Prime de fin d’année: «Pour avoir plus de cash, une option peu connue est la meilleure»
La prime salariale traditionnelle de fin d’année perd du terrain au profit de rémunérations alternatives, moins taxées. Leurs avantages varient en fonction des secteurs, et sont parfois méconnus.
Pour une grande partie des employés, le mois de décembre rime avec l’octroi d’une prime de fin d’année, ou d’un «13e mois». Cette rémunération, qui correspond généralement à un mois de salaire brut, perd de plus en plus de terrain face aux options alternatives proposées par les employeurs. L’une d’elle est particulièrement avantageuse si le travailleur veut optimiser son revenu net (voir plus bas).
Car la prime de fin d’année classique est très taxée, davantage encore que le salaire. Seuls 38% du montant total dépensé par votre employeur aboutissent sur votre compte en net. L’entreprise doit en outre payer 27% de cotisations patronales. Face à cette ponction importante, il est dès lors peu étonnant de voir les employeurs rechercher des alternatives moins taxées. Comme les warrants, système en vogue qui permet à l’employé de conserver 55% du brut. Un gain net d’environ 17% par rapport à la prime classique, donc.
Cette mouvance vers les rémunérations alternatives se vérifie dans les chiffres: le nombre d’employés ayant reçu une prime traditionnelle a diminué de plus de 8% cette année par rapport à l’année dernière. Les primes versées sous forme de warrants ont, elles, augmenté de 4%.
Le point sur les dernières tendances avec Catherine Langenaeken, consultante Legal & Reward chez Acerta.
1. Quel est le cadre légal de la prime de fin d’année?
Catherine Langenaeken: La prime de fin d’année n’est en réalité pas évoquée dans la loi. Chaque secteur détermine si elle est due ou non par l’employeur, comment elle est calculée, et à quel moment elle est payée. En général, elle est versée en décembre, mais certains secteurs la prévoient en novembre. Si la prime de fin d’année n’est pas imposée par le secteur, rien n’empêche l’employeur d’en payer une. On parle alors d’une prime de fin d’année extralégale. Si tel est le cas, les règles sont fixées par l’entreprise, et sont plus flexibles.
La prime de fin d’année n’est en réalité pas évoquée dans la loi. Chaque secteur la détermine.
Catherine Langenaeken (Acerta)
La prime de fin d’année est souvent associée au 13e mois. Dans certains secteurs, comme les soins de santé, on peut distinguer une partie forfaitaire, et une partie variable. La prime de fin d’année n’est donc pas une obligation généralisée, et son mode de calcul peut différer en fonction des secteurs.
2. Comment est payée la prime de fin d’année?
Catherine Langenaeken: Une prime de fin d’année est toujours octroyée en espèces. Sauf lorsque le secteur lui-même autorise de payer cette rémunération sous la forme d’un avantage équivalent. L’employeur peut consacrer ce budget à d’autres avantages. C’est ce qui est réalisé dans les plans cafétéria pour la CP200 (NDLR: la commission paritaire qui compte le plus d’employés dans le pays). Dans la construction métallique, par exemple, la moitié de la prime peut être attribuée à l’achat de congés supplémentaires. Dans les soins de santé (CP330), la prime de fin d’année peut être convertie uniquement en vélo. Les possibilités dépendent donc fortement d’un secteur à l’autre.
3. Pourquoi la prime traditionnelle est-elle moins prisée?
Catherine Langenaeken: Les travailleurs sont effectivement de plus en plus enclins à opter pour une autre formule que la prime traditionnelle. Car elle est lourdement taxée. En net, l’avantage est restreint. L’idée, en optant pour un autre type de rémunération, est d’obtenir un meilleur pouvoir d’achat.
Les travailleurs sont de plus en plus enclins à opter pour une autre formule que la prime traditionnelle.
Catherine Langenaeken (Acerta)
Cependant, on constate toujours une certaine forme d’attachement à la prime de fin d’année et une frilosité à l’égard des alternatives. Certains travailleurs attendent d’avoir un retour d’expérience d’un collègue avant de se lancer. La prime traditionnelle reste donc encore très ancrée dans les habitudes, même dans les cas où plusieurs autres possibilités sont proposées. Par contre, les employeurs eux-mêmes ne sont parfois pas toujours bien informés quant aux options autorisées par le secteur.
En dehors du plan cafétéria, il est aussi de plus en plus fréquent de voir l’employeur proposer un avantage alternatif unique. Le plan cafétaria reste un menu où le travailleur fait son shopping en fonction de son budget et de ce qui l’intéresse.
4. Les warrants ont la cote. En quoi consiste cette prime alternative?
Catherine Langenaeken: On remarque en effet que les employeurs se tournent de plus en plus vers les warrants. L’objectif de ce système est d’obtenir plus de cash pour un même coût patronal. L’option n’est pas encore totalement rentrée dans les mœurs, alors qu’elle peut rapporter plus à l’employé, sans que l’employeur doive débourser davantage. Historiquement, les warrants étaient davantage réservés aux bonus.
Les warrants sont imposés à un pourcentage identique à celui de la prime de fin d’année. En revanche, ils sont exonérés de charges sociales, aussi bien pour le travailleur que l’employeur. Sur base d’un même brut, le warrant rapportera donc plus de net que la prime classique. Même si tout dépend de la valeur à laquelle les warrants pourront être revendus, puisqu’ils sont un produit boursier. Il faudrait toutefois que la valeur de vente du warrant soit fortement dévaluée par rapport à la valeur initiale pour que le travailleur y perde.
Les warrants permettent à l’employé d’obtenir plus de cash pour un même coût patronal.
Catherine Langenaeken (Acerta)
A noter que les warrants sont sur la sellette dans la dernière supernota du formateur fédéral Bart De Wever (N-VA). L’idée d’une suppression avait déjà déjà émise par le ministre des Finances sortant Vincent Van Peteghem (CD&V).
5. Concrètement, comment la rémunération via les warrants fonctionne-t-elle?
Catherine Langenaeken: Les warrants sont destinés à faire de l’optimisation rapide, du «quick win». L’employeur «offre» à l’employé un nombre de warrants équivalents à la valeur de sa prime de fin d’année. Ensuite, l’idée est que le travailleur revende le plus rapidement possible ses warrants. Afin d’optimiser le net et d’éviter le risque boursier, dans la mesure où plus le warrant est sur le marché boursier, plus il s’expose aux risques de fluctuation.
Par ailleurs, la loi fiscale impose de traiter les warrants dans un laps de temps assez court. Si le travailleur n’a pas reçu son net lié aux warrants après un long moment, il devra payer du précompte sur une somme qu’il n’a pas encore reçue.
Les warrants sont destinés à faire de l’optimisation rapide, du «quick win». L’idée est que le travailleur les revende le plus rapidement possible.
Catherine Langenaeken (Acerta)
Les warrants sont donc des options sur actions, mais l’idée n’est pas d’exercer l’option pour acquérir des actions sous-jacentes. Mais plutôt d’utiliser le warrant en tant que produit boursier et de le revendre le plus rapidement possible. En théorie, les warrant ont une durée de vie de 10 ans. Le prestataire RH sert en général d’intermédiaire pendant 5 jours ouvrables. Dans 99% des cas, le warrant est revendu dans le premier jour de vente possible. Ainsi, le travailleur reçoit son net dans un court délai.
6. Acheter des jours de congés supplémentaires en lieu et place de sa prime semble également une option fréquemment proposée par l’employeur. Est-ce avantageux?
Catherine Langenaeken: La valeur d’un jour de congé correspond à la valeur d’un jour de travail. Plus le salaire du travailleur est élevé, plus un jour de congé vaut cher. L’option n’est pas toujours populaire, car elle diminue le pouvoir d’achat au profit d’une augmentation du temps libre. Financièrement, le travailleur n’est donc pas gagnant. Il dégage juste plus de temps au profit de sa vie personnelle, mais perd du pouvoir d’achat.
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