Biden et Harris aux célébrations du 4 juillet. (Photo by Samuel Corum/Getty Images)

Comment Kamala Harris va devoir fédérer son parti après le retrait de Biden

Maxence Dozin
Maxence Dozin Journaliste. Correspondant du Vif aux Etats-Unis.

Mme Harris, qui se place désormais comme la candidate la plus crédible pour défier Donald Trump en novembre, doit avant tout se faire connaître davantage auprès du grand public américain. Elle dispose pour ce faire d’un peu plus de 100 jours. 

L’abandon de la candidature de Joe Biden annoncée ce dimanche en début d’après-midi aux Etats-Unis n’aura pas constitué une surprise tant elle était dans l’air depuis que quelques-uns des plus gros donateurs de sa campagne ainsi que certaines personnalités de renom du parti (au premier rang desquelles Barack Obama) l’avaient pressé de reconsidérer ses velléités. 

S’étant porté fort pendant des mois d’être « le seul candidat à pouvoir battre Trump », ses performances publiques erratiques, notamment celle de son débat télévisé du 27 juin au cours duquel il était apparu extrêmement désorienté, avaient fini de convaincre une partie substantielle du parti démocrate de se mettre en quête d’un autre candidat pour le suppléer. 

M. Biden a donc cédé à la pression et fini par admettre l’inévitable, en l’espèce que le public américain n’avait plus suffisamment confiance en sa capacité à potentiellement servir la nation pour quatre années supplémentaires. 

Une nomination quasi actée 

Le président Biden, qui a annoncé désormais soutenir la candidature de sa vice-présidente Kamala pour représenter le parti en novembre, laisse sa formation politique dans une position délicate : il ne reste en effet plus que quatre semaines avant la Convention démocrate de Chicago censée s’accorder sur la figure dont les « progressistes » espèrent qu’elle soit en mesure de battre le ticket conservateur Trump-JD Vance. 

Il est hautement probable que les quelque 3.900 délégués de parti avaliseront le choix de Mme Harris comme candidate du parti. Et ce pour deux raisons principales. Premièrement, aucun nom vraiment crédible électoralement ne semble se dégager, les quelques candidats en vue ayant soit renoncé (la gouverneure du Michigan Gretchen Whitmer), soit manquant d’expérience ou d’assise électorale (le ministre des transports Pete Buttigieg), ou encore ne faisant pas l’unanimité au sein de leur parti (le gouverneur de la Californie Gavin Newsom).

Ensuite, la vice-présidente Harris est celle qui bénéficie de l’accès le plus direct au réseau de donateur du parti ; elle n’aura ainsi pas de mal à inviter ceux-ci à ouvrir leur portefeuille, particulièrement au regard du soulagement que d’aucuns d’entre eux ont ressenti face au désengagement de Joe Biden. L’essentiel des grands donateurs du parti ainsi que de nombreuses personnalités politiques de gauche ont en tout cas annoncé soutenir la candidature de la vice-présidente, qui elle-même a assuré « vouloir mettre toute son énergie à se confronter à ce challenge et à battre Donald Trump » dans un peu plus de 100 jours. Barack Obama est la seule figure du parti à avoir annoncé préférer une procédure de nomination classique diligentée par le parti. 

Une personnalité de poigne 

Le choix de la vice-présidente, s’il devait se confirmer, porte ainsi aux portes de pouvoir et pour la deuxième fois après Hillary Clinton en 2016 une femme en tant que candidate du parti démocrate à la présidence. C’est par ailleurs la première fois que la gauche propose aux électeurs américains de placer leur confiance dans une femme de couleur, élément sur lequel elle tentera sans nul doute de capitaliser. 

Mme Harris, ancienne procureure en Californie, a la réputation d’être centriste, peut-être même davantage que ne l’était Joe Biden. Elle est également connue pour avoir été une « dure » en matière de tolérance au délit lors de son passage dans la fonction, avant qu’elle soit invitée à se joindre au ticket démocrate lors de l’élection présidentielle de 2020. 

Elle devra tout de même fédérer son parti autour de sa candidature, et particulièrement l’aile gauche, dont les préoccupations-clé (justice sociale, protection des minorités, principalement) sont souvent vues comme négligées par les têtes pensantes du parti. Elle devra par ailleurs se révéler au public davantage qu’elle n’a pu le faire au cours de ces quatre dernières années, Mme Harris n’ayant été que rarement sous le feu des projecteurs. Il n’empêche, les derniers sondages d’opinion la concernant sont meilleurs pour les démocrates que ceux qui concernaient un duel Biden-Trump. Elle est ainsi au coude-à-coude avec le milliardaire dans l’Etat-clé de Pennsylvanie, et mène largement en Virginie, territoire où Biden était projeté comme perdant. Au niveau national, son retard sur Trump n’est que de deux pourcents, un retard qui semble rattrapable. 

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