Pourquoi un impôt sur les grandes fortunes serait difficile à mettre en œuvre

La question d’un impôt sur les plus grandes fortunes refait l’actualité récemment. Le Bureau du Plan publie une étude pointant la difficulté à mettre en place en Belgique un impôt sur le patrimoine net (IPN), notamment en raison de la complexité à quantifier ce patrimoine.

Les quatre chercheurs de l’ULB auteurs de l’étude décèlent deux explications au retour sur scène de l’impôt sur les riches: la détérioration des finances publiques, à la suite notamment des crises sanitaire et énergétique; et la concentration continue de la richesse depuis le milieu des années 1980, en Belgique et dans le monde en général, un phénomène mal accepté socialement. En Belgique, les 10% des ménages aux patrimoines les plus élevés détiennent 59% du patrimoine net total.

La concrétisation de l’idée semble toutefois peu aisée. « Si certaines composantes du patrimoine net sont déjà connues par le SPF Finances via des impôts existants, d’autres en revanche ne le sont pas – la principale difficulté étant l’évaluation des parts prises dans des sociétés non cotées en Bourse », observent les auteurs de l’étude. « Instaurer un IPN nécessiterait au préalable soit la déclaration du patrimoine net par les contribuables eux-mêmes soit le rassemblement de l’ensemble des données existantes auprès des différentes institutions ou parties tierces. »

Ces deux pistes engendreraient cependant un risque, dans le chef du contribuable, de sous-déclaration du montant réel de ses actifs, menant à l’évasion fiscale, ainsi qu’un coût important pour les pouvoirs publics devant organiser la collecte de données administratives. « Dans le cas de la Belgique, un risque supplémentaire vient s’ajouter, lié à la fragmentation de la taxation du patrimoine entre les différents niveaux de pouvoir. Un IPN fédéral taxerait, entre autres, les actifs immobiliers – actifs qui sont déjà taxés via au niveau régional. Si l’IPN venait en remplacement de ces impôts régionaux, des transferts financiers devraient être négociés pour compenser la perte de recettes des Régions et ces dernières perdraient une partie de leur autonomie fiscale. »

Constatant ces différents obstacles, les experts relèvent quelques alternatives à un IPN, « moins symboliques mais également moins problématiques », comme la taxe annuelle sur les comptes-titres, qui pourrait être complétée par d’autres impôts sur la détention d’actifs, tels que les actifs immobiliers, ou sur les revenus d’actifs financiers tels que les plus-values mobilières »

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