Tesla: la marque d’Elon Musk se dégrade. Bientôt la dégringolade?
Elon Musk est de plus en plus un repoussoir pour son entreprise qu’on associe aux thèses fascistes. Acheter une Tesla est devenu un dilemme moral. Le boycott grandit.
Un peu partout en Europe, des voitures de la marque Tesla sont vandalisées et taguées d’une croix gammée ou d’un grand «Fuck Elon». Le 21 janvier, une Tesla Cybertruck a été complètement cassée et couverte de graffitis à Los Angeles. Des vidéos de la carcasse sont devenues virales. Le bouillant et controversé multimilliardaire américain ne séduit pas tout le monde. Loin de là. Aux Pays-Bas, selon une enquête d’opinion du média EenVandaag, menée auprès de plus de 430 propriétaires de Tesla, révèle que trois sur dix (31%) envisageaient de se débarrasser de leur véhicule ou l’avaient déjà fait. Et beaucoup comptent apposer un autocollant anti-Musk sur leur capot arrière. Le 25 janvier, des activistes appelant au boycott de la marque au rotor ont projeté le salut nazi de Musk avec l’inscription «Heil Tesla» sur la façade de sa giga-factory de Grünheide, près de Berlin. L’image a fait le tour du monde.
Plus impressionnant encore: en Pologne, le 28 janvier, le ministre des Sports Sławomir Nitras a carrément appelé ses concitoyens à boycotter les voitures Tesla suite aux propos minimisant le passé nazi de l’Allemagne prononcés par Elon Musk peu avant les célébrations du 80e anniversaire de la libération du camp de concentration d’Auschwitz-Birkenau, situé en Pologne. «Aucun Polonais ne devrait plus acheter une Tesla. Il faut une réponse sérieuse et dure à cela, y compris quelque chose comme un boycott des consommateurs», a déclaré ce ministre de Donald Tusk qui a, lui aussi, vivement condamné les paroles du bras droit de Trump. A l’heure où les autorités polonaises ont commencé à subventionner l’achat de voitures électriques, cet encouragement à ne pas choisir de Tesla est éloquent.
Le plus gros problème de Tesla? Elon Musk!
Acheter une Tesla est devenu un dilemme moral. Il y a neuf mois déjà, une enquête de consommation réalisée par le bureau d’analyse marketing Caliber montrait que l’omniprésent Elon Musk était en train de devenir le repoussoir de la clientèle potentielle de Tesla. Les choses ne se sont pas arrangées depuis lors. Bien au contraire. Le 22 janvier, le réputé cabinet de conseil londonien Brand Finance a publié son rapport 2025 qui évalue la valeur de marque des entreprises les plus importantes du monde. Constat: celle de Tesla accuse une chute dans les classements pour la deuxième année consécutive. La baisse de cette dernière année est de 26% pour atteindre 43 milliards de dollars (contre plus de 58 milliards début 2024 et 66 en 2023), alors que son concurrent le plus direct, Toyota, voit sa valeur de marque grimper à près de 65 milliards. Hyundai et Mercedes-Benz surpassent aussi désormais Tesla.
Pour établir son classement, Brand Finance prend en compte les performances boursières des entreprises ou leurs chiffres de vente, mais aussi les commentaires de clients (175.000 répondants, dont 16.000 sur Tesla). Le chiffre d’affaires de la branche automobile du constructeur américain a diminué de 6% en 2024 par rapport à 2023, de même que les livraisons annuelles. Mais ce sont surtout des indicateurs clés comme la «considération» et la «recommandation» qui ont baissé. En Europe, le score de considération est passé de 21% à 16%. Aux Etats-Unis, le score de recommandation a dégringolé quasi de moitié (de 8,2 sur 10 à 4,3%). Dans ses commentaires, le bureau de conseil estime que le déclin de la valeur de marque du constructeur américain était dû à sa gamme vieillissante et aux prises de positions politiques de son PDG Elon Musk.
Le boss de Brand lui-même, David Haigh, note que, «sans proposition d’une gamme de nouveaux produits qui enthousiasme les consommateurs et sans image plus favorable de son leader controversé, la marque sera considérée comme ayant atteint son apogée et commencera à décliner.» Même si le cours de bourse de l’entreprise n’est pas impacté pour le moment l’avertissement de Haigh est sérieux, d’autant que le marché automobile évolue très rapidement aujourd’hui et que Tesla est étroitement lié à son dirigeant. A l’heure de l’influence numérique, qui peut créer des crises de confiance rapidement, les concurrents de Tesla scrutent l’évolution de la marque d’un œil très attentif.
«Cette association forte en terme d’image entre la marque et l’homme qui la dirige, c’est plutôt unique dans l’histoire des marques, confirme Alain Decrop, professeur de marketing à l’UNamur. A l’exception peut-être d’Henri Ford dans les années 1920, généralement le grand public ne connaît jamais le nom du patron qui est derrière une marque. Le fait que Musk soit devenu à ce point charismatique et qu’il soit directement associé à ses marques, que ce soit Tesla ou X, est inédit. Evidemment, s’il prend des positions politiques controversées, le risque est plus grand pour la marque. Les baisses de considération et de recommandation enregistrées par Brand Finance pour Tesla sont énormes. On peut y voir une crise de marque, comme l’a connu récemment Volkswagen avec sa triche antipollution. Mais souvent ces crises sont liées à des problèmes techniques ou sanitaires, très rarement à la personnalité du PDG.»
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