Donald Trump de retour au tribunal ce mardi: pourquoi ce procès est historique (analyse)
Une première dans l’histoire des Etats-Unis: un candidat à la présidentielle et ancien président est jugé en procès pénal. Donald Trump, habitué des tribunaux, pourrait voir sa campagne électorale minée par ce nouvel obstacle judiciaire.
Reprise des débats au tribunal de Manhattan. Huit jours après son ouverture officielle, le procès pénal de Donald Trump entre dans le vif du sujet, ce mardi.
Le républicain est accusé d’avoir falsifié des documents visant à dissimuler l’achat – pour la somme de 130.000 dollars – du silence de l’actrice pornographique Stormy Daniels, à propos d’une relation sexuelle qu’ils auraient eu il y a près de 20 ans, et que Trump a toujours niée.
Sexe, politique et argent. Toutes les conditions d’un show à l’américaine sont réunies pour en faire un procès retentissant, digne d’un scénario hollywoodien. Pourtant, il s’agit du « moins important des griefs qui visent Donald Trump » qui doit comparaître dans trois autres procès, tempère Serge Jaumain, professeur d’Histoire contemporaine à l’ULB.
En quoi ce procès est inédit? Retour sur l’historique de cette affaire.
Stormy Daniel, la star du procès
En juillet 2006, Stephanie Clifford – de son nom civil – 27 ans, rencontre le magnat de l’immobilier de 60 ans lors d’un tournoi de golf de célébrités à Lake Tahoe, en Californie. Ils ont une relation sexuelle consentie le soir même, raconte-t-elle dans ses mémoires parue en 2018. Trump est encore loin de la politique, mais sa troisième femme, Melania, vient d’accoucher de son dernier enfant, Barron.
Cette histoire revient comme un boomerang en 2016, lorsque Donald Trump est investi par le parti républicain. En pleine campagne, l’équipe du candidat tente de nettoyer son image. Une histoire d’adultère avec une actrice porno aurait fait tache auprès de l’électorat conservateur et religieux américain. Le 27 octobre 2016, l’avocat du républicain, Michael Cohen, passe un marché avec celle devenue une sommité du monde du X : 130.000 dollars en l’échange de son silence.
Le scandale éclate en janvier 2018 avec la révélation de l’affaire par le Wall Street Journal. Entre temps, Donald Trump est devenu le 45ème président des Etats-Unis. A partir de ce moment-là, Stormy Daniels se lance dans une véritable croisade médiatique pour faire entendre sa vérité, n’hésitant pas à se moquer du sexe et des performances sexuelles de Trump. Loin de se présenter en victime, l’ancienne strip-teaseuse issue de la classe populaire américaine racontera les détails les plus crus de son aventure avec Trump dans son ouvrage Full Disclosure. Elle ira même jusqu’à tabler son business sur son histoire avec le milliardaire en se lançant dans une tournée des boîtes des strip-tease, appelée “Make america horny again” (Rendez l’Amérique excitée de nouveau), en référence au slogan de 2016 du républicain.
Elle sera amenée à témoigner au tribunal de New-York dans les prochains jours.
Que risque Donald Trump?
“L’histoire avec Stormy Daniels pimente les articles, c’est croustillant. Mais les faits ne sont pas extrêmement graves si ce n’est que ça s’est produit pendant une campagne présidentielle”, commente Serge Jaumain.
Au centre du procès, les paiements effectués à Stormy Daniels ne sont pas illégaux en soi, mais sont inscrits comme « frais juridiques » de campagne dans les comptes de la Trump Organization, ce qui constitue une falsification. En effet, pour Alvin Bragg, le procureur démocrate qui a inculpé Trump dans cette affaire, “il s’agit d’une conspiration pour truquer l’élection présidentielle, puis de mensonges dans les documents comptables pour couvrir cela ».
Le candidat républicain, qui a échoué à faire reporter le procès après l’élection présidentielle de 2024, devra répondre devant un jury populaire de 34 chefs d’inculpation pour « falsification de documents comptables », pour lesquels il a plaidé non coupable. Chacun des chefs est passible de quatre années d’emprisonnement.
Quelle conséquence sur l’élection présidentielle? “Avant, la moindre incartade d’un candidat faisait beaucoup de remous. Certains politiciens sont tombés pour adultère (on pense à Bill Clinton, ndlr.) mais Trump réussit à s’en sortir. Son électorat lui pardonne tout”, estime Serge Jaumain. Cependant, “Trump pourrait être condamné et tout de même poursuivre sa campagne”, poursuit l’historien. Le fait qu’il soit libre ou non n’est pas un critère. C’est déjà arrivé en 1920, un candidat démocrate (Eugene Victor Debs) a fait campagne en prison. Mais dans les sondages, un certain nombre de républicains pourraient le lâcher s’il était condamné. Et cette élection face à Biden se joue à peu de voix”.
Ce qui est certain, c’est que le candidat va se servir du procès pour faire campagne. Privé de meetings électoraux, “on doit s’attendre à une mise en scène exceptionnelle de Trump pour utiliser les médias pour qu’on parle de lui”, anticipe le spécialiste des Etats-Unis. To be continued.
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