COP28: les partis politiques réagissent à l’accord sur la sortie des énergies fossiles
Les pays du monde entier ont approuvé par consensus à la COP28 à Dubaï une décision appelant à une « transition » vers l’abandon des énergies fossiles.
Dès l’ouverture de la séance plénière de clôture, les délégués ont adopté la décision préparée par les Emirats arabes unis, déclenchant une ovation debout et de longs applauddissements. Il s’agit d’une décision « historique pour accélérer l’action climatique », a déclaré Sultan Al Jaber, président de la conférence de l’ONU.
Le document, dont la publication a été attendue toute la nuit par des négociateurs privés de sommeil, propose pour la première fois dans l’histoire des conférences sur le climat des Nations unies de mentionner toutes les énergies fossiles, largement responsables du changement climatique, dans une décision à adopter par tous les pays.
Le texte, dont chaque mot a été négocié par les Emiratis, appelle à « transitionner hors des énergies fossiles dans les systèmes énergétiques, d’une manière juste, ordonnée et équitable, en accélérant l’action dans cette décennie cruciale, afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050 conformément aux préconisations scientifiques ». L’appel à accélérer l’action dès la décennie en cours était une exigence de l’Union européenne et de nombreux autres pays.
Réaction prudemment positive de Groen, à l’Europe de passer à l’acte pour Vooruit
La coprésidente de Groen, Nadia Naji, a réagi mercredi de manière prudente et positive à l’accord conclu lors du sommet sur le climat qui s’est tenu à Dubaï. Elle juge encourageant le fait que, pour la première fois, la volonté de se diriger vers un avenir sans énergie fossile ait été mentionnée. Selon elle, la Belgique peut jouer un rôle de pionnier dans la transition énergétique rapide.
Un texte final appelant à « une transition hors des combustibles fossiles » a été approuvé mercredi lors du sommet des Nations unies sur le climat à Dubaï (COP28). C’est la première fois qu’un tel appel est lancé lors d’un sommet sur le climat. « Pour la première fois dans l’histoire, il a été dit que nous voulions aller vers un avenir sans énergie fossile et polluante, ce qui donne de l’espoir », a réagi Nadia Naji. « Maintenant, il s’agit surtout de faire en sorte que cela se produise, et vite. Ce n’est que si nous accélérons vraiment le rythme que l’objectif de 1,5 degré restera en vue. » Grâce aux connaissances et à la technologie présentes en Belgique, elle pense que notre pays peut ouvrir la voie à un changement rapide.
Pour Vooruit, l’accord sur une transition hors des combustibles fossiles est historique. Il appartient à présent à l’Union européenne de concrétiser aussi rapidement que possible la transition vers une énergie propre et payable. L’eurodéputée Kathleen Van Brempt a fait observer qu’actuellement, l’Union européenne subsidie chaque année l’énergie fossile à hauteur de 50 milliards d’euros. A ses yeux, il faut un plan pour sortir progressivement de ce mécanisme. Les socialistes flamands plaident pour que les investissements soient orientés vers l’énergie durable, la rénovation massive des habitations et l’efficacité énergétique. La politique climatique doit être socialement équitable, ont-ils souligné, comme Groen.
Zakia Khattabi réagit à l’accord survenu à la COP28
« La sortie du fossile est actée!« , a réagi sur X la ministre belge du Climat, Zakia Khattabi. « Sous la pression d’une grande majorité de pays, et avec les États insulaires et l’Union Européenne en tête, nous résolvons enfin le tabou des négociations sur le climat », a déclaré la ministre à l’agence Belga dans la foulée de l’accord. « Il est évident que nous devons abandonner les combustibles fossiles. Le fait que le monde entier le dise clairement aujourd’hui est historique! Cela a pris près de 30 ans ! ».
Mme Khattabi appelle à « tracer la voie à suivre » afin que la transition « soit juste et possible pour chaque pays et chaque citoyen ». Dès l’ouverture de la COP28, les Etats participants avaient également adopté le texte de mise en oeuvre du fonds sur les « pertes et dommages » climatiques dans les pays vulnérables. La création de celui-ci constitue « une avancée importante », a estimé Mme Khattabi. Pour elle, le véritable enjeu se situe cependant dans les années à venir: « c’est maintenant que les émissions mondiales doivent atteindre leur maximum et commencer à diminuer. Le fait que le monde veuille encore travailler ensemble sur cette question est porteur d’espoir », a-t-elle conclu.
