Sarah Van Liefferinge
Alimentation : « Le bon marché nous coûte trop cher »
« Notre alimentation bon marché est une illusion », écrit Sarah Van Liefferinge du Parti Pirate. « Dans le monde entier, nous sommes trompés par une poignée de grands joueurs qui manipulent les prix de l’alimentation et les conditions de travail, et même nos schémas alimentaires. Une évolution terrifiante ».
Acheter en respectant l’homme et l’environnement demande du temps et de l’argent. Pour la plupart d’entre nous, les deux sont rares. Par conséquent, on achète en masse dans les grands supermarchés qui détiennent de plus en plus de pouvoir sur notre chaîne alimentaire.
Ce pouvoir leur permet de mettre les petits agriculteurs et les distributeurs locaux sous pression pour produire à moindre coût et le plus rapidement possible. Ça passe ou ça casse, car comment les petits pourraient-ils négocier ou tenir tête à des multinationales qui dominent le monde ?
Le bon marché aussi coûte cher
Cependant, le bon marché aussi coûte cher. Les dogmes capitalistes « économies d’échelle », « maximisation du profit » et « efficacité » font que l’alimentation industrielle est devenue la norme. Elle contient beaucoup de sel, de sucre et de graisses, mais également des colorants de moindre qualité, des exhausteurs de goût, des agents de remplissage et des conservateurs.
Les animaux sont gonflés artificiellement dans des conditions épouvantables. La monoculture à grande échelle appauvrit le sol fertile, ce qui obliger les cultivateurs à utiliser de l’engrais chimique. Les pesticides chimiques tuent la biodiversité et provoquent la mort des abeilles, ce qui compromet la pollinisation des plantes.
La réalité crue de l’exploitation de l’agriculture de pillage et de pseudonourriture est masquée par des budgets de publicité gigantesques et des stratégies de marketing. L’alimentation industrielle provient d’usines stériles. Il n’y a pas une once d’amour, malgré tous les slogans séduisants et les images d’Épinal de fermiers souriants et de gentilles grands-mères.
En cherchant le bon marché à tout prix, on économise sur le dos de l’avenir de nos enfants
En cherchant le bon marché à tout prix, on épargne sur le métier d’agriculteur, la qualité de l’alimentation et la santé publique. On économise sur le dos de l’avenir de nos enfants. C’est impardonnable !
Subsides européens pour les multinationales
Il y a trop peu de transparence à propos de l’origine et du coût réel de notre alimentation. Saviez-vous que ces dernières années des multinationales comme Nestlé (638 millions d’euros), Mars (au moins 24 millions d’euros) et Mondelez/Kraft Foods (35 millions d’euros) ont empoché des millions d’euros de subsides agricoles européens ? Elles se servent de cet argent du contribuable pour stimuler les agriculteurs à surproduire et à vendre à des prix bradés.
Voilà l’illusion du bon marché: l’alimentation traitée industriellement est relativement bon marché parce qu’on ne se doute pas qu’on nous présente la note deux fois : comme citoyen et comme consommateur. Et sans parler des coûts externes en matière d’environnement, d’éthique et de santé.
Les rayons de supermarchés qui présentent un large choix d’aliments aussi sont illusoires. Grâce aux fusions et aux absorptions, un petit de groupe de corporations géantes a réussi à monopoliser la plus grande partie du marché alimentaire global. Nous sommes trompés par les noms de marques familiers. Côte d’Or et LU par exemple appartiennent tous deux à Mondelez/Kraft Foods.
Nestlé, Coca-Cola, Danone, General Mills, Kellogg, Mars, Mondelez/Kraft Foods, PepsiCo, Associated British Foods (ABF) et Unilever sont les joueurs les plus puissants. Ils manipulent les prix et les conditions de travail dans le monde entier, jusqu’à nos schémas alimentaires. Une évolution terrifiante.
Il faut combattre le TTIP
Et on n’a pas encore parlé du TTIP, le traité de libre-échange entre l’UE et les États-Unis. La promesse ? Stimuler le commerce, booster l’économie et créer des emplois. Le véritable enjeu? Continuer à monopoliser et exploiter. Ainsi, la clause ISDS permet aux multinationales d’exiger des dommages et intérêts d’états qui font obstacle à leurs activités commerciales. Tout comme lors du sauvetage des banques, c’est le citoyen qui trinque pour le confort du grand capital.
Le TTIP doit harmoniser les règlementations européennes et américaines en matière de sécurité alimentaire. Et c’est une mauvaise nouvelle pour l’Europe. Le TTIP laissera entrer les poulets au chlore, mais aussi les hormones de croissance et les pesticides interdits chez nous. Nos normes relatives au bien-être animal et à l’environnement risquent également d’en pâtir.
Le TTIP est une atteinte à la démocratie et au droit à l’autodétermination d’États-nations et de leurs citoyens. Les négociations avec la Commission européenne ont lieu à huis clos. La grande majorité des interlocuteurs sont des lobbys corporate tels que FoodDrinkEurope, qui défend notamment des intérêts des dix plus grandes multinationales alimentaires. Mais pour le géant d’agrochimie Monsanto aussi, le TTIP est un rêve éveillé.
En dépit de protestations en masse, le parlement européen a voté début juillet pour la poursuite des négociations. Une énième gifle au citoyen européen.
Soyez révolutionnaire: mangez écologique et local!
Le rapport « Wake up before it is too late » des Nations Unies plaide en faveur d’une politique radicalement différente en termes d’alimentation, d’agriculture et de commerce. Il est urgent de passer d’une production industrielle de masse basée sur les combustibles fossiles à des entreprises agricoles écologiques de petite dimension et de raccourcir la chaîne alimentaire. Une approche globale est la meilleure façon de relever les grands défis que sont le changement climatique, la pénurie alimentaire et l’immigration.
En tant que citoyens, nous ne pouvons pas continuer à attendre nos autorités, qui placent la croissance économique au-dessus de l’environnement et de la qualité. C’est à nous à prendre l’initiative et à réaliser les changements nécessaires de bas en haut. Il faut changer notre façon de consommer et payer un prix juste. En achetant de la nourriture industrielle, on maintient les rapports de pouvoir du capitalisme global implacable.
C’est certain: les choses bougent. De plus en plus de personnes réalisent qu’il faut récupérer le contrôle de nos aliments. Si on raccourcit a chaîne alimentaire, il y aura à nouveau un lien direct entre le producteur et le consommateur.
Tous ensemble, on peut faire en sorte qu’à l’avenir l’alimentation juste, durable et locale soit la norme et non pas l’exception. Soyez révolutionnaire et engagez-vous !
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