100 jours de conflit en Ukraine: le bulldozer russe s’enlise, la résistance faiblit, et la guerre patauge
Ce vendredi 3 juin marque le 100e jour depuis le début du conflit en Ukraine. Pas de victoire majeure pour la Russie, qui poursuit inlassablement son avancée dans le Donbass. Pas de répit pour les Ukrainiens, qui essuient les attaques répétées de l’armée russe. Mais quels sont les pronostics sur l’issue du conflit? Quels scénarios sont envisageables? Le Vif examine deux hypothèses.
Mi-mars, près de trois semaines après le début de l’invasion russe, les troupes ennemies encerclent Kiev pour tenter de faire tomber la capitale. Sans succès. Une première phase du conflit qui pose alors question: la Russie peut-elle gagner? L’Ukraine ne cède pas, un signe prometteur? Ou au contraire, se dirige-t-on vers un conflit long et intense? Pire encore: va-t-on assister à une guerre nucléaire? Telles étaient les hypothèses émises à l’époque quant à l’issue de la guerre.
100 jours plus tard, la guerre est loin de s’essouffler. Mais, faute de victoire majeure, Poutine a bien été obligé de réviser sa stratégie. Résultat: le front s’est aujourd’hui déplacé à l’Est du pays, dans la région du Donbass. Pas de conquête rapide, donc. Cette deuxième phase du conflit marque néanmoins un léger tournant dans le conflit : Marioupol est tombée, les Ukrainiens faiblissent, et les forces russes contrôlent actuellement « environ 20% » du territoire ukrainien, soit près de 125.000km2.
Une troisième phrase du conflit pourrait bien signer la fin de la guerre. Mais à quoi faut-il se préparer, outre une potentielle victoire russe ou ukrainienne? Au vu des circonstances actuelles, un résultat militaire décisif semble très peu probable…
Une guerre d’usure
C’est l’hypothèse privilégiée par les experts depuis le début du conflit, et aujourd’hui encore, les pronostics vont dans ce sens: la guerre en Ukraine pourrait encore durer de longues semaines, voire des mois. Les deux forces armées avancent et reculent au gré de leurs victoires et défaites, sans céder de terrain. Tantôt les pays occidentaux semblent se réjouir des exploits de la résistance ukrainienne, qui met en déroute Poutine, tantôt la guerre penche en faveur de la Russie, qui ne lésine pas sur les moyens pour écraser leurs adversaires.
Le président russe Poutine juge qu’il peut gagner en faisant preuve de patience stratégique, mais les pays occidentaux ne le laisseront pas faire et continuent de fournir des armes à l’Ukraine. Progressivement, la guerre se transforme en guerre d’usure. Si elle ne l’est pas déjà…
Mais si cela s’éternise trop longtemps, cela serait désastreux pour les deux parties. L’Ukraine ne serait plus qu’un champ de ruines, avec de grandes villes comme Marioupol détruites et des régions rasées impossible à rebâtir par manque de moyens. Même avec l’aide de l’Occident, l’Ukraine aurait bien du mal à se remettre d’un tel conflit…
Côté russe, cette invasion surprise sans conclusion définitive pourrait également être désastreuse pour le futur du pays communiste. Poutine aura fait de sa nation le paria international, et en cas de prolongations du conflit, il y a peu de chance que la Russie retrouve de son éclat et de sa popularité. L’Europe continuera alors à trouver des solutions pour se sevrer définitivement des énergies russes, coupant ainsi les vannes d’argent du Kremlin. Une mauvaise nouvelle sur le long terme pour le pays, qui ne pourra pas compter éternellement sur le seul soutien économique de son grand ami communiste, la Chine.
Des négociations, un cessez-le-feu
Tôt ou tard, l’épuisement des deux armées les poussera forcément aux négociations. Et si les précédentes n’ont pas encore abouti à de réelles solutions, Poutine pourrait surprendre tout le monde en annonçant un cessez-le-feu. Et pour ne pas perdre la face, peut-être même pourra-t-il prétendre que ses objectifs sont atteints, mettant ainsi fin à son « opération militaire » la tête haute : les séparatistes pro-russes dans le Donbass sont protégés, un corridor terrestre vers la Crimée a été établi. Bref, tout va bien dans le meilleur des mondes pour la Russie…
Et Poutine pourrait chercher la supériorité morale en faisant pression sur l’Ukraine pour qu’elle cesse de se battre. Il ne lui restera plus qu’à demander à son adversaire d’« abandonner un territoire en échange d’une paix fictive. Un stratagème tout à fait probable », estime Keir Giles, expert russe de l’Institut de réflexion Chatham House, dans des propos repris dans la BBC.
La question reste de savoir à quoi ressemblera ce cessez-le-feu : trêve temporaire, armistice, ou même division de l’Ukraine en deux selon le modèle Coréen… Rien n’est encore certain, d’autant qu’un potentiel accord de paix pourrait ne pas durer et être suivi de nouveaux combats.
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