« L’ère des énergies fossiles doit se terminer »
En choisissant le terme de « transitioning away » (« transitionner hors de », « s’éloigner », « abandonner » selon les traductions possibles en français), le texte ne parle plus de « phase-out » (« sortie ») du pétrole, du gaz et du charbon, un terme devenu depuis des mois la bannière derrière laquelle se rangeaient plus d’une centaine de pays et des milliers d’ONG.
« L’ère des énergies fossiles doit se terminer, et elle doit se terminer avec justice et équité », a déclaré le secrétaire général de l’ONU António Guterres après l’accord de la COP28 à Dubaï, qui acte le principe d’une transition énergétique hors des combustibles fossiles.
« Je tiens à dire que la sortie des combustibles fossiles est inévitable, qu’ils le veuillent ou non. Espérons qu’elle n’arrive pas trop tard« , a souligné le patron de l’ONU dans un communiqué en s’adressant à « ceux qui se sont opposés à une référence claire » sur cette notion d’élimination, dans le texte de la COP28. « Le monde ne peut se permettre des retards, de l’indécision ou des demi-mesures », a-t-il insisté.
Amélioration, selon les ONG
« Ce n’est pas la promesse historique » du « phase-out » mais « transition hors, cela envoie quand même un signal important. Et si c’est adopté, ce serait quand même la première fois qu’on a de tels mots, qui couvrent non seulement le charbon, mais aussi le pétrole et le gaz », a réagi Caroline Brouillette, directrice du réseau d’ONG Réseau Action Climat Canada. Elle a regretté cependant l’inclusion de « distractions dangereuses comme la capture et le stockage du carbone, le nucléaire. »
L’ONG WWF a qualifié le nouveau projet d’accord d' »amélioration » concernant les énergies fossiles, par rapport à la version précédente, tout en notant l’absence d’appel à une « sortie complète » des fossiles. Mais « si ce texte est adopté, il représenterait un moment significatif », a estimé Stephen Cornelius, de WWF.
« Ce texte est un pas en avant sur le chemin de la sortie des énergies fossiles, mais n’est pas la décision historique que l’on espérait », a réagi Andreas Sieber de 350.org, qui aurait voulu un appel plus direct à la sortie des fossiles.
Le projet « envoie un signal clair que le monde s’engage de façon décisive vers une sortie des énergies fossiles« , analyse quant à lui Jake Schmidt, de l’ONG américaine Natural Resources Defense Council.
La formulation est « entre une réduction et une sortie », analyse Catherine Abreu, de l’ONG Destination Zero, qui comme d’autres souligne qu’il s’agit d’un compromis.
Sultan Al Jaber s’évertuait depuis plus de 24 heures à sauver une COP qu’il avait annoncée comme « un tournant », à même de préserver l’objectif le plus ambitieux de l’accord de Paris, adopté il y a huit ans: limiter l’élévation de la température mondiale à 1,5°C.
Le premier projet de texte émirati, lundi, avait suscité un tollé car il listait trop d’options au choix et n’appelait pas à la « sortie » des énergies fossiles, dont la combustion depuis le XIXe siècle est largement responsable de l’élévation actuelle des températures mondiales de 1,2°C, par rapport à l’ère pré-industrielle.
Ligne dure de Ryad
A ce jour, seule la « réduction » du charbon avait été actée à la COP26 à Glasgow. Jamais le pétrole ni le gaz n’avaient été désignés.
Dans le projet d’accord des Emirats figure une reconnaissance du rôle joué par des « énergies de transition », allusion au gaz, pour assurer la « sécurité énergétique » des pays en développement, où près de 800 millions de personnes manquent d’accès à l’électricité.
Le texte contient de multiples appels liés à l’énergie: tripler les capacités d’énergies renouvelables et doubler le rythme d’amélioration de l’efficacité énergétique d’ici 2030; accélérer les technologies « zéro carbone » et « bas carbone », dont le nucléaire, l’hydrogène bas carbone, et le balbutiant captage et stockage du carbone, défendu par les pays producteurs de pétrole pour pouvoir continuer à pomper des hydrocarbures.
L’Arabie saoudite, le Koweït ou l’Irak étaient sur une ligne dure, refusant tout accord s’attaquant aux énergies fossiles qui font leur richesse.