Bertrand Candelon
Rôle de l’Etat dans l’économie: une présence de la sphère publique qui soulève de nombreuses critiques (chronique)
Avec les crises successives que nous devons affronter depuis 2008, on constate un accroissement du rôle joué par l’Etat dans l’économie. C’est ce qu’ atteste en particulier le ratio de dépenses publiques sur le produit intérieur brut, qui dépasse désormais les 50% en Belgique.
La place de l’Etat n’a pas toujours été si prépondérante, sauf peut-être au cours des deux guerres mondiales, pendant lesquelles l’économie a été totalement nationalisée. L’intervention publique s’est théorisée avec l’avènement de la macroéconomie keynésienne. L’Etat peut tout d’abord investir dans les secteurs dit «régaliens», se substituer au secteur privé afin de faciliter l’accès de l’ensemble de la population à certains services essentiels, favoriser le développement économique ou se substituer à un investisseur privé lorsque les conditions l’imposent. Keynes a aussi insisté sur l’importance de l’intervention de l’Etat en période de crise.
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L’Etat se doit, dans ces périodes, de soutenir l’économie, et, en contrepartie, être moins interventionniste quand la position conjoncturelle redevient favorable – on parle d’intervention publique contracyclique. En outre, Keynes souligne l’importante du mécanisme de multiplicateur (une dépense génère un accroissement d’activité plus que proportionnel) pour sortir d’une situation de récession. L’Etat peut également agir comme un agent redistributeur, afin d’éviter de trop grandes inégalités au sein de la population et de permettre à chacun de bénéficier d’une couverture minimale en cas d’accident de la vie. Cette redistribution est rendue possible par le biais des transferts fiscaux. Enfin, l’Etat peut intervenir en mettant en place des réglementations visant à limiter les distorsions de concurrence ou à rendre les marchés plus transparents, donc plus efficients.
Cette présence de la sphère publique n’est pas sans soulever de nombreuses critiques.
Néanmoins, cette présence de la sphère publique n’est pas sans soulever de nombreuses critiques. D’abord, les expériences passées ont montré que l’Etat n’est que très rarement l’investisseur stratège qu’il prétend être et que son efficacité n’est pas toujours supérieure à celle du privé. C’est pour cette raison que des partenariats public-privé se multiplient. L’ effet multiplicateur est aussi souvent remis en cause. La littérature économique ne s’accorde pas pour conclure s’il est supérieur ou non à l’unité, jetant ainsi des doutes sur les stimulants de la politique budgétaire. Par ailleurs, on observe que si l’Etat intervient de manière plus notable en période de crise, il n’arrive pas à se désengager une fois la situation économique rétablie. Le caractère contracyclique n’est donc que rarement vérifié, ce qui aboutit à une dérive de la dette publique.
La redistribution, elle aussi, et même si elle a de nombreux succès à son actif, peut atteindre certaines limites. Des études ont ainsi montré qu’elle ne pouvait à elle seule éliminer la pauvreté et qu’elle était même susceptible de générer des effets pervers, parmi lesquels une trop grande dépendance envers l’Etat providence, entraînant une anémie de l’initiative individuelle.
Une fois la crise actuelle passée, la question de la taille optimale de l’Etat resurgira indubitablement. Le maintien de l’omniprésence de l’Etat pourrait alors devenir problématique et difficilement acceptable. Elle deviendrait alors inefficiente pour l’économie.
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