Le débat entre Kamala Harris et Donald Trump fut riche, mais le fond manquait à l’appel. © BELGAIMAGE/AFP

Trump-Harris: ce qu’il faut retenir des sujets qui ont marqué le débat (vidéos)

Maxence Dozin
Maxence Dozin Journaliste. Correspondant du Vif aux Etats-Unis.

Les deux candidats à la présidentielle américaine ont échangé, durant près de deux heures, sur treize sujets. Une discussion passionnée et assez captivante, mais au cours de laquelle ils n’ont finalement que rarement pu échanger sur le fond. Kamala Harris a délivré un discours attendu et légèrement lénifiant. A l’inverse et sans surprise, Donald Trump fut incapable de mettre la forme sur des idées de fond recevables et difficilement partageables.

Le candidat républicain, qui ne calcule rien mais sombre régulièrement dans des attaques personnelles et des déclarations fort décousues, a sans doute renforcé, au cours de ce débat, sa position d’homme politique antisystème, au contraire de Kamala Harris dont le discours, attendu et plein de bons sentiments, incarne fondamentalement l’ordre établi, sur le fond et sur la forme. Le milliardaire, qui s’est déclaré une fois encore victime d’une élection 2020 « volée » (sans en apporter aucune preuve), a dû faire face à des questions saillantes, entre autres sur son rôle dans l’assaut de ses partisans sur le Congrès le 6 janvier 2021.

Au final, le spectateur neutre retiendra avoir eu affaire à deux individus aux caractères complètement opposés. L’un, franc-tireur incorrigible, au risque de tomber dans des mensonges flagrants, mais qui se pose comme le candidat «antiestablishment», défenseur d’une certaine franchise iconoclaste. L’autre, Kamala Harris, nettement plus attendue et polie, articulant des idées davantage égalitaristes et souhaitables «dans l’absolu», mais qui par son côté par trop rassembleur et un idéalisme très politicien semble comme coupée, faute de concret, des préoccupations des Américains. Résumé des principaux propos.

Sur l’économie américaine

Kamala Harris avance avoir des mesures concrètes à proposer: réductions d’impôt pour les petites entreprises et aide de 6.000 dollars aux ménages pour la naissance d’un enfant. Elle revendique que ses mesures économiques soient validées par un ensemble de seize économistes lauréats du prix Nobel, et accuse Donald Trump d’uniquement vouloir accorder des réductions d’impôts aux plus riches. Le candidat républicain, de son côté, réclame la paternité de milliards de dollars rentrés dans les caisses du Trésor américain grâce aux guerres commerciales déclarées contre la Chine durant sa présidence. La joute, sur ce point, fut assez décousue sur le fond, Trump étant incapable de rester dans les rails d’un débat d’idées. On a vu le dédain pour l’adversaire sur le visage des deux candidat: Harris affichant un sentiment de supériorité, Trump traduisant sa conviction que son adversaire ne cherchait tout bonnement qu’à enfumer le public américain.

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Sur les guerres commerciales contre la Chine

Trump s’est enfoncé dans des attaques assez absurdes, estimant notamment que le père de la candidate démocrate fut un enseignant «marxiste». Malgré tout, ses arguments sur le fond semblent valides et bie sentis.

Sur l’avortement

La journaliste d’ABC a accusé Trump d’avoir changé de position sur le sujet à de très nombreuses reprises. Acculé, le milliardaire s’est toutefois félicité de la décision de la Cour Suprême de renvoyer aux Etats la possibilité de légiférer en la matière. Il a faussement affirmé qu’il est légal, dans certains Etats, de «tuer un bébé déjà né». De son côté, Kamala Harris a affirmé qu’elle supportera une protection fédérale du droit à l’avortement.

