«Tupperware a attendu trop longtemps pour se réinventer»
Tupperware, l’entreprise américaine de boîtes de conservation, a lancé une procédure de faillite le 17 septembre. Si ses activités en Belgique se poursuivent, cette décision est la suite logique d’un déclin qui apparaissait inéluctable ces dernières années.
Des millions d’ambassadeurs et ambassadrices devront bientôt trouver de nouvelles manières d’occuper leurs soirées. Bientôt, il ne restera de Tupperware que le nom, mythique, de gammes entières de boîtes et accessoires de conservation.
En difficulté depuis des années
Cette faillite s’inscrit dans la continuité logique d’une histoire commerciale difficile pour le fabricant américain. Les difficultés n’ont cessé de se multiplier, avec des répercussions ne laissant pas de place au doute: cessation d’activité dans certains pays (Israël en 2018, Pays-Bas en 2021, Nouvelle-Zélande en 2022), fermetures d’usines à travers le monde, critiques virulentes sur l’emploi du plastique… Mais les signaux les plus clairs sont probablement venus des différentes communications de l’entreprise ces deux dernières années, qui exprimaient de sérieuses inquiétudes quant à l’avenir de la firme et appelaient, en somme, un repreneur au secours.
Les derniers rapports d’activité trimestriels avaient en outre témoigné d’une chute vertigineuse du chiffre d’affaires, notamment sur les marchés américain et chinois. En Belgique, Tupperware enregistrait néanmoins des résultats moins désastreux qu’ailleurs dans le monde, avec des bénéfices moins en baisse, entre 2021 et 2022, que sur d’autres marchés.
Laurie Ann Goldman, la PDG, a affirmé que Tupperware avait été «sévèrement affectée par un environnement macroéconomique difficile». Pour Aurélie Couvreur, cofondatrice de l’agence de marketing Digitaly, la crise du Covid aurait effectivement eu des conséquences néfastes sur les ventes de Tupperware «dont beaucoup sont réalisées lors des soirées à domicile, rendues impossibles par le contexte sanitaire».
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Manque de vision et dettes anciennes
Il n’y a pas à douter du caractère révolutionnaire de la stratégie marketing de Tupperware à l’aube des années 1950. Les «soirées Tupperware», qui pouvaient s’organiser sous plusieurs formes –le plus souvent comme atelier culinaire– étaient alors, selon Aurélie Couvreur, «quasiment un facteur d’émancipation des femmes, qui pouvaient percevoir, en devenant ambassadrice de la marque, des revenus complémentaires».
Mais, mis à part cette stratégie des premières heures qui cultiva un succès presque indétrônable pendant des décennies, les efforts de Tupperware furent insuffisants dans la plupart des autres domaines. «Tupperware, dans de nombreux pays, a attendu trop longtemps pour se réinventer, analyse Aurélie Couvreur. Les magasins en ligne sont apparus très tardivement, on notait peu ou pas de présence dans les grandes surfaces et l’impact des stratégies de marketing digital étaient relativement restreintes.»
Toutefois, pour Aurélie Couvreur, «ces erreurs stratégiques seules ne suffisent pas à expliquer la situation d’aujourd’hui: Tupperware est une entreprise assez vieille et les structures de coûts des débuts, loin d’être irréprochables, ont aussi joué un rôle dans les comptes actuels.» Pour rappel, Tupperware serait endettée à hauteur de un à dix milliards de dollars, alors que le chiffre d’affaires enregistré l’année dernière était inférieur au milliard de dollars.
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240 emplois menacés en Belgique
En Belgique, Tupperware emploie 240 personnes dans une usine à Alost. Pour le personnel, la nouvelle était attendue. Les syndicats avaient notamment observé la baisse des volumes produits, qui laissait présager le pire depuis quelques temps.
Pour l’instant, selon la direction de l’usine, la procédure de faillite n’implique pas une cessation totale des activités, et l’usine devrait rester ouverte jusqu’à nouvel ordre.
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