l’apparence physique, la tenue vestimentaire, la posture, les regards, sont des éléments qui peuvent influencer indirectement l’électeur. «Il est largement démontré que le fait qu’une personne ait des regards directs vers son interlocuteur peut avoir un impact très positif sur les téléspectateurs, entame Gordy Pleyers, expert en phénomènes d’influence à l’UCLouvain. Le débat de cette semaine appuie ce constat, car Kamala Harris était la seule à tourner son regard en direction de Trump, ce dernier ayant plutôt maintenu un regard figé vers les journalistes».

«Le non-verbal est devenu essentiel et les candidats bien préparés le savent, conclut Serge Jaumain. C’est le rôle de la télé finalement: l’image ne fait qu’accompagner le son et les spectateurs regardent le débat pour le plaisir de voir s’affronter deux personnes».

Thomas Renard

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