Sur l’immigration illégale

Trump a accusé le tandem Biden-Harris de ne rien avoir fait durant «trois ans et demi» pour couper le flot d’immigrants arrivant aux Etats-Unis. Il estime que si le taux d’homicides a explosé dans le pays, c’est «de la faute aux immigrants», ce que le modérateur a contredit, chiffres à l’appui. Harris a réagit par un discours particulièrement convenu. Pour rappel, et d’après les sondages, l’immigration illégale constitue la principale préoccupation des Américains.

Sur les changements de position de Kamala Harris sur la fracturation hydraulique («fracking»)

La démocrate a semblé vouloir éviter le sujet. Donnant à Trump l’occasion de revenir à la charge sur le sujet de l’immigration, qu’il sait vendeur politiquement. Il accuse notamment Harris de vouloir «aider à pratiquer des opérations chirurgicales de changement de sexe sur des immigrés illégaux» (sic). Le candidat républicain a paru incapable de mettre un minimum de forme sur des idées parfois décousues. Pas de doute, les deux candidats semblent vivre sur des planètes complètement différentes.

Sur l’invasion du Capitole, le 6 janvier 2021

Trump a évidemment tenté d’évacuer la question. Kamala Harris s’est confondue dans le politiquement correct alors que le débat d’idées exige un minimum de positionnements, voire de prises de risque. Elle a accusé assez systématiquement son opposant et ses partisans les plus extrêmes d’être les «méchants», évitant de se positionner sur le fond.

Sur les élections de 2020

Trump n’a pas plié: ces élections étaient «truquées». L’occasion pour lui, une fois de plus, de revenir à la charge sur la question de l’immigration, et d’embrayer ensuite sur le fait que, selon lui, les «leaders de pays comme la Chine et la Corée du Nord le respectent et ont peur de lui, contrairement aux démocrates». Ceci après des accusations de sa rivale estimant que les leaders internationaux n’ont «que peu de respect pour lui».

Sur le conflit entre Israël et le Hamas

Kamala Harris, qui ne peut prendre aucun risque sur la question, a semblé enfoncer des portes ouvertes. Sans mettre les formes, Trump a accusé son adversaire de «haïr Israël». En matière internationale, le républicain, incorrigible, semble avoir des arguments mais est incapable d’y mettre la forme.

Sur la guerre en Ukraine

A propos de l’Ukraine, le milliardaire s’est voulu tranchant: «ce que Vladimir Poutine s’est permis de faire en Ukraine ne serait jamais arrivé avec moi.» A la question du journaliste d’ABC lui demandant s’il est oui ou non dans l’intérêt des Etats-Unis de voir l’Ukraine gagner cette guerre, Trump a marqué un point: l’ancien président a répondu par «je veux juste que la guerre prenne fin, et c’est ça l’intérêt des Etats-Unis; quant à la guerre, elle n’aurait jamais dû commencer». Il estime qu’à cause de le gestion démocrate en matière de politique étrangère, le monde «est au bord de la Troisième Guerre mondiale». Kamala Harris en matière internationale, si elle défend la ligne américaine classique, semble manquer de tranchant. En tout cas, elle ne brille pas par une quelconque prise de risque.

Sur le conflit en Afghanistan

Les deux candidats se sont renvoyé la balle de la faillite de la sortie américaine en août 2021. Trump fut assez sarcastique (mais saillant?) sur la manière dont il traitait avec les officiels talibans.

Sur l’Otan

Trump a persisté: il revient aux Européens de payer davantage pour «leur» sécurité, faute de quoi les Etats-Unis «cesseront de [les] défendre».

Sur les questions raciales

Trump a affirmé que dans le fond, il s’en soucie comme d’une guigne. Traduction: la couleur de peau des gens lui est complètement égale. Kamala Harris a insisté pour qu’«on voie en son voisin un ami». Une phrase un peu convenue. Elle insiste pour que l’on «valorise l’optimisme davantage que la division».

Sur le changement climatique

Harris revendique un bilan solide en la matière, insistant avoir aidé à «investir un milliard de dollars dans une économie verte» durant le mandat de Joe Biden. Trump n’a pas semblé concerné par le problème.

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