Pourquoi la pompe à chaleur est le système de chauffage du futur
La fin du mazout de chauffage est actée dans les trois Régions. Celle du gaz se profile. La pompe à chaleur devrait largement en profiter, malgré son coût et ses obstacles.
C’est la fin d’un combustible qui fut longtemps privilégié, surtout en Wallonie. Le mazout de chauffage sera bientôt persona non grata dans les foyers belges. Le même sort est programmé pour le charbon. Et le gaz ne sera plus le bienvenu lui non plus d’ici quelques années. Dans ce contexte, une question taraude ceux dont la chaudière est en fin de vie: dans quel système de chauffage investir? Plus généralement, comment se chauffera-t-on dans le futur? En pleine transition énergétique, l’enjeu est de taille et concerne des dizaines de milliers de Belges. A Bruxelles, les chaudières à gaz en fonction sont âgées, en moyenne, de 18 ans et les chaudières à mazout de 26 ans. En Wallonie, on estime à 27 000 le nombre de chaudières à remplacer chaque année.
L’enjeu ne se situe pas uniquement du côté du combustible. L’autre priorité est la réduction des besoins en chauffage.
Système de chauffage: une lente extinction
Les dispositions légales en matière de système de chauffage dépendent des Régions. Toutes n’ont pas adopté le même rythme. Un point commun tout de même: les interdictions ne visent pas les installations existantes. Le législateur, que ce soit en Wallonie, à Bruxelles ou en Flandre, vise les remplacements de chaudière et les nouvelles installations.
Première sur la balle, la Flandre n’autorise plus l’installation de chaudières à mazout et à charbon dans les bâtiments neufs depuis 2022. La Wallonie passera ce cap le 1er mars 2025. Bruxelles, où le charbon est interdit depuis 2021, suivra quelques mois plus tard, le 1er juin 2025, mais l’interdiction y concernera tant les logements neufs qu’existants. En Wallonie, elle frappera les logements existants le 1er janvier 2026. A cette date, plus personne ne pourra installer de chaudière à mazout ou à charbon dans tout le pays. La disparition totale du combustible liquide n’est donc pas encore pour tout de suite. D’autant que dans le sud du pays, un ménage sur deux se chauffe encore au mazout ; à Bruxelles, ils seraient 10%.
Faut-il alors se tourner vers le gaz? Rien n’est moins sûr, car lui aussi est dans la ligne de mire des autorités, qui souhaitent réduire leur dépendance aux énergies fossiles. En Flandre, toujours pionnière, le couperet est tombé voici quelques mois: tout raccordement au gaz – y compris pour les chaudières à condensation – sera interdit dans les nouvelles constructions à partir de 2025. Ailleurs, on est plus timide. Bruxelles, qui vient de supprimer les primes pour ce type de système de chauffage, pourrait emboîter le pas. «C’est en discussion, mais il est fort probable que l’installation de chaudières à gaz sera découragée et que leur placement se fera sous condition», confirme Christophe Danlois, responsable du département installations techniques PEB et Plage chez Bruxelles Environnement. Un vrai défi: aujourd’hui, 80% des Bruxellois se chauffent au gaz. Cela représente beaucoup de logements à faire migrer progressivement vers un autre type de chauffage. Quant à la Wallonie, les autorités y sont plus frileuses. «Au stade actuel, il n’existe pas de volonté d’interdire le gaz. Mais on surveille l’évolution, sachant que les conduites de gaz peuvent servir à transporter des gaz verts, de l’hydrogène, etc.», précise la porte-parole de l’Ecolo Philippe Henry, ministre wallon du Climat et de l’Energie.
Partout des pompes à chaleur
Exit donc charbon, mazout et, à terme, très probablement le gaz. Que restera-t-il alors pour passer confortablement l’hiver? L’enjeu ne se situe pas uniquement du côté du combustible. Partout, on insiste sur une autre priorité: la réduction des besoins en chauffage. Et pour cela, au nord comme au sud, on mise – à coup de primes – sur la rénovation du bâti et une meilleure isolation. Quant au système de chauffage mis en avant pour remplacer tous les autres, la pompe à chaleur semble remporter (presque) tous les suffrages.
Pour rappel, cette technologie puise la chaleur dans son environnement (air, terre ou eau) – une énergie renouvelable, donc – et la restitue pour chauffer la maison et produire l’eau chaude sanitaire. Dans les constructions neuves, les promoteurs la plébiscitent largement. «Nous suivons ce qui se décide en Flandre, justifie Filip Deprez, coresponsable du développement chez AG Real Estate. Auparavant, nous installions quasi systématiquement des chaudières à gaz à condensation. Les appartements qui sortiront de terre fin 2023 ou en 2024 seront tous équipés de pompes à chaleur, même en Wallonie. Nous favorisons la géothermie quand c’est possible.» Chez Matexi, on acquiesce. «En Wallonie, nous avons encore d’anciens projets équipés avec des chaudières à gaz, mais partout ailleurs, c’est de la pompe à chaleur. Cela fait plusieurs années que nous réfléchissons à d’autres solutions que le gaz», insiste Dries Breyne, spécialiste de l’innovation au sein du groupe. Chez Thomas & Piron, la pompe à chaleur couplée à un système de chauffage au sol est également entrée dans les standards.
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Difficile d’estimer combien de pompes à chaleur ont déjà été posées en Belgique. «Mais les demandes sont très nombreuses», assure Georges Gronsfeld, responsable de la section chauffage, ventilation et air conditionné (HVAC) chez Techlink, la fédération des installateurs de chauffage. Il faut dire que chez nos politiciens, tout est fait pour encourager la technologie. Dans toutes les Régions, les primes ont été boostées. Et lorsque une pompe à chaleur classique ne peut être installée (dans un appartement existant en ville, par exemple), d’autres solutions, ambitieuses, sont envisagées. Comme faire fonctionner la pompe grâce à la «riothermie». «On utilise alors la chaleur des eaux d’égouttage pour climatiser le bâtiment. Cela devrait se développer à Bruxelles», estime Christophe Danlois.
Cela fait plusieurs années que nous réfléchissons à d’autres solutions que le gaz.
Le développement des réseaux
Et hormis la pompe à chaleur? Peu d’options sont ouvertes. D’ailleurs, sur le terrain, force est de constater qu’on se tourne toujours, pour l’instant, vers des chaudières à gaz ou à mazout et ce, malgré les interdictions futures. «La pompe à chaleur exige de gros investissements et la rentabilité n’est pas facile à définir. Tout le monde n’a pas les moyens», reconnaît Georges Gronsfeld. Le chauffage aux pellets ou bois (dit biomasse) pourrait se faire une place, mais bien plus marginale. En Wallonie et en Flandre, on le subsidie, en tout cas. «C’est une petite part par rapport à tout le reste, dans la mesure où les ressources sont limitées», note Jonas Moerman, conseiller énergie à l’asbl Ecoconso.
Des projets locaux, applicables à un endroit donné, pourraient gagner en importance. Comme les réseaux de chaleur, par exemple. Le principe: on récupère la chaleur produite par un élément tiers (un incinérateur, des bureaux, une usine…) pour chauffer de façon collective un quartier, une ville ou un ensemble d’immeubles. On trouve déjà quelques projets autour de l’incinérateur de Neder-Over-Heembeek, qui permet de chauffer le centre commercial Docks, à Bruxelles, ainsi que les serres royales de Laeken. En région liégeoise, Herstal est sur le point de se doter d’un réseau de chaleur du même type au départ de l’incinérateur Uvélia d’Intradel. A terme, il devrait permettre d’alimenter près de vingt mille ménages en chauffage. A Charleroi, on réfléchit à profiter de la chaleur des anciens sites miniers. «Pour l’instant, c’est peu exploité, mais la Wallonie aurait la possibilité de faire des choses intéressantes car il y a, dans certaines régions, des eaux du sous-sol à assez haute température», conclut Georges Gronsfeld. Mais ici aussi, les défis technologiques sont conséquents et les budgets élevés.
Volumineux pellets
La chaudière biomasse, qui fonctionne grâce aux pellets, coûte aussi plus cher qu’une chaudière classique à gaz. Il faut compter au moins 10 000 euros pour un modèle classique et environ 15 000 euros pour celui à condensation. Le gros désavantage: le volume de stockage sera à peu près deux fois plus grand qu’une citerne à mazout, déjà imposante. «Si on consomme 2 000 litres de mazout par an, il faudra quatre tonnes de pellets par an en équivalent énergie», précise Jonas Moerman, chez Ecoconso. D’autre part, les prix du pellet ont fortement augmenté même s’ils restent un peu moins cher que le mazout. «Or pendant des années, ils étaient deux à trois fois moins cher.» En Wallonie, l’installation d’un chauffage à pellets donne droit à une prime de 1 750euros à 6 000 euros, selon le type de chaudière et les revenus.